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dimanche, 12 janvier 2020

La 4e guerre mondiale a bien commencé !...

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La 4e guerre mondiale a bien commencé !...
 
par Michel Geoffroy
Ex: http://metapoinfos.hautetfort.com

Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Michel Geoffroy cueilli sur Polémia et consacré aux conséquences de  l'assassinat par les Américain du général Soleimani, homme-clef du régime iranien. Ancien haut-fonctionnaire, Michel Geoffroy a récemment publié La Superclasse mondiale contre les peuples (Via Romana, 2018).

Assassinat du général Qassem Soleimani : la 4e guerre mondiale a bien commencé !

L’assassinat du général iranien Qassem Soleimani, revendiqué par les Etats-Unis, apporte une nouvelle preuve que la quatrième guerre mondiale a bien commencé. Nous sommes en effet entrés dans la quatrième guerre mondiale, qui a succédé à la troisième – la guerre froide. C’est une véritable guerre des mondes car elle voit s’opposer différentes représentations du monde et aussi parce qu’elle a la stabilité du monde pour enjeu.

Le monde unipolaire contre le monde polycentrique

Cette guerre oppose avant tout les Etats-Unis, de plus en plus souvent alliés à l’islamisme, qui ne comprennent pas que le monde unipolaire a cessé de fonctionner, aux civilisations émergentes de l’Eurasie – principalement la Chine, l’Inde et la Russie – qui contestent de plus en plus leur prétention à diriger le monde.

Les Etats-Unis, bras armé de la super classe mondiale, veulent en effet maintenir leur rôle dirigeant mondial, acquis après la chute de l’URSS, car ils continuent de se voir comme une « nation unique », comme n’avait pas hésité à l’affirmer encore le président Obama devant une assemblée générale des Nations Unies stupéfaite !

Même affaiblis, ils entendent conserver leur hégémonie par n’importe que moyen, y compris militaires. Avec leurs alliés occidentaux transformés en valets d’armes, ils font donc la guerre au monde polycentrique, c’est-à-dire aux cultures, aux civilisations et aux peuples qui ne veulent pas d’un monde unidimensionnel.

Monde unipolaire versus monde polycentrique, voilà la matrice de la quatrième guerre mondiale.

La dé-civilisation occidentale

Ce que l’on nomme aujourd’hui l’Occident, correspond à un espace dominé et formaté par les Etats-Unis, et n’a plus qu’un rapport lointain avec la civilisation qui l’a vu naître, la civilisation européenne.

L’Occident aujourd’hui correspond à l’espace qu’occupe l’idéologie de l’américanisme : le matérialisme, l’individualisme fanatique, le culte de l’argent, le multiculturalisme, le féminisme hystérique, le messianisme, l’idéologie libérale/libertaire, et une certaine appétence pour la violence, principalement.

Cet Occident fait la guerre aux autres civilisations, y compris à la civilisation européenne, car les « valeurs » qu’il se croit en droit de promouvoir partout par la force, sont en réalité des antivaleurs, des valeurs mortelles de dé-civilisation. Pour cette raison aussi, la civilisation européenne entre en décadence, alors que la plupart des autres civilisations renaissent au 21ème siècle

La quatrième guerre mondiale recouvre donc un affrontement civilisationnel : le choc entre les civilisations renaissantes de l’Eurasie et la culture de mort véhiculée par l’américanisme.

Et ce choc contredit la croyance cosmopolite en l’émergence d’une unique civilisation mondiale.

Le mythe américain de la paix démocratique

Depuis la chute de l’URSS, les Etats-Unis sont passés d’une stratégie d’endiguement du communisme à une stratégie d’élargissement de leur modèle de société à tous les peuples, comme l’a annoncé sans détour Bill Clinton devant l’Assemblée générale des Nations Unies en 1993 : « Notre but premier doit être d’étendre et de renforcer la communauté mondiale des démocraties fondées sur le marché » [1].

Cette stratégie expansive correspond à la croyance dans la « paix démocratique » selon laquelle les Etats démocratiques seraient pacifiques par nature et parce que le modèle américain serait profitable à tous.

Mais, comme le souligne Christopher Layne [2], il s’agit d’une illusion : car rien ne vient confirmer que l’instauration de la démocratie au niveau d’un Etat annule les effets structuraux de la pluralité contradictoire des puissances et des intérêts au plan international.

Mais, surtout, la croyance dans la paix démocratique conduit nécessairement à souhaiter le renversement des Etats « non démocratiques » – les Etats-voyous selon le langage imagé nord-américain contemporain – pour que   des démocraties leur succèdent. Mais cette présomptueuse volonté de changement de régime [3] – qui a beaucoup de points communs avec l’islamisme implique une ingérence conflictuelle dans les affaires intérieures des autres Etats.

L’impérialisme de la démocratie n’a donc rien à envier au plan belliqueux à tous les autres impérialismes et ce n’est pas un hasard si dans leur courte histoire, les Etats-Unis ont été si souvent en guerre [4] !

La guerre chaotique occidentale

La quatrième guerre mondiale se déroule pour le moment principalement dans l’ordre géoéconomique : elle a pour enjeu la maîtrise des ressources énergétiques mondiales et celle des flux économiques et financiers et notamment la remise en cause de la domination du dollar, instrument de la domination globale des Etats-Unis puisqu’il leur permet de financer facilement leur arsenal militaire démesuré.

Mais elle se déroule aussi sur le terrain des guerres infra-étatiques et des « guerres civiles » internationalisées car commanditées de l’extérieur.

Depuis la fin du bloc soviétique, les Occidentaux, emmenés par les Etats-Unis, n’ont eu de cesse en effet d’encourager la destruction chaotique des puissances susceptibles de contrer leur projet de domination mondiale. Il s’agit de créer partout des poussières d’Etats impuissants et rivaux en application du vieux principe « diviser pour régner » !

La destruction de la Yougoslavie (1989-1992), suivi de la guerre illégale de l’OTAN au Kossovo (1998-1999) a constitué le coup d’envoi de la quatrième guerre mondiale.

Ces conflits ont contribué à affaiblir la périphérie de la Russie et aussi, par contre coup, à déstabiliser l’Union Européenne : désormais ingouvernable à 28 ou à 27 états et dirigée de fait par une Allemagne atlantiste, l’Union Européenne, ne compte quasiment pas sur la scène internationale comme acteur indépendant !

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Encercler la Russie

De même, la fin de l’URSS n’a nullement mis fin à la politique américaine d’encerclement de la Russie. Comme on le dit parfois avec humour : « la preuve que la Russie est menaçante : elle à mis ses frontières exprès à côté des bases de l’OTAN ! »

Car il s’agit de programmer l’émiettement de la puissance russe : notamment en encourageant la sécession Tchétchène (guerre de 1994 à 2000) et en soutenant les révolutions de couleur [5] qui organisent à chaque fois la mise en place de nouvelles équipes politiques anti-russes. Et bien sûr en s’efforçant de satelliser l’Ukraine grâce à la « révolution » d’Euromaïdan (hiver 2013 à février 2014), ayant, par un heureux hasard, abouti à la destitution illégale du président Yanoukovytch qui souhaitait le maintien des relations privilégiées avec la Russie [6]. Et aussi, par contre coup, à la séparation de la Crimée et à la guerre dans le Donbass.

Le scénario Euromaïdan s’est d’ailleurs aussi reproduit en Amérique Latine : avec le renversement en 2017 du président de l’Equateur, le radical Rafael Correa en 2017 et son remplacement par un pro-occidental, Lenin Moreno ; la tentative de déstabilisation du président du Venezuela, Nicolàs Maduro en fin 2018 ; les menaces contre Ortéga Président du Nicaragua et contre Cuba [7], présentés comme « la troïka de la tyrannie » par les Etats-Unis ; le renversement du président de la Bolivie Evo Morales en 2019, suite à un coup d’état institutionnel ayant conduit à….annuler sa réélection.

La guerre civile partout !

Mais c’est au Moyen et au Proche-Orient que la stratégie chaotique occidentale est la plus aboutie.

Avec la « guerre contre le terrorisme » en Afghanistan qui dure depuis… 18 ans, la seconde guerre d’Irak (2003) ; la déstabilisation de la Lybie, menée par la France (opération Harmattan), la Grande Bretagne et l’OTAN de mars à octobre 2011 – qui a provoqué par contrecoup la « crise migratoire » de 2015 en Europe et un chaos civil qui n’en finit pas [8]– et enfin la « guerre civile » en Syrie à partir de 2011, qui se termine en 2019 avec la défaite totale de l’Etat Islamique, suite à l’intervention décisive de la Russie à partir de 2015 ; sans oublier la guerre au Yemen.

Les uns après les autres, les Etats susceptibles de constituer un pôle de puissance et de stabilité, dans une région qui représente un enjeu énergétique majeur, mais aussi une mosaïque de peuples, de religions et où aucune frontière n’est jamais sûre, ont ainsi été attaqués et durablement déstabilisés. Avec toujours le même résultat : non pas la « démocratie », mais le chaos, la guerre civile, des milliers de morts civils et la voie ouverte à l’islamisme radical. Et la mainmise américaine sur les ressources énergétiques comme en Syrie.

Comme l’écrit le géopoliticien Alexandre Del Valle, il « suffit pour s’en convaincre de voir ce que sont devenus les Etats afghan, irakien, libyen, ou même l’ex-Yougoslavie, aujourd’hui morcelée en mille morceaux «multiconflictuels» comme la Macédoine, la Bosnie-Herzégovine ou le Kossovo, autant de pays déstabilisés durablement par les stratégies cyniques pro-islamistes et ou anti-russes et anti-bassistes des stratèges étatsuniens [9]».

Et toujours selon le même scénario : des bobards médiatiques à répétition (soutien du terrorisme, épuration ethnique, armes de destruction massive, utilisation de gaz contre la populationetc…) servent à présenter à l’opinion occidentale l’agression contre des Etats souverains, en violation des principes des Nations Unies, comme une opération humanitaire !

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L’Iran prochaine victime ?

Les Etats-Unis n’ont jamais caché que l’Iran était le prochain sur la liste du « changement de régime ». L’assassinat du général Qassem Soleimani, revendiqué par les Etats-Unis , venant après la récusation américaine du Traité sur le nucléaire iranien et le soutien américain ostensible aux manifestations en Iran, s’inscrivent à l’évidence dans une stratégie de changement de régime en devenir.

Même s’il s’agit d’un très gros morceau à avaler.

L’Iran, avec plus de 82 millions d’habitants en 2019, retrouve en effet progressivement son rôle de puissance régionale, héritière lointaine de l’empire Perse, qu’il jouait au temps du Shah. Il dispose aussi des 4èmes réserves prouvées de pétrole et des 1ères réserves de gaz mondiales….

L’Iran chiite développe son influence politique et religieuse sur un arc qui part de sa frontière afghane pour rejoindre l’Irak, la Syrie et le Liban. Il concurrence l’islam sunnite sous domination Saoudienne et soutenu par les Etats-Unis, qui regroupe, lui, l’Egypte, la Jordanie, les Etats du Golfe et la péninsule arabique. La confrontation avec l’Iran constitue un enjeu majeur pour l’Arabie Saoudite, d’autant que sa minorité chiite se concentre dans sa région pétrolifère et aussi pour Israël.

Dans un tel contexte, un conflit, direct ou indirect, entre les Etats-Unis et l’Iran ne pourrait qu’avoir de très graves répercussions mondiales.

Les Etats-Unis, véritable Etat-voyou

Le président Trump, qu’une certaine droite adule curieusement alors qu’il embarque allègrement les Européens dans la quatrième guerre mondiale, adopte à l’évidence un comportement qui tranche avec la relative prudence de ses prédécesseurs. Même si la ligne politique de cette nation messianique reste la même.

En fait, les Etats-Unis se croient désormais tout permis, en véritable Etat-voyou : récuser les traités qu’ils ont signé, relancer la course aux armements nucléaires [10], imposer des « sanctions » unilatérales à toute la planète sans aucun mandat du conseil de sécurité des Nations Unies, espionner les communications mondiales y compris celles de leurs « alliés », s’ingérer dans les affaires intérieures des Etats, taxer arbitrairement les importations, tuer des responsables politiques et militaires étrangers sans aucune déclaration de guerre etc…

Et l’on s’étonne encore que l’image de marque des Etats-Unis et de leurs « croisés » occidentaux, décline dans le monde, en particulier dans le monde musulman ?

Comme le souligne Alexeï Pouchkov [11] , ancien président de la commission des affaires étrangères de la Douma, la présidence Trump incarne une Amérique fiévreuse et nerveuse car elle a pris conscience de sa fragilité croissante dans le monde polycentrique qui vient. Une Amérique qui se tourne aussi de plus en plus vers elle-même pour faire face à ses problèmes intérieurs croissants.

Make America Great Again – rendre l’Amérique de nouveau grande -, le slogan de campagne du candidat Trump, revient à reconnaître que, justement, l’Amérique a perdu de sa superbe alors qu’elle ne se résout pas à abandonner sa suprématie.

Une contradiction dangereuse pour la paix du monde !

Michel Geoffroy (Polémia, 7 janvier 2020)

Notes :

[1] Le 27 septembre 1993

[2] Christopher Layne « Le mythe de la paix démocratique » in Nouvelle Ecole N° 55, 2005

[3] Regime change en anglais

[4] On dénombre pas moins de 140 conflits et interventions américaines dans le monde depuis le 18ème siècle même s’ils sont évidemment d’ampleur très variables

[5] Révolution des roses en Géorgie (2003), révolution orange en Ukraine (2004) et révolution des tulipes au Kirghizstan (2005); sans oublier la deuxième guerre d’Ossétie du Sud opposant en août 2008 la Géorgie à sa province « séparatiste » d’Ossétie du Sud et à la Russie ; un conflit étendu ensuite à une autre province géorgienne , l’Abkhazie.

[6] Une Ukraine dans l’UE et dans l’OTAN provoquerait le contrôle américain de la mer Noire

[7] Après «l’empire du mal», qui désignait l’URSS dans les années 1980 et «l’axe du mal», qui qualifiait les pays réputés soutenir le terrorisme dans les années 2000, un nouveau concept est venu de Washington pour identifier les ennemis des États-Unis: c’est la «troïka de la tyrannie».Dans un discours sur la politique de Washington concernant l’Amérique latine, John Bolton, conseiller à la sécurité du Président américain a désigné en novembre 2018 : le Venezuela bolivarien de Nicolas Maduro, le Nicaragua de Daniel Ortega et Cuba, où Miguel Diaz-Canel a succédé aux frères Castro.

[8] Le pays est actuellement secoué par le conflit armé entre les forces du maréchal Khalifa Haftar, et son rival installé à Tripoli, le Gouvernement d’union nationale (GNA) reconnu par l’ONU

[9] RT France du 10 avril 2019

[10] Les Etats -Unis se sont retirés le 1er février 2019 du traité sur les armes nucléaires de portée intermédiaire (en anglais : intermediate-range nuclear force treaty INF) – signé en 1987 par Ronald Reagan et Mikhaïl Gorbatchev, et l’un des grands symboles de la fin de la guerre froide – Ils se montrent déjà réticents à prolonger pour cinq ans le traité New Start – ou Start III – sur les armements nucléaires stratégiques qui, signé en 2011, arrive à échéance en 2021.Les Etats-Unis se sont aussi retirés du traité ABM en 2001

[11] Conférence de présentation de son ouvrage « Le Jeu Russe sur l’Echiquier Global » le 14 novembre 2019

samedi, 11 janvier 2020

Iranian Civilization

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Iranian Civilization

by Jason Reza Jorjani

Ex: http://www.europesolidaire.eu

La civilisation iranienne

Nous republions ici un remarquable article concernant l'Iran et sa civilisation. Elles remontent à la plus haute antiquité. Ce sont cinquante de ses sites archéologiques que Donald Trump a menacé de bombarder. Bombarderait-il également les pyramides en cas de conflit avec l'Egypte? Certainement

Iran Is More Than Just a Country, It Is One of the Great Aryan World Civilizations

Iran is far more than the nation-state that foreigners once widely referred to as Persia. Iran is an immortal idea.

Jason Reza Jorjani


A few countries are more than mere nations. They have been translated from the earthly plane into the spectral geography of ideas. As “Rome” is irreducible to Italy, and the modern state of Israel is only a reemergence of “Zion” into the mundane world, “Iran” is far more than the nation-state that foreigners once widely referred to as Persia. Iran is an immortal idea – a terrible thought in the mind of the gods (devâsdivs). Iran is destined to reemerge as the Leviathan from amongst all of Earth's great nations.

71DjhP+qrKL.jpgUntil 1935, Iran was referred to internationally as “Persia” (or La Perse), and the Iranian people were broadly identified as “Persians.” This was the case despite the fact that Persians always referred to themselves as Iranians (Irâni) and used the term Irânshahr (Old Persian Aryâna Khashatra) or “Aryan Imperium” in order to designate what Westerners call the “Persian Empire.”

The adjective Persian (Pârsi) has only been used by Iranians to describe the national language of Iran, which has been spoken, and especially written, by all Iranians regardless of whether it is their mother tongue. The Persian heritage is at the core of Iranian Civilization.

Civilizations are not as narrow as particular cultures in their ideological orientation. Even cultures evolve and are not defined by a single worldview in the way that a political party has a definite ideology. The inner dialectic that drives the historical evolution of Iranian Civilization is based on a tension between rival worldviews. This is comparable to the numerous worldview clashes that have shaped and reshaped Western Civilization, and is more dynamic than the creative tension between the worldviews of Confucianism, Taoism, Buddhism, and Communism and the cultural characters of the Han, the Manchurians, Mongols, and Tibetans in the history of Chinese Civilization.

The phrase “Iranian Civilization”, has long been in use by academics in the field of Iranology or Iranian Studies. That there is an entire scholarly field of Iranology attests to the world-historical importance of Iran. However, in the public sphere, and even among other academics, Iran has rarely been recognized as a distinct civilization alongside the other major civilizations of world history. Rather, Iran has for the most part been mistakenly amalgamated into the false construct of “Islamic Civilization.”

9781912079933.jpgWe have entered the era of a clash of civilizations rather than a conflict between nation states. Consequently, the recognition of Iran as a distinct civilization, one that far predates the advent of Islam and is now evolving beyond the Islamic religion, would be of decisive significance for the post-national outcome of a Third World War.

Iran is a civilization that includes a number of different cultures and languages that hang together around a core defined by the Persian language and imperial heritage. Besides the Persian heartland, Iranian Civilization encompasses Kurdistan (including the parts of it in the artificial states of Turkey and Iraq), the Caucasus (especially northern Azerbaijan and Ossetia), Greater Tajikistan (including northern Afghanistan and Eastern Uzbekistan), the Pashtun territories (in the failed state of Afghanistan), and Baluchistan (including the parts of it inside the artificial state of Pakistan).

As we shall see, Iranian Civilization deeply impacted Western Civilization, with which it shares common Indo-European roots. There are still a few countries in Europe that are so fundamentally defined by the legacy of the Iranian Alans, Sarmatians, or Scythians that they really belong within the scope of Iranian, rather than European or Western Civilization. These are Ukraine, Bulgaria, Croatia, and, should it ever secede from Spain, Catalonia. The belonging of these European, Caucasian, Middle Eastern, Central Asian, and South Asian ethnicities and territories to an Iranian civilizational sphere is, by analogy, comparable to how Spain, France, Britain, Germany, and Italy are all a part of Western Civilization.

An even closer analogy would be to China, which is also a civilization rather than simply a nation. China, considered as a civilization, includes many cultures and languages other than that of the dominant Han Chinese. For example, the Manchurians, Mongolians, and Tibetans. What is interesting about China, in this regard, is that its current political administration encompasses almost its entire civilizational sphere – with the one exception of Taiwan (and perhaps Singapore). In other words, as it stands, Chinese Civilization has nearly attained maximal political unity.

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Western Civilization also has a high degree of political unity, albeit not at the level of China. The Western world is bound together by supranational economic and military treaties such as the European Union (EU) and the North Atlantic Treaty Organization (NATO). By contrast, Iranian Civilization is currently near the minimal level of political unity that it has had throughout a history that spans at least 3,000 years.

To borrow a term from the Russian philosopher, Alexander Dugin, the Persian ethnicity and language could be described as the narod or pith of Iranian Civilization. This would be comparable to the role of the Mandarin language and the Han ethnicity in contemporary Chinese Civilization, or to the role of Latin and the Italian ethnicity in Western Civilization at the zenith of the Roman Empire when Marcus Aurelius had conquered and integrated Britain and Germany. Although I accept Samuel Huntington's concept of a “clash of civilizations”, I reject his distinction between what he calls “Classical Civilization” and Western Civilization.

This is a distinction that he adopts from Arnold Toynbee, and perhaps also Oswald Spengler, both of whom see the origins of Western Civilization in Medieval Europe. In my view, Western Civilization begins with Classical Greece and is adopted and adapted by Pagan Rome.

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The narod of a civilization can change. If Western Civilization were to prove capable of salvaging itself and reasserting its global dominance in the form of a planetary American Empire, this would no doubt involve a shift to the English language and the Anglo-Saxon ethnicity as the Western narod. The lack of a clear narod in Western Civilization at present is symptomatic of its decline and dissolution following the intra-civilizational war that prevented Greater Germany from becoming the ethno-linguistic core of the entire West. A very strong argument could be made that Germany and the German language were long destined to succeed Italy in this role, which Italy still plays to some extent through the Vatican's patronage of Latin and the Roman Catholic faith.

The alliance of Hitler with Mussolini could have prepared for such a transition. If, for whatever reason, Latin America were to one day become the refuge of Europeans and even Anglo-Saxons fleeing Europe and North America, there would be a very good chance that the Spaniard ethnicity and the Spanish language would become the narod of Western Civilization following this transformative crisis.

In the three thousand years of Iranian Civilization, the narod of the civilization has shifted only once. For the first five hundred years of discernable Iranian history, the Median ethno-linguistic consciousness was at the core of Iran's identity as a civilization that included other non-Median Iranian cultures, such as the Scythians. Actually, for most of this period, the Medes were embattled by the Assyrians and other more entrenched non-Iranian (i.e. non Aryan) cultures, such as the Elamites. It is only for a brief period (on the Iranian scale of history, not the American one) that the Medes established a strong kingdom that included other Iranian cultures and could consequently be considered a standard bearer of an Iranian Civilization rather than a mere culture.

This lasted for maybe a couple of hundred years before the revolt of Cyrus the Great in the 6th century BC saw the Persians displace the Medes and expand the boundaries of Iranian Civilization into the borders of the first true empire in history, one that included and integrated many non-Iranian kingdoms, and encompassed almost the entire known world.

For more than a thousand years after Cyrus, and despite the severe disruption of the Alexandrian conquest and colonization of Iran, we saw a succession of the three empires of the Achaemenids, the Parthians, and the Sassanians. The Achaemenid language was Old Persian, while the Parthians and Sassanians spoke and wrote Middle Persian (Pahlavi). These languages are direct ancestors of Pârsi (or Dari), the New Persian language that, in its rudiments, arose at the time of Ferdowsi (10th century AD) and has remained remarkably stable until the present day.

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For more than 2,500 years, the Persian ethnicity and language have defined the core identity of Iranian Civilization. That was not lost on all of the various Europeans who dealt with Iran as an imperial rival from the days of the classical Greeks, to the pagan Romans, to the Byzantines, the British, the French, and the Russians.

All of them, without exception, always referred to all of Iran and its entire civilizational sphere as “Persia” or the “Persian Empire.” Friedrich Nietzsche wished that the Persians would have successfully conquered the Greeks because he believed that they could have gone on to become better guardians of Europe than the Romans proved to be. Nietzsche claimed that “only the Persians have a philosophy of history.” He recognized that historical consciousness, of the Hegelian type, begins with Zarathustra's future-oriented evolutionary concept of successive historical epochs leading up to an unprecedented end of history.

The will to ensure that the Persian Gulf does not become Arabian, that Persian is not disestablished as the official language of Iran, and, in short, that Iranian Civilization does not disappear, is based on more than just patriotic sentimentality, let alone nationalistic chauvinism. Iran is certainly a civilization among only a handful of other living civilizations on Earth, rather than a lone state with its own isolated culture, like Japan, but Iran is even more than that. As we enter the era of the clash of civilizations, Iran's historic role as the crossroads of all of the other major civilizations cannot be overstated.

In his groundbreaking book The Clash of Civilizations and the Remaking of World Order, the Harvard political scientist Samuel Huntington argues for a new world order based on a détente of great civilizations rather than perpetual conflict amongst nation-states. In effect, Huntington envisages the end of the Bretton Woods International System put in place from 1945–1948 after the Second World War. He advocates for its replacement with a geopolitical paradigm that would be defined by the major world-historical countries. These are the countries that can each be considered the “core state” of a civilization encompassing many peripheral vassal or client states.

The core state of any given civilization can change over the course of history. For example, Italy was the core state of Western Civilization for many centuries, and as the seat of the Roman Catholic Church it still has significant cultural influence over the West – especially in Latin America.

Currently, however, the United States of America plays the role of the Western civilizational core state, with the North Atlantic Treaty Organization (NATO) effectively functioning as the superstructure of an American Empire coextensive with the West, with the exception of Latin America, where the United States has been economically and diplomatically dominant at least since the declaration of the Monroe Doctrine.

Huntington identifies less than a handful of surviving world-class civilizations whose interactions would define the post-international world order: Western Civilization, Orthodox Civilization, Chinese Civilization, and Islamic Civilization. The core states of the first three are America, Russia, and China. Within the context of his model a number of major world powers lack civilizational spheres. These “lone states” notably include India and Japan. While it has a high level of culture, and deep historical ties to China, Japan is not a part of Chinese Civilization and yet it lacks a civilizational sphere of its own that would encompass other states. Had the Japanese Empire triumphed in the Second World War, Japan might have become a civilization in its own right – one dominating the Pacific.

Référence

https://russia-insider.com/en/history/iran-more-just-coun...

Pour en savoir plus
https://arktos.com/2019/09/01/the-leviathan-of-iranian-ci...

Tensions en Méditerranée : le retour de la Turquie ?...

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Tensions en Méditerranée : le retour de la Turquie ?...

par Bernard Lugan
Ex: http://euro-synergies.hautetfort.com

Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Bernard Lugan, cueilli sur son blog et consacré à l'annonce de l'engagement l'armée turque en Libye. Historien et africaniste, Bernard Lugan a publié de nombreux ouvrages, dont  Histoire de l'Afrique du Nord (Rocher, 2016), Algérie - L'histoire à l'endroit (L'Afrique réelle, 2017), Atlas historique de l'Afrique (Rocher, 2018) et Les guerres du Sahel (L'Afrique réelle, 2019).

Et si son intervention militaire en Libye était d’abord pour la Turquie un moyen de pression pour obtenir la révision du Traité de Lausanne qui fixa ses frontières maritimes en 1923 ?

Trois événements de grande importance rebattent le jeu géopolitique méditerranéen :

1) Le 7 novembre 2019, afin de contrôler le tracé du gazoduc EastMed par lequel se feront les futures exportations de gaz du gigantesque gisement de la Méditerranée orientale vers l’Italie et l’UE, la Turquie a signé avec le GUN (Gouvernement d’Union nationale libyen), l’un des deux gouvernements libyens, un accord redéfinissant les zones économiques exclusives (ZEE) des deux pays. Conclu en violation du droit maritime international et aux dépens de la Grèce et de Chypre, cet accord trace aussi artificiellement qu’illégalement, une frontière maritime turco-libyenne au milieu de la Méditerranée.

2) La sauvegarde de cet accord passant par la survie militaire du GUN, le 2 janvier 2020, le Parlement turc a voté l’envoi de forces combattantes en Libye afin d’empêcher le général Haftar, chef de l’autre gouvernement libyen, de prendre Tripoli.

3) En réaction, toujours le 2 janvier, la Grèce, Chypre et Israël ont signé un accord concernant le tracé du futur gazoduc EastMed dont une partie du tracé a été placée unilatéralement en zone maritime turque par l’accord Turquie-GUN du 7 novembre 2019.

Ces évènements méritent des explications:

AVT_Bernard-Lugan_2614.jpgPourquoi la Turquie a-t-elle décidé d’intervenir en Libye ?

La Libye fut une possession ottomane de 1551 à 1912, date à laquelle, acculée militairement, la Turquie signa le Traité de Lausanne-Ouchy par lequel elle cédait la Tripolitaine, la Cyrénaïque et le Dodécanèse à l’Italie (voir à ce sujet mes deux livres Histoire de la Libye  et Histoire de l’Afrique du Nord des origines à nos jours).

Depuis la fin du régime Kadhafi, la Turquie mène un très active politique dans son ancienne possession en s’appuyant sur la ville de Misrata. A partir de cette dernière, elle alimente les groupes armés terroristes sahéliens afin d’exercer un chantage sur la France : « Vous aidez les Kurdes, alors nous soutenons les jihadistes que vous combattez  »…

A Tripoli, acculé militairement par les forces du général Haftar, le GUN a demandé à la Turquie d’intervenir pour le sauver. Le président Erdogan a accepté en échange de la signature de l’accord maritime du 7 novembre 2019 qui lui permet, en augmentant la superficie de sa zone de souveraineté, de couper la zone maritime économique exclusive (ZEE) de la Grèce entre la Crête et Chypre, là où doit passer le futur gazoduc EastMed.

En quoi la question du gaz de la Méditerranée orientale et celle de l’intervention militaire turque en Libye sont-elles liées ?

En Méditerranée orientale, dans les eaux territoriales de l’Egypte, de Gaza, d’Israël, du Liban, de la Syrie et de Chypre, dort un colossal gisement gazier de 50 billions de m3 pour des réserves mondiales de 200 billions de m3 estimées. Plus des réserves pétrolières estimées à 1,7 milliards de barils de pétrole.

En dehors du fait qu’elle occupe illégalement une partie de l’île de Chypre, la Turquie n’a aucun droit territorial sur ce gaz, mais l’accord qu’elle a signé avec le GUN lui permet de couper l’axe du gazoduc EastMed venu de Chypre à destination de l’Italie puisqu’il passera par des eaux devenues unilatéralement turques… Le président Erdogan a été clair à ce sujet en déclarant que tout futur pipeline ou gazoduc nécessitera un accord turc !!! Se comportant en « Etat pirate », la Turquie est désormais condamnée à s’engager militairement aux côtés du GUN car, si les forces du maréchal Haftar prenaient Tripoli, cet accord serait de fait caduc.

Comment réagissent les Etats spoliés par la décision turque ?

Face à cette agression, laquelle, en d’autres temps, aurait immanquablement débouché sur un conflit armé, le 2 janvier, la Grèce, Chypre et Israël ont signé à Athènes un accord sur le futur gazoduc EastMed, maillon important de l’approvisionnement énergétique de l’Europe. L’Italie, point d’aboutissement du gazoduc devrait se joindre à cet accord.

De son côté, le maréchal Sissi a déclaré le 17 décembre 2019 que la crise libyenne relevait de « la sécurité nationale de l’Egypte » et, le 2 janvier, il a réuni le Conseil de sécurité nationale. Pour l’Egypte, une intervention militaire turque qui donnerait la victoire au GUN sur le général Haftar représenterait en effet un danger politique mortel car les « Frères musulmans », ses implacables ennemis, seraient alors sur ses frontières. De plus, étant économiquement dans une situation désastreuse, l’Egypte, qui compte sur la mise en chantier du gazoduc à destination de l’Europe ne peut tolérer que ce projet, vital pour elle, soit remis en question par l’annexion maritime turque.

Quelle est l’attitude de la Russie ?

La Russie soutient certes le général Haftar, mais jusqu’à quel point ? Quatre grandes questions se posent en effet quant aux priorités géopolitiques russes :

1) La Russie a-t-elle intérêt à se brouiller avec la Turquie en s’opposant à son intervention en Libye au moment où Ankara s’éloigne encore un peu plus de l’OTAN ?

2) A-t-elle intérêt à voir la mise en service du gazoduc EastMed qui va fortement concurrencer ses propres ventes de gaz à l’Europe ?

3) Son intérêt n’est-il pas que la revendication turque gèle la réalisation de ce gazoduc, et cela, pour des années, voire des décennies, compte tenu des délais impartis aux cours internationales de justice ?

4) A-t-elle intérêt à affaiblir le partenariat qu’elle a établi avec la Turquie à travers le gazoduc Turkstream qui, via la mer Noire, contourne l’Ukraine et qui va prochainement être mis en service. ? D’autant plus que 60% des besoins en gaz de la Turquie étant fournis par le gaz russe, si Ankara pouvait, d’une manière ou d’une autre profiter de celui de la Méditerranée orientale, cela lui permettrait d’être moins dépendante de la Russie…ce qui ne ferait guère les affaires de cette dernière…

Et si, finalement, tout n’était que gesticulation  de la part du président Erdogan afin d’imposer une renégociation du Traité de Lausanne de 1923 ?

La Turquie sait très bien que l’accord maritime passé avec le GUN est illégal au point de vue du droit maritime international car il viole la Convention des Nations Unies sur le Droit de la Mer (CNUDM) que la Turquie n’a pas signée. Cet accord est également illégal au regard des Accords de Skrirat du mois de décembre 2015 signés sous les auspices des Nations Unies et qui constituèrent le GUN car ils ne donnent pas mandat à son chef, Fayez el-Sarraj, de conclure un tel arrangement frontalier. De plus, n’ayant que le Qatar pour allié, la Turquie se trouve totalement isolée diplomatiquement.

Conscient de ces réalités, et misant à la fois sur l’habituelle lâcheté des Européens et sur l’inconsistance de l’OTAN effectivement en état de « mort cérébrale », le président Erdogan est soit un inconscient jouant avec des bâtons de dynamite soit, tout au contraire, un calculateur habile avançant ses pions sur le fil du rasoir.

Si la seconde hypothèse était la bonne, le but de la Turquie serait donc de faire monter la pression afin de faire comprendre aux pays qui attendent avec impatience les retombées économiques de la mise en service du futur gazoduc EastMed, qu’elle peut bloquer le projet. A moins que l’espace maritime turc soit étendu afin de lui permettre d’être partie prenante à l’exploitation des richesses du sous-sol maritime de la Méditerranée orientale. Or, pour cela, il conviendrait de réviser certains articles du Traité de Lausanne de 1923, politique qui a déjà connu un début de réalisation en 1974 avec l’occupation militaire, elle aussi illégale, mais effective, de la partie nord de l’île de Chypre.

Le pari est risqué car la Grèce, membre de l’OTAN et de l’UE et Chypre, membre de l’UE, ne semblent pas disposées à céder au chantage turc. Quant à l’UE, en dépit de sa congénitale indécision, il est douteux qu’elle acceptera de laisser à la Turquie le contrôle de deux des principaux robinets de son approvisionnement en gaz, à savoir l’EastMed et le Turkstream.

Bernard Lugan (Blog de Bernard Lugan, 5 janvier 2020)

China actual: entrevista a Gustavo Girado

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China actual: entrevista a Gustavo Girado

Ex: https://hernandezarregui.blogspot.com

En el contexto de las 7° Jornadas de Comercio Exterior organizadas por el Consejo Profesional de Ciencias Económicas (CPCE) de Córdoba el 1 de noviembre de 2019, conversamos con el Mgter. Gustavo Girado sobre la República Popular China, su nuevo rol en los esquemas de poder global y qué lugar cabe a América Latina, y Argentina en particular, en el presente contexto.

¿TIENE POSIBILIDAD CHINA DE CONVERTIRSE EN UN “IMPERIO” CULTURAL?

Por grado de alcance a primera vista parecería que sí, pero hay que ser cautos de no analizar a China bajo categorías republicanas, ya que sus nacionales poseen un carácter civilizatorio al respecto. Es decir, no se miran a sí mismos como un Estado Nación, sino como una civilización. Entonces, cuando los chinos se autorreferencian, incluyen asimismo a su diáspora. Si uno tiene en cuenta que en muchos de los países de la región de Asia-Pacífico los chinos constituyen la primera etnia comercial, entonces sí cabe considerar que la cultura china permea gran parte de lo que se consume a nivel mundial.

Ahora bien hay que tener en cuenta las diferencias entre lo que se considera como “imperio cultural” y el desarrollo del soft power, el cual los chinos recién están empezando a desarrollar. Por ejemplo, no podría Huawei, la cual utiliza componentes tecnológicos cotidianos para sus teléfonos móviles, difundirse en el mundo sin un trasfondo de empatía con los valores orientales que fueron los que lo generaron. La categoría de “imperio” no me parece correcta para el momento histórico en el que vivimos y como concepto para describir la forma de desarrollo de la política exterior china.

La etnia china tiene actualmente una fuerte presencia en muchos lugares del mundo, por ende es inevitable que te permeen sus tradiciones y costumbres. Pero si uno va puntualmente al soft power, ejemplificándolo con el desarrollo de los Instituto Confucio, eso recién empieza, sino observemos hace cuánto otros institutos culturales occidentales (franceses, italianos o estadounidenses) tienen presencia en nuestro país y como no nos referimos a ese fenómeno como algo imperialista.

En síntesis, si consideramos entonces a la cultura como un hecho humano, sí podemos afirmar con certeza que hay una fuerte presencia china en el mundo hoy, fuerte en América del Norte, Europa, África y buena parte de Asia lógicamente. Sí hay que decir que esa presencia es escasa en América Latina y más en Argentina.

TENIENDO EN CUENTA EL DESARROLLO EN EL PLANO MATERIAL Y ECONÓMICO, ¿EN QUÉ SECTORES ECONÓMICOS ESTÁ FOCALIZADO HOY CHINA, Y CÓMO LA GUERRA COMERCIAL CON ESTADOS UNIDOS PUEDE AFECTAR ESTO?

Esta pregunta se relaciona con el Plan Made in China 2025, el cual comprende un conjunto de sectores vinculados a la alta tecnología y en los cuales China busca posicionarse a la vanguardia. Entre estos podemos mencionar a las energías renovables, robótica, Inteligencia Artificial, vehículos autónomos, la tecnología 5G, etc. Son aproximadamente 10 sectores que están incluidos en este Plan. Ahora bien, este contexto de conflicto comercial los va a atrasar indefectiblemente, ya que el núcleo de esta guerra (afirmado por el propio Trump) reside en detener el avance chino en estos campos, el cual amenaza la superioridad estadounidense al respecto.

POR ENDE, CONSIDERANDO LA DIRECCIÓN DEL DESARROLLO CHINO, EL CONTEXTO INTERNACIONAL, Y EL RECIENTE CAMBIO DE GESTIÓN EN ARGENTINA, CON UNA RETÓRICA MÁS CONFRONTATIVA PARA CON LOS CENTROS TRADICIONALES DE PODER, ¿PIENSA QUE PUEDE HABER UN ACERCAMIENTO POLÍTICO MÁS SÓLIDO HACIA CHINA, MÁS ALLÁ DE LA TRADICIONAL COOPERACIÓN EN MATERIA ECONÓMICA?

Sí, yo creo que va a haber. Desafortunadamente nuestra situación económica es muy mala. Si esta no fuese tan extrema habría muchas más posibilidades. Esto a razón de que la próxima gestión de gobierno no va a contar con herramientas para negociar y se vería forzado a aceptar cualquier tipo de términos en una hipotética mesa de negociaciones.

Más allá de eso, va a haber una cooperación un poco más sólida simplemente porque el formato de la relación externa que la próxima gestión quiere construir no implica una relación tan estrecha y fuerte con el ordenamiento del hemisferio norte occidental liderado por Estados Unidos, la cual se hizo explícita por la gestión del presidente Macri.

Esto último tuvo sus consecuencias ya que cuando Macri quiso disminuir vínculos con China en favor de los Estados Unidos, no le fue bien. China era el único que financiaba y traía infraestructura sin ningún tipo de condicionalidades, y eso en buena parte se perdió. Las promesas hechas por Trump para el ingreso de productos argentinos, como los limones o los biocombustibles se vieron finalmente truncas. Además, para agregarle a este contexto, Europa permaneció cerrada a los dichos productos, como lo estuvo desde el 2001, acompañado de una ausencia casi total de inversiones de dicho continente en Argentina.

¿ENTONCES QUÉ MODELO POLÍTICO CONSIDERA QUE PUEDE EXPLOTAR MEJOR LAS OPORTUNIDADES DE COMERCIO QUE OFRECE CHINA?

Yo creo que lo puede aprovechar mejor un futuro gobierno de Fernández por lo que han dicho hasta aquí. Juzgando el pasado tendría que asumir que lo que viene es igual a lo que hubo y no tengo por qué pensar eso. La situación argentina es mucho peor pero no es distinta a la de 1989, 1990 y quizá no es muy distinta a la del 2001. Así que no sé si vale medir con la misma vara momentos tan diferentes.

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¿QUÉ PODRÍA IMITAR ARGENTINA DEL MODELO PRODUCTIVO CHINO?

Básicamente nada. Pero bien podríamos retomar la vieja historia de planificación que tanto éxito tuvo a nivel institucional. Cuando Argentina planificaba crecía, de Perón en adelante, los ministerios tenían una cultura institucional. Pero la planificación implica tener Junta Nacional de Granos, precios fijados por el Estado para que el pequeño productor no trabaje a pérdida, no es que solamente cuatro genios digan que tenemos que hacer aviones nacionales. Implica todo un plan. Acá hubo planes quinquenales en la época de Perón que en parte fueron exitosos así que uno puede pensar que retomar los planes quinquenales no es una idea descabellada, pero eso enseguida tiene una connotación política casi fascista, estalinista. No tenemos por qué llamarlo así, podemos llamarlos cuatrienales, que respondan a un gobierno entero. Pero ahora no se puede planificar nada, tenés que ver cómo generar recursos para darle de comer a la gente y generar trabajo. Precio sostén, junta nacional de granos, ley de semillas.

¿QUÉ OBSTÁCULOS EN LA RELACIÓN BILATERAL HABRÍA QUE SUPERAR?

No se me ocurre a primera intuición. Si es bilateral es gobierno-gobierno, está todo por ganar ahí. Siempre va a haber obstáculos. A nosotros nos cuesta vender, pero la dificultad es nuestra. A ellos les cuesta trabajar con culturas laborales mucho más institucionalizadas que las que tienen allá. Ellos también tienen que superar eso.

ES UNA PREGUNTA CONTRAFÁCTICA, PERO TENIENDO EN CUENTA EL CAMBIO DE GOBIERNO Y LAS DIVERSAS CRISIS QUE ESTÁN SUCEDIENDO EN LA REGIÓN, ¿INFLUIRÍA EN LA RELACIÓN CON CHINA QUE ARGENTINA PUEDA CONFIGURAR UN MAPA TERRITORIAL DE FILIACIÓN CON LOS OTROS GOBIERNOS?

No proyectaría. China nos sigue viendo como un conjunto agregado de economías muy extrañas para ellos, con poco apego al trabajo dirían. Pero no comprenden por qué habiendo comida y recursos seguimos siendo un apéndice norteamericano. Si a nosotros nos cuesta entenderlo, más les cuesta a ellos.

¿CREE QUE SERÍA BENEFICIOSO PARA ARGENTINA ROMPER EL VÍNCULO DE INVERSIONES CON ESTADOS UNIDOS Y BUSCAR MÁS INVERSIÓN CHINA?

No creo que sea necesario, hay muy poco vínculo comercial y de inversiones con Estados Unidos, hay solo una fuerte vocación política en la conducción actual que se puede congelar. ¿Qué implica? Estados Unidos usa un brazo financiero que es el Fondo Monetario Internacional para aplicar determinadas políticas en Sudamérica, con mucho éxito hasta ahora, y Argentina decidió políticamente que esto no lo va a revertir, que va a pagar la deuda. Si es cierto que el gobierno norteamericano ha puesto exigencias para seguir apoyando, ahí sí es otro escenario. Pero yo creo que sería muy equivocado que Argentina se recueste en China para decirle que no a Estados Unidos, no es necesario.

Extraído de CBAGLOABAIL 

vendredi, 10 janvier 2020

Soleimani: un asesinato que puede cambiar la historia

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Soleimani: un asesinato que puede cambiar la historia

Por Juan Gabriel Labaké

Ex: https://hernandezaregui.blogspot.com

El terrible asesinato del líder militar y político iraní señor Qassem Soleimani, perpetrado por una orden expresa del presidente norteamericano Donald Trump, ha producido un impacto de trascendencia planetaria. Para algunos observadores internacionales ese crimen podría significar, incluso, el desencadenamiento de una guerra de ámbito mundial.

Ese peligro, que parecía inminente en las primeras horas posteriores al asesinato, se ha reducido en buena medida por el acuerdo telefónico logrado entre el canciller chino Wang Yi, y su colega ruso Serguéi Lavrov. De acuerdo con la información recibida en forma directa de nuestro compañero y periodista Gabriel Fernández, ambos ministros de Relaciones Exteriores “acordaron aceleradamente adoptar medidas conjuntas para resolver pacíficamente los conflictos en Oriente Medio”. Luego, los presidentes de ambos países “homologaron” el acuerdo ministerial.

Al margen de sus derivaciones, que son incalculables y siempre graves, la provocación del presidente norteamericano, sumada a la dura respuesta de Irán ya la actitud adoptada por China y Rusia plantean para nuestro país una serie de inquietudes que es necesario analizar y afrontar sin filtro alguno.

En primer lugar, el asesinato de Soleimani nos demuestra con toda crudeza que Estados Unidos exigirá a la Argentina, como a cualquier otro país de Latinoamérica, una obediencia ciega y total a sus deseos y una adhesión acrítica a sus estrategias internacionales de poder, a la hora de “ayudarnos” en nuestros problemas económicos en general y en el tema de la deuda en particular. Para el señor Trump y su equipo no hay términos medios ni diálogo auténtico alguno: si necesitamos su ayuda, exigirán la obediencia debida.

En segundo lugar, este asesinato en Bagdad ha desnudado lo que hace tiempo se viene observando en el mundo: Estados Unidos ya no es la potencia hegemónica de la década de 1990 y de 2000. Hoy, cualquier exceso norteamericano, semejante al producido con el asesinato de Soleimani, tendrá una respuesta de China y Rusia.

En tercer lugar, y tal como viene sucediendo en los últimos años, la respuesta chino-rusa a los desplantes de Estados Unidos no será bélica, sino tendiente a apaciguar los ánimos y arreglar las diferencias en la mesa de negociaciones. Está claro que esto no se debe a ningún beatífico espíritu pacifista, sino a la seguridad de China y Rusia de que el tiempo juega a su favor.

A su vez, la actitud provocadora de Estados Unidos responde a la creencia de buena parte de su dirigencia de que, mientras más se demore en hacerle la guerra a China, más segura será su derrota. Esa brutal disyuntiva fue expuesta por primera vez por Henry Kissinger en uno de sus libros, en el cual llegó a proponer que, antes de que fuera demasiado tarde, Estados Unidos debía apresurarse a tirar una bomba atómica en Pekín o Shangai para frenar el desarrollo chino. El problema para los EEUU y sus satélites parece ser que ya es tarde.

UN NUEVO PANORAMA PARA NOSOTROS

Todo ello abre un nuevo panorama para que la Argentina.

Sin exageración y al margen de cualquier sectarismo, podemos afirmar que desde el día en que la dictadura militar derrocó al gobierno constitucional de Isabel Perón, la Argentina ha confiado exclusivamente en el apoyo norteamericano para la solución de sus problemas económicos y financieros, aún a costa de tener que practicar el conocido “seguidismo acrítico” en todos los rubros de nuestro accionar oficial.

Y siempre el problema fundamental, que ató y ata a la Argentina a los dictados de Estados Unidos, ha sido y es la deuda externa y la necesidad del apoyo norteamericano ante el Fondo Monetario Internacional para lograr los sucesivos acuerdos-ajustes con ese organismo.

De esa forma, la dictadura militar apoyó a “la contra” nicaragüense y participó del terrible Operativo Cóndor, propuesto e impulsado por los Estados Unidos.

También Alfonsín, en búsqueda del apoyo norteamericano en las negociaciones con el Fondo Monetario Internacional, acató las presiones de Washington que le exigían despedir a su buen ministro de economía Bernardo Grinspun, y reemplazarlo por un hombre “amigo” de EEUU, como fue Juan Vital Sourrille.

Nada hay que agregar a lo ya sabido sobre el “seguidismo acrítico” hacia la estrategia política norteamericana que practicó Carlos Menem y su superministro Domingo Cavallo, a cambio de un supuesto apoyo económico y del galardón “engañabobos” de “mejor alumno” con que engolosinaron a nuestro entonces presidente.

Y, finalmente, durante los 12 años de gobierno kirchnerista el apego de nuestro país a la estrategia internacional de Estados Unidos -siempre debido a la deuda- no varió en lo fundamental, tema que por su delicadeza y extensión queda para otra oportunidad.

Lo cierto es que, hoy, la Argentina está siendo literalmente sitiada por Estados Unidos para obligarla, sin ningún miramiento, a seguir –punto por punto- los objetivos internacionales del país del norte, y siempre con la promesa de que, si aceptamos sus condiciones, nos ayudará a renegociar la deuda con el FMI.

Las advertencias de LA NACIÓN

Sugestivamente, LA NACIÓN, el tradicional diario liberal de la Argentina, en su edición impresa del 4-1-2020, ha dedicado un artículo, firmado por una de sus secretarias de redacción, la señora Inés Capdevila, a recordarnos cuáles son las exigencias de Estados Unidos para un eventual apoyo en nuestras tratativas con el FMI.

Nos recuerda la señora Capdevila lo difícil que será aislar a la Argentina de la política global (de EEUU, claro está), lo complejo que es hacer equilibrio en un mundo dividido en bandos y lo peligroso que podría ser supeditar la relación con otros países a la necesidad de políticas internas.

A continuación, y para que no queden dudas, la señora Capdevila enumera los temas “peligrosos” y cita:

Volver a debatir la muerte de Alberto Nisman y, por detrás de ella, el atentado contra la AMIA y la participación de Irán en él.

La probable auditoría del peritaje de la gendarmería.

La pretensión de la ministra de seguridad, Sabina Frederic, de revisar la calificación de grupo terrorista efectuada contra Hezbollah por Macri.

Además, le recuerda al presidente Alberto Fernández que cualquier posición que tome frente a la muerte de Soleimani será analizada con microscopio dentro y fuera de la Argentina; incluso, agrega, si el gobierno de Fernández decide mantener silencio y distancia frente a ese atentado, las necesidades económicas le recordarán que no es tan fácil mantener a la Argentina fuera del mundo.

Sigue diciendo la señora Capdevila que, pocos días después de que ganara las elecciones presidenciales, Fernández recibió la llamada del jefe de Estado norteamericano con la promesa de que contarán con su apoyo cuando la Argentina se siente a negociar con el FMI. Y agrega: Fue una advertencia de que ese respaldo tan vital para el país no será gratuito (…) Eso ya lo dejó claro Donald Trump desde mediados de noviembre cuando le llamó la atención a Alberto Fernández por su respaldo al ex presidente boliviano Evo Morales”.

También hace pocos días, afirma Capdevila, la Embajada norteamericana publicó un sugerente twits sobre la conveniencia de rechazar el sistema 5G chino.

En resumen, para darnos su apoyo ante el FMI, EEUU nos ha exigido hasta ahora:

  • No investigar la muerte de Nisman.
  • No auditar el peritaje de la Gendarmería.
  • Seguir la actual falsa y tramposa investigación del atentado a la AMIA.
  • Mantener la acusación sin ninguna prueba contra Irán.
  • No revisar la absurda calificación de terrorista de Hezbollah.
  • No apoyar a Evo Morales.
  • No comprar el sistema chino de 5G.

Con el asesinato de Soleimani, concluye la periodista, la escalada con Irán se transformó en el máximo conflicto para Estados Unidos, de modo que el presidente Fernández debería preguntarse si, en casos “menores” como el de Bolivia o del 5G, Estados Unidos exigió “fidelidad”, ¿qué demandará a cambio de su aval ante el Fondo Monetario Internacional en el escenario de una guerra con Irán?

Ante tan arbitrarias exigencias de EEUU para apoyarnos ante el FMI, y en vista de la voluntad “mediadora” de China y Rusia en el asesinato de Soleimani, es dable preguntarse si no habrá llegado el momento de iniciar conversaciones con Rusia y China para tener un contrapeso que ponga las cosas en su justo medio, o al menos lejos de un extremo avasallante como el que el señor Trump pretende. Después de todo, es bien sabido que China ha manifestado al actual gobierno argentino que “está en condiciones de comprar toda la deuda de la Argentina”… lo cual dejaría a EEUU sin el látigo con el que nos tortura y amenaza.

Buenos Aires, 5 de enero de 2020.

By CENTRO DE ESTUDIOS HERNANDEZ ARREGUI en enero 06, 2020

mercredi, 08 janvier 2020

Guerre totale en Libye, débarquement de l’armée turque…

L’embrasement de l’autre côté de la Méditerranée et jusqu’aux pays du Golfe semble plutôt s’accélérer.

Alors qu’Erdogan, le grand mamamouchi truc, veut débarquer ses soldats pour « stabiliser » la Libye… ainsi que ses réserves de pétrole, c’est le Général Haftar qui est à la manœuvre en Libye et vient de lancer ses troupes dans la conquête de la ville de Syrte et de son… port !

Où donc Erdogan va-t-il pouvoir débarquer ses chars…? Voilà qui va compliquer la tâche des Turcs, surtout que l’Algérie est vent debout contre l’intervention turque.

Bref, encore un nouveau front à surveiller de près car que ce soit le gaz ou le pétrole algérien ou les approvisionnements libyens, tout cela alimente et irrigue l’Europe en énergie peu coûteuse.

Charles SANNAT

L’Armée nationale libyenne de Haftar entre dans la ville de Syrte et occupe le port, selon une source militaire

Les troupes du maréchal Khalifa Haftar sont entrées à Syrte, ont pris le contrôle du port et de certains quartiers de la ville, a appris Sputnik auprès d’une source militaire au sein de l’Armée nationale libyenne (ANL).

Au cours de la première phase de la prise de Syrte, des forces de l’Armée nationale libyenne ont débarquées et se sont emparées du port de la ville, a indiqué à Sputnik une source militaire.

«[Des unités de Khalifa Haftar] ont pris le contrôle de la base militaire d’As-Saadi, de certains quartiers de la ville et s’avancent à présent vers le centre-ville», a-t-il ajouté.
Les informations sur l’avancement des troupes d’Haftar ont été confirmées par un représentant des Forces de la défense de Syrte à la chaîne Al-Jazeera.

«Les troupes du GNA [Gouvernement libyen d’union nationale dirigé par Fayez el-Sarraj, ndlr] mènent les combats contre les forces d’Haftar qui tentent de s’approcher de la ville de Syrte. Nous confirmons que les troupes d’Haftar se sont emparées de la base militaire de Kardabia au sud de la ville et essayent d’atteindre le centre-ville», a-t-il détaillé.
À son tour, la chaîne de télévision Sky News Arabia signale, se référant aux déclarations de l’ANL, que cette dernière a pris le contrôle complet de la ville.

Source agence russe sputnik.com ici

Prévisions pour 2020 – Tourbillons multiples

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Prévisions pour 2020 – Tourbillons multiples


Par James Howard Kunstler

Source: kunstler.com

Ex: https://www.lesakerfrancophone.fr

Les méta-questions

La grande question pour l’année 2020 est simple : l’Amérique peut-elle se remettre la tête à l’endroit ?

Si la réponse est non, nous n’aurons peut-être pas beaucoup de chances de rester un pays pacifique et fonctionnel. La période de la longue urgence, comme je l’appelle, est une pièce avec l’hiver figuratif de Strauss et Howe dans leur vision du quatrième tournant de l’histoire qui se joue en cycles générationnels analogues aux saisons de l’année. Quel que soit le nom que vous lui donnez, la disposition actuelle des choses a eu un effet sévère sur notre psychologie collective. Elle a rendu une cohorte exceptionnellement nombreuse d’Américains fonctionnellement fous, croyant aux démons, aux gobelins et aux fantômes, souscrivant à des théories qui, dans les époques précédentes, faisaient rire les enfants, tout en contestant des réalités évidentes et en provoquant un grave danger politique.


La folie est répartie sur de nombreux domaines de la vie américaine, avec pour dénominateur commun une classe pensante tombée dans le désordre de sa pensée. Le désordre est mené par les médias d’information et l’enseignement supérieur avec leurs agendas crypto-gnostiques pour transformer la nature humaine afin de guérir le monde (en théorie). Il comprend un ensemble d’illusions et de destructions délibérées de l’esprit allant de l’obsession morbide de l’ingérence russe dans nos affaires, à la croisade contre la liberté d’expression sur les campus, en passant par le culte de la perversité sexuelle – par exemple l’Heure de Lecture Transsexuelle, aux campagnes contre la blancheur et la masculinité, aux incursions de l’« éveil (woke) » dans le milieu professionnel des entreprises, aux machinations cyniques des économistes, des banquiers et des politiciens pour manipuler les apparences financières, à l’effort pour diviser la réalité de la vérité en tant que proposition générale.

Ces maladies de l’esprit et de la culture sont mises en synergie par un ethos politique stimulé qui dit que la fin justifie les moyens, de sorte que la mauvaise foi et la malhonnêteté consciente deviennent les principaux outils de l’effort politique. Par conséquent, une institution vénérable comme le New York Times peut se détourner de sa mission de présenter strictement les informations pour être enrôlée comme service de relations publiques pour les agences gouvernementales malhonnêtes – de l’État profond – qui cherchent à renverser un président sous de faux prétextes. L’effet global est celui d’une marche dans un nouveau totalitarisme, plein de mendicité et de malveillance épiques. Depuis quand, aux États-Unis, les « radicaux » politiques ont-ils le droit de s’associer aux services de sécurité du gouvernement pour persécuter leurs ennemis politiques ?

Cela conduit naturellement à la question suivante : qu’est-ce qui a rendu la classe pensante américaine folle ? Je maintiens que cela vient de l’anxiété massive générée par la longue urgence dans laquelle nous sommes entrés – la peur flottante que nous avons épuisé le temps de notre mode de vie actuel, que les systèmes dont nous dépendons pour notre haut niveau de vie sont entrés dans la zone de défaillance ; plus précisément, les craintes concernant notre approvisionnement en énergie, la diminution des ressources naturelles, la rupture des lignes d’approvisionnement, la dette galopante, l’accroissement de la population, l’effondrement de la classe moyenne, la fermeture des horizons et des perspectives pour les jeunes, le vol de l’autonomie des personnes écrasées par des organisations inhumaine (gouvernement, WalMart, ConAgra), la corrosion des relations entre hommes et femmes – et de la vie familiale en particulier, les fréquents meurtres de masse dans les écoles, les églises et les lieux publics, la destruction des écosystèmes et des espèces, l’incertitude quant aux changements climatiques, et la laideur entropique omniprésente de l’habitat humain de banlieue qui est à l’origine de tant de dysfonctionnements sociaux. Vous voyez ? Il y a beaucoup de choses à craindre, dont une grande partie est assez existentielle. Plus nous échouons à nous confronter et à nous engager dans ces problèmes, plus nous devenons fous.

Une grande partie du mécontentement en matière de « justice sociale » découle de l’inégalité de revenu évidente et grotesque de notre époque, accompagnée de la perte d’un travail significatif et des rôles sociaux qui y sont associés. Mais une tension supplémentaire provient de la honte et de la déception face à l’échec de la longue campagne pour les droits civiques visant à corriger les inégalités raciales dans la vie américaine – des tentatives d’intégration scolaire à l’action positive (quel que soit le nom qu’on lui donne), du « multiculturalisme » aux dernières innovations en matière de « diversité et d’inclusion ». En bref, trop de Noirs américains ne parviennent toujours pas à s’épanouir dans ce pays malgré cinquante ans de programmes gouvernementaux coûteux et d’expériences éducatives à profusion, et il reste peu d’explications pour expliquer cet échec, qui se traduit par des villes en ruine dirigées par des Noirs et des taux élevés de crimes violents entre noirs. Ce dilemme tourmente la classe des penseurs et les pousse toujours plus loin dans leurs fantasmes crypto-gnostiques de changer la nature humaine pour guérir le monde. Le résultat net est que les relations entre les races sont pires et plus tendues qu’elles ne l’étaient en 1950. Et le résultat est si embarrassant que la classe pensante évite à tout prix d’y faire face – malgré les appels de mauvaise foi à une « conversation honnête sur la race » qui est, en réalité, malvenue.

Notre pays est pris dans un réseau de rackets autodestructeurs et le dénominateur commun est la malhonnêteté immersive que nous nous sommes autorisés à pratiquer. En matière d’éthique et de conduite quotidienne, nous ne sommes plus du tout comme le pays qui est sorti de la Deuxième Guerre mondiale. Notre maxime nationale de nos jours est que tout est permis et que rien n’a d’importance. C’est une piètre plate-forme pour naviguer dans la vie sur terre. Après avoir réclamé pendant des décennies « l’espoir et le changement », c’est une chose importante que nous ne parlons plus de changer, et apparemment nous n’avons aucun espoir de changer. L’Amérique doit bien comprendre qu’elle ne peut pas se mentir à elle-même.

Ce texte est une prévision, après tout, et je vais essayer d’être aussi concis que possible sur les détails, que nous allons maintenant aborder. Les prévisions, vous comprenez, sont comme le jazz, une improvisation qui consiste à relier des points à un moment donné dans le temps… ou à lancer des spaghettis sur le mur pour voir si ça colle.

L’élection de 2020

Il y a de fortes chances que le Parti démocrate soit dans un tel état de désarroi d’ici l’été, qu’il se scinde en une faction radicale-Wokester et une faction croupion « modérée ». Cela rendrait l’élection un peu comme celle de 1860 à la veille de la première guerre civile. Les principaux candidats actuels – Biden, Sanders, Warren, Buttigieg – me semblent tous être des chevaux qui ne passeront jamais la ligne. Michael Bloomberg pourrait finir par être le chef des modérés de la partie croupion, propulsé par son compte en banque inépuisable, mais je doute de son attrait pour les minorités raciales et les nouveaux jeunes électeurs, les milléniums, dont dépendent les Démocrates. Je ne suis pas sûr qu’il lui reste beaucoup d’autres leviers.

Je suis convaincu que Joe Biden est toujours dans la course uniquement pour éviter une enquête. Il n’est manifestement pas encore tout à fait sain d’esprit et il n’est même pas encore à la Maison Blanche. Pensez à la façon dont Bob Mueller semblait témoigner au Congrès il y a six mois, et imaginez oncle Joe [Biden] dans la salle de crise de la Maison Blanche. Le bilan des escroqueries de l’époque des mandats de l’oncle Joe dans l’administration est profondément nauséeux, et embarrassant sur les enregistrements vidéo et les relevés bancaires. De même, pour Elizabeth Warren : il y a trop d’enregistrements vidéo d’elle, mentant sur elle-même. Elle ne  pourra jamais surmonter la campagne publicitaire d’un adversaire les passant et repassant quotidiennement. Je suis désolé, mais malgré le souhait crypto-gnostique de beaucoup de membres de la Classe Pensante de faire paraître le marginal pour normal, je doute que les électeurs veuillent voir le maire Pete Buttigieg à la Maison Blanche avec un « premier monsieur » [Il est homosexuel et n’a donc pas de première dame, NdT]. Bernie Sanders a une chance de diriger une faction radicale cette fois-ci – s’il parvient à vaincre les valets du DNC – mais n’a qu’une faible chance de remporter les élections générales. Cette vue d’ensemble laisse la porte bien ouverte pour Hillary Clinton de monter, lors d’une convention accrochée à Milwaukee, sur un cheval blanc en papier mâché et d’essayer de « sauver » le parti. Je crois qu’on se moquerait d’elle à son arrivée, ce qui ferait une scène finale humiliante dans sa carrière maudite.

Une autre possibilité est qu’un personnage actuellement hors jeu vienne d’une manière ou d’une autre diriger le Parti démocrate, mais il est impossible de dire qui pourrait être ce cygne noir. Cela pourrait aussi être un scénario de « salle enfumée » d’une convention de nomination, comme celle qui a choisi Warren Harding cent ans auparavant : les caciques du parti se réuniraient et feraient avaler leur décision aux délégués. Je donne 20 % de chances à ce résultat.

Quoi que vous pensiez de son style, de ses manières et de sa politique, Donald Trump a une qualité exceptionnelle : la résilience. Comme l’a fait remarquer David Collum, M. Trump est anti-fragile – au sens de Nassim Taleb. Plus il est attaqué, plus il semble devenir fort. Son point faible est sa maîtrise de l’économie et des marchés financiers qui sont censés la servir. Son destin, que j’ai décrit dans des blogs il y a trois ans, est d’être le gars qui porte le chapeau quand l’économie commence à craquer – une situation que je décrirai dans sa propre catégorie ci-dessous. Les chances ne sont pas que le statu quo d’un marché boursier en hausse constante se maintienne jusqu’en novembre prochain. Et si la situation se détériore, cela nuira certainement à sa réélection. Ce pourrait être aussi la seule chose qui permettrait au Parti démocrate de rester solidaire – mais cela implique qu’un bouleversement des marchés et des banques devrait avoir lieu au début de l’été, avant les congrès.

Pendant ce temps, les tentatives de mise en accusation ont une saveur lilliputienne. Continuer dans cette voie – en brandissant la menace d’un deuxième ou troisième acte de mise en accusation avec des frais supplémentaires – ne fera que renforcer l’anti-fragilité de M. Trump. En second lieu, il faut se demander si la paire Barr & Durham parviendra à faire porter une part de responsabilité pénale aux personnes qui ont mené le coup d’État du RussiaGate contre M. Trump – un épouvantable abus de pouvoir maintenant célébré par les Démocrates, qui, vous vous en souvenez peut-être, étaient autrefois contre les États policiers. Une série de mise en détention de criminels comme Brennan, Comey, Clapper et d’autres pourraient finalement faire éclater la bulle de crédulité que la tête à claque Mueller et le rapport Horowitz si accablant n’ont pas réussi à créer chez les vrais croyants de Rachel Maddow. Bien sûr, cette affaire a une signification encore plus grande pour corriger le méta-problème de l’Amérique qui se ment chroniquement à elle-même. Le RussiaGate et ses retombées étaient un tel édifice gargantuesque de malhonnêteté malveillante qu’il doit être déconstruit dans les tribunaux, ou la santé mentale de la nation ne se rétablira peut-être pas. C’est la clé pour mettre fin au régime du tout va bien et rien n’a d’importance. En fin de compte, si les marchés ou la valeur du dollar ne s’effondrent pas, M. Trump sera réélu.

Toutefois, je m’attends à ce que ses rivaux aient recours à une tactique de harcèlement légal pour bloquer le processus électoral dans un enchevêtrement paralysant de litiges qui entraverait ou empêcherait un règlement pacifique de l’issue. Ces tactiques pourraient inciter le président à déclarer des mesures extraordinaires pour surmonter cet acte de « résistance » – peut-être une période de loi martiale pendant que les résultats sont ré-établis. Oui, cela pourrait être extrême.

L’économie et ses accessoires

Le « miracle » du pétrole de schiste était un coup financier utilisant la dette pour donner l’illusion que l’approvisionnement énergétique de la nation était sûr et assuré à long terme. Ce fut un coup impressionnant, c’est certain, avec une production qui approche maintenant les 13 millions de barils par jour, mais il est en train de s’effondrer sur son modèle d’affaires de type Ponzi – les producteurs ne peuvent tout simplement pas faire d’argent avec ce système, et ils ont passé dix ans à prouver que c’est un jeu idiot pour les investisseurs. Il en résultera une diminution des investissements dans un modèle d’affaire qui exige un réinvestissement constant. Ce qui signifie que 2020 est l’année où le pétrole de schiste sera démystifié et où sa production va diminuer. Les faillites ne font que commencer.

L’économie n’est en réalité qu’une fonction des intrants énergétiques, et ces intrants doivent être économiquement rationnels, c’est-à-dire qu’ils ne doivent pas coûter plus cher que ce qu’ils rapportent. Tous nos arrangements bancaires et financiers dépendent de cela. Si les intrants énergétiques diminuent, ou si le coût de l’énergie dépasse la valeur de l’énergie nette que vous obtenez, alors les dettes de toutes sortes ne peuvent plus être remboursées et tout le système implose. A partir de là, la question est de savoir si l’effondrement est lent ou rapide. Je pense qu’il peut commencer lentement, puis s’accélérer rapidement jusqu’à devenir critique – et le processus est déjà amorcé.

En raison de cette dynamique énergétique, nous assistons à une contraction généralisée de l’activité économique et de la croissance à l’échelle mondiale, qui se traduira par une baisse future du niveau de vie. Les effets en Amérique sont déjà évidents et décourageants : la classe moyenne en difficulté, les gens qui vivent au jour le jour, ceux qui ne peuvent pas acheter de voiture ou payer pour la réparer. L’espoir était que l’Amérique puisse se réindustrialiser (une version de MAGA) pendant que les économies « émergentes » continuaient à produire des choses comme « moteurs » de l’économie mondiale : la Chine, l’Inde, la Corée, le Brésil, le Mexique et d’autres. Ces endroits ont vu leur niveau de vie augmenter de façon spectaculaire au cours des trente dernières années. Renverser cette tendance sera un traumatisme. Ces économies émergentes sont en train d’atteindre un pic puis un plafond en raison de la même dynamique énergétique de base qui affecte le monde entier : le manque d’énergie abordable, en particulier le pétrole. Le résultat probable sera l’instabilité politique en Chine et ailleurs – déjà manifeste – et une partie de ce désordre pourrait être projeté vers l’extérieur chez les rivaux économiques.

L’Europe a subi de nombreux contrecoups de la contraction de son niveau de vie, comme l’ont montré les perturbations liées à l’affaire des Gilets jaunes en France, la dépression nerveuse autour du Brexit, le pouvoir de rassemblement des mouvements politiques nationalistes dans de nombreux pays et la crise des migrants en cours – essentiellement des migrants économiques provenant de pays du tiers monde en difficulté. Les banques européennes, menées par la plus malade de toutes, la Deutsche Bank, souffrent d’un fardeau écrasant de mauvaises obligations à bases de dérivées qui risquent de les faire sombrer en 2020 avant une ruée vers la survie en Euroland, avec les récents migrants pris au piège au milieu. Je pense que nous assisterons aux premières tentatives d’expulsions à mesure que le chaos financier s’étendra, que la violence éclatera et que le nationalisme se développera.

La « solution » au dilemme de la contraction depuis 2008 a été pour les banques centrales de « créer » des montagnes d’« argent » frais pour donner l’illusion que les dettes peuvent être remboursées – et de nouveaux prêts générés – alors que la réalité le réfute clairement. Toute cette « impression » d’argent n’a fait que déformer les relations bancaires et le comportement des marchés – les symptômes les plus évidents étant l’inflation des actifs (actions, obligations, immobilier), l’impossibilité de connaître le prix des choses, ce qui est la fonction principale des marchés, et les taux d’intérêt proches de zéro qui rendent les opérations bancaires insensées.

Les banquiers continueront à faire « tout ce qu’il faut » pour essayer de maintenir le jeu, mais ils n’ont plus de véritable légitimité pour y parvenir. Les taux d’intérêt peuvent à peine baisser. La quantité d’argent « imprimé » nécessaire pour maintenir l’illusion d’un système rationnel et fonctionnel devient de plus en plus importante. Dans les six semaines qui précèdent et suivent Noël, la Réserve fédérale devrait injecter 500 milliards de dollars dans les banques pour stabiliser le prix des actifs. Combien de temps peuvent-elles continuer à le faire ?

En fin de compte, soit les prix des actifs chuteront – peut-être s’effondreront – soit les mesures de plus en plus désespérées nécessaires pour les soutenir dégraderont la valeur de la monnaie elle-même. Le hic, c’est que cela ne se produira peut-être pas partout à la fois. Par exemple, le système bancaire de la Chine, comme celui de l’Europe, est mûr pour une convulsion, qui verrait l’argent fuir vers une sécurité perçue – tant que ça dure – sur les marchés américains, gonflant temporairement le Dow, le S & P et les obligations du Trésor américain, même si d’autres grandes nations s’effondrent. Mais les banques américaines ont la même maladie et ces oiseaux de désordre finiront aussi par s’y percher.

De plus, la méthode de distribution de l’argent frais des banques centrales – argent venu de nulle part – changera probablement à l’avenir. Le public va sûrement se révolter contre un autre plan de sauvetage des banques. Au lieu de cela, les responsables se tourneront vers le « QE for the people« , aussi connu sous le nom d’ « Hélicoptère monétaire«  (comme dans la distribution d’argent depuis un hélicoptère), ou vers la « Théorie monétaire moderne » (TMM – imprimer de l’argent jusqu’à ce que les carottes soient cuites), avec un « revenu de base garanti ». Les tensions dans le piège de la contraction dans lequel nous nous trouvons sont telles que le déséquilibre des marchés de la dette ne peut se manifester que par un défaut brutal ou une tentative plus douce de gonfler les devises. L’inflation pourrait maintenir les marchés boursiers à flot et permettre le remboursement continu de la dette (« service de la dette« ) en devises de valeur décroissante – un processus qui n’est jamais vraiment gérable dans l’histoire, qui devient toujours incontrôlable et qui mène rapidement au chaos politique. N’oubliez pas qu’il y a deux façons de faire faillite : ne pas avoir d’argent et avoir beaucoup d’argent qui ne vaut rien.

Les éléments de ce psychodrame financier vont se fondre dans la politique électorale américaine de 2020, alors que la gauche se tourne de plus en plus vers des promesses d’argent « gratuit » et de services « gratuits » (médecine, éducation) aux électeurs paniqués qui ne peuvent plus se permettre le standard de vie du rêve américain. Les tremblements qui ont saisi les marchés Repo (Repo = rachat de garanties pour les prêts au jour le jour) ces trois derniers mois suggèrent que certaines grandes banques et compagnies d’assurance américaines sont entrées dans leur propre zone de criticité. Je doute qu’un quelconque stratagème permette d’éviter une grande instabilité financière avant la fin de 2020, mais si les États-Unis deviennent un refuge pour l’argent venant d’ailleurs dans le monde, cela pourrait repousser l’arrivée de la crise jusqu’à l’été.

L’idée qu’un marché boursier galopant signifie une « grande » économie est particulièrement fallacieuse avec toutes les interventions et manipulations de marché en cours de la dernière décennie. Tout ce qu’elle signifie vraiment, c’est que les escroqueries, les fraudes et les rachats ont remplacé la production industrielle d’antan, et ce n’est pas une base très solide pour une économie. Je ne pense pas qu’il y ait de réelles perspectives de revenir à la puissance industrielle d’autrefois. Nous devrons sûrement faire des choses dans les temps à venir, et produire notre pain d’une façon ou d’une autre, mais ce sera un modèle de production très différent, à une échelle beaucoup plus modeste. Quand le niveau de vie baissera, ce modèle finira par resurgir quelque part. Mais nous ne savons pas encore où.

Relations avec d’autres pays

L’hystérie du RussiaGate s’est démenée efficacement au cours des trois dernières années pour entraver la possibilité de rétablir les relations entre nos pays. Cela et l’intervention idiote de 2014 en Ukraine sous M. Obama, qui ont incité la Russie à annexer la Crimée et à combattre dans le Donbass. Tout cela était inutile et s’est produit simplement parce que nous étions déterminés à forcer l’Ukraine dans l’OTAN – ou, du moins, à ne pas la laisser rejoindre l’Union douanière centrée sur la Russie. Ce faisant, nous avons laissé l’Ukraine gravement endommagée. Pouvons-nous, s’il vous plaît, arrêter de créer encore plus de dégâts ? Ils ont toujours été proche de la Russie et le seront toujours. Pouvons-nous l’accepter avec notre esprit américain ?

Je soupçonne que M. Trump souhaite toujours rectifier la situation, en particulier nos relations avec la Russie. Nous avons des intérêts communs en suspens, à commencer par le souhait de décourager les maniaques islamiques de faire exploser des choses et de couper la gorge des gens. Et si nous essayions de coopérer pour gérer ce problème ? La Russie n’est pas notre rival économique. Aussi vaste que soit son territoire, l’économie russe n’est pas beaucoup plus grande que l’économie du Texas [C’est faux en Parité de pouvoir d’achat et donc très trompeur, NdT]. Ils possèdent un arsenal nucléaire très puissant, avec de nouveaux systèmes de frappe hypersoniques qui ont probablement été développés pour tempérer nos récits paranoïaques à leur sujet depuis 2016. La guerre n’est pas une option.

Il y a de fortes chances qu’en 2020 M. Trump trouve une ouverture pour réduire les tensions entre les États-Unis et la Russie, même s’il est mis en accusation à plusieurs reprises et que l’indice boursier S&P diminue de moitié. L’Ukraine elle-même peut être un cas désespéré, son destin est de devenir un désert agricole quasi-médiéval. Quoi qu’il en soit, ce n’est vraiment pas notre affaire, pas plus que l’occupation de l’Afghanistan, ou l’intervention en Irak, ou le Vietnam avant cela. Pour commencer, pouvons-nous simplement convenir qu’aller en guerre avec la Russie n’est pas une bonne idée et cesser de militer pour que cela se produise ? Les libéraux accusaient le Complexe militaro-industriel d’avoir battu le tambour de guerre. Maintenant, ce sont eux qui sont à la manœuvre.

De nouvelles tentations d’intervenir dans des pays étrangers ne feront qu’accélérer la faillite des États-Unis et entraîner une descente plus rapide et plus dramatique vers un niveau de vie beaucoup plus bas. Quoi qu’il en soit, avec tous les autres éléments de la longue urgence qui se déroule sous nos yeux, la tendance en 2020 sera que les nations se préoccupent de leurs propres affaires, et si cela ne fonctionne pas au niveau national, cela pourrait conduire à plus de régions séparatistes tentant de s’auto-gouverner. La Catalogne est toujours en train de gargouiller, l’Italie a toujours un problème nord / sud, l’Écosse a toujours la volonté de se dissocier du Royaume-Uni. La contraction, la décroissance ou la baisse de la prospérité – quelle que soit la façon de le dire – vont de pair avec une plus petite échelle de gestion. Tout ce qui est grand est en train de reculer.

Mais cela vaut la peine d’envisager ceci : je me souviens de l’époque où les États-Unis étaient une nation assez saine d’esprit. Si les choses peuvent s’aggraver en Amérique, avec toutes ces hallucinations politiques, ne pensez-vous pas qu’elles peuvent aussi s’aggraver ailleurs ? La Chine entre dans une crise traumatisante avec la fin de sa poussée de croissance de trente ans. Et si la Chine devenait aussi folle que nous ? Et si les États-Unis passaient du statut de client numéro un à celui de Demon Ghost Dragon de la série Underworld avec sa vision des choses ? Quelqu’un se souvient-il de la révolution culturelle des années 1960 ? C’était le wokestérisme 1 communiste aux amphétamines. Lorsque la situation devient difficile en Chine, le gouvernement sévit. Et lorsque cela ne fonctionne pas, la Chine se retrouve historiquement dans une sorte de guerre civile. L’action à Hong Kong au cours de la dernière année pourrait être un aperçu des attractions à venir pour Pékin ou Shanghai. Pour 2020, je prédis des turbulences en Chine, des banques faisant faillite, des entreprises sombrant et les usines fermant leurs portes – mais pas au point d’un soulèvement contre le régime de Xi Jinping. Cela rendra la Chine très nerveuse. Nous devrons naviguer prudemment autour d’eux. S’il vous plaît, aucun coup de force naval dans le détroit de Taïwan …

J’ai déjà bien couvert l’Europe dans la section Économie. Le principal avertissement pour l’Europe en 2020 est que l’ordre libéral international fondé sur des règles internationales de l’Occident a été rendu possible dans un monde d’après-guerre par des décennies d’apports énergétiques et de prospérité croissants. À mesure que cela s’inverse, les hypothèses sous-jacentes à cet ordre cesseront de le maintenir. La formation d’un nouvel ensemble de principes de fonctionnement entraînera probablement une période de désordre, peut-être de longue durée.

Israël et l’Iran semblent être à la recherche d’un crêpage de chignon, ce qui ne fonctionnera probablement pas si bien pour l’Iran. Quelque chose va se passer en 2020 entre eux et les États-Unis parviendront à rester en dehors. Un conflit rapide et vif pourrait préparer le terrain pour que le peuple iranien se débarrasse enfin du joug de ses mollahs. Cela peut s’accompagner d’un mouvement anti-jihad généralisé – un mouvement de paix islamique – à travers le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord – une reconnaissance que le Jihad ne travaille qu’à déstabiliser un pays après l’autre et à aggraver leur vie. Israël reprendra les pourparlers avec ses adversaires à Gaza et en Cisjordanie. Les pourparlers seront ardus mais prometteurs même si peu de chose seront résolues en 2020.

L’Inde et le Pakistan ont refroidi leur invectives pendant la période de coupure économique des dix dernières années, évitant une guerre majeure, y compris un échange de tirs nucléaires. Cela pourrait changer tragiquement en 2020 à mesure que la prospérité mondiale s’inversera et que toutes les autres pressions de la longue urgence s’accumuleront sur ces deux pays en difficulté et surpeuplés. Les dégâts seraient énormes, peut-être assez terrifiants pour persuader les gens, dans d’autres pays, de simplement passer leurs problèmes économiques par profits et pertes, et de faire de leur mieux pour réduire l’échelle rationnellement.

La dérive du Japon vers le sort final du néo-médiévisme s’accélère en 2020 alors que l’infection financière se propage depuis les banques chinoises en faillite. L’empereur Naruhito a publié un mémorandum royal reconnaissant que la dépendance du Japon à l’égard du pétrole importé doit cesser et ils embrasseront la décroissance dans l’espoir de revenir à un niveau de la civilisation Edo préindustrielle. Ce sera un exemple encore plus positif pour inciter d’autres pays à commencer d’étudier des plans similaires. Bien sûr, cela provoquera une opposition politique amère. Les meilleures idées font toujours des vagues.

L’Amérique latine vient de vivre plus d’une décennie de paix relative, à l’exception du Venezuela, qui, ces derniers temps, tourbillonne dans le vortex de l’égout sans tambours ni trompettes. L’Argentine est sous-performante dans les grandes largeurs, mais ne semble pas pouvoir atteindre un seuil critique d’effondrement. Quel est son secret ? Dernièrement, une révolution – probablement soutenue par la CIA – a renversé le président bolivien Evo Morales, pour permettre aux États-Unis d’accéder à ses ressources en lithium. Une action plus dramatique éclatera au Mexique en 2020 où la guerre civile gronde. Les États-Unis envoient des troupes de l’armée régulière alors que les réfugiés tentent de fuir vers le nord en flux épiques. Nous créons une «zone de sécurité» tracée à cinquante milles sous la frontière pour contenir le flot humain. M. Trump sera diffamé pour avoir installé des camps de réfugiés humanitaires là-bas. Mais tout au long de l’année, il refusera une intervention militaire pure et simple entre les factions belligérantes.

Guerre culturelle, wokestérisme et bataille des cœurs et des esprits

On pourrait supposer que les Wokesters crypto-gnostiques avaient porté leur folie assez loin en 2019 avec les Tranny Reading Hours, les licenciements de professeurs distingués qui insistent sur le fait que la réalité biologique signifie deux sexes, et bien plus encore. Ce fut également l’année du «Projet 1619» du New York Times, une tentative pseudo-universitaire de réécrire l’histoire américaine entièrement inspirée par le racisme. Et puis il y a Greta qui grogne «Comment oses-tu ?» dans le monde avec cette grimace baveuse de supériorité morale pubescente. Qui ayant encore un peu de bon sens dans ce pays n’est pas malade de ce « putain » de non-sens ?

jhklivre.jpgEn 2020, le wokestérisme a perdu tout son crédit et les Wokesters sont bannis dans une cave sans fenêtre dans le sous-sol de l’âme de l’Amérique où ils peuvent crier contre les murs, pointer du doigt, grimacer en bavant et émettre des anathèmes que personne n’écoutera. Et quand ils seront à court d’essence, ils pourront se détendre et lire le seul livre dans la salle : Mercy, par Andrea Dworkin.

Et puis, un beau matin de printemps, après que tout le monde y a renoncé, Donald Trump, le troll des trolls des médias sociaux, le Golem d’or de la grandeur lui-même, se lèvera en pyjama et tweetera que, enfin, après très longtemps, il s’est finalement «éveillé», et a changé son nom en Donatella, et a déclaré que son pronom personnel était «vous tous».

Très bien, c’est peut-être beaucoup rêver, mais personnellement, je crois que la loi Wokester fuit de partout. Même certains vrais croyants semblent épuisés par leurs efforts. Quoi qu’il en soit, ces incidents de folie publique s’éteignent toujours. Une caractéristique curieuse sera un manque total de remords quand tout sera fini. Au lieu de cela, nous aurons une amnésie, puis nous passerons à la prochaine phase de l’histoire.

Voilà mes prévisions pour 2020. Nous savons tous que c’est un exercice futile, mais c’est l’un de ces rituels inévitables de l’existence humaine. Bonne chance à tous ! Vous pourriez être intéressé par mon prochain livre, à paraître en mars, qui est une mise à jour approfondie de notre situation actuelle et une série de portraits de personnes intéressantes menant des styles de vie alternatifs en ces temps incertains.

James Howard Kunstler

jhklivre2.jpgPour lui, les choses sont claires, le monde actuel se termine et un nouveau arrive. Il ne dépend que de nous de le construire ou de le subir mais il faut d’abord faire notre deuil de ces pensées magiques qui font monter les statistiques jusqu’au ciel.

Traduit par Hervé et jj, relu par Kira pour le Saker Francophone

  1. 1) wokester : un idiot de 20 ans facilement offensé qui croit que le mot « éveillé » légitime sa vision égocentrique du monde. Ces individus manquent souvent de compétences dans le discours civil, ou d’une formation instruite dans n’importe quelle matière dans laquelle ils se glorifient. Urban Dictionary

Les grandes tendances géopolitiques de 2020, région par région

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Les grandes tendances géopolitiques de 2020, région par région


Par Andrew Korybko 

Source oneworld.press

Ex: https://www.lesakerfrancophone.fr

La nouvelle année constitue une opportunité idéale d’attirer l’attention sur les trois tendances géopolitiques les plus importantes pour chaque région, qui pourraient fortement influencer la course des événements au cours des 12 mois à venir.

Amérique du Nord

Trump tenté (piégé?) par Les Démocrates vers une nouvelle guerre

Les périodes d’élections présidentielles constituent systématiquement un moment très sensible en matière de politique étrangère étasunienne : le président sortant (s’il y en a bien un cette fois-ci) essaye en général d’éviter de se faire prendre dans des missions controversées à l’étranger, cependant que l’opposition fait tout son possible pour le pousser à commettre une intervention en vue de faire baisser ses chances de ré-élection.

La possible désignation par les États-Unis des cartels de drogue comme terroristes

Sur les exhortations de son homologue mexicain, Trump a remis dans sa poche sa décision controversée de désigner les cartels de drogue comme terroristes, mais il pourrait la ressortir cette année pour améliorer ses chances de ré-élection, en dépit des conséquences qu’une telle décision pourraient engendrer dans les relations bilatérales avec le Mexique.

L’impact économique de l’ACEUM

On s’attend à ce que la mise en œuvre de l’ACEUM1 (« NAFTA 2.0 ») porte des impacts très positifs sur les économies des trois pays impliqués, chose qui, conjuguée avec une stabilisation relative de la situation au Mexique, pourrait propulser Trump vers un deuxième mandat, en particulier sur le dossier de l’immigration illégale motivée par des raisons économiques vers les États-Unis.

Amérique latine

Possible diffusion du « printemps sud-américain »

L’éclatement à différents niveaux d’une révolte authentiquement populaire dans plusieurs pays d’Amérique du Sud au cours des derniers mois de l’année 2019 peut se diffuser sur le reste du continent, la question qui occupe l’esprit de la plupart des observateurs étant de savoir si le Brésil de Bolsonaro sera épargné par ce scénario.

La poursuite de l’« Opération Condor 2.0 »

Aucun doute que la guerre hybride fomentée par les États-Unis d’Amérique à l’encontre des gouvernements multipolaires-socialistes de cet hémisphère va se poursuivre en 2020, avec le Venezuela, Cuba et le Nicaragua en cibles de premier plan, suite à la réussite de l’opération de changement de régime sur Morales, le président de Bolivie allié de ces pays, en 2019.

La « Citadelle Amérique »

À l’arrière de ses réussites géopolitiques de la décennie écoulée, les États-Unis vont tâcher d’institutionnaliser leur hégémonie fortement rétablie sur l’Amérique latine, au travers d’accord commerciaux bilatéraux bloc à bloc entre l’ACEUM (déjà rattachée à l’ALÉAC2, l’Alliance Pacifique, et le Mercosur, afin de créer une méga-région pro-États-Unis.

Europe

La montée des « Trois Mers »

L’« Initiative des trois mers« , soutenue par les États-Unis et dirigée par la Pologne, va poursuivre sa montée en puissance en matières géopolitique, militaire et économique ; il s’agit d’une cale étasunienne visant à empêcher tout rapprochement non approuvé par Washington entre l’Europe occidentale et la Russie.

La bataille du pouvoir post-Brexit au sein de l’Union européenne

Les traits que prendra de facto le pouvoir politique dans l’UE post-Brexit ne sont pas encore bien distincts, mais il pourrait s’agir ou bien d’une poursuite de l’hégémonie allemande, de l’émergence de la France comme rivale de celle-ci, ou d’une division entre une Europe franco-allemande à l’Ouest et une Europe centrale menée par la Pologne (EuroLibéraux contre EuroRéalistes).

La triangulation des relations commerciales

L’UE constitue un des angles du triangle économique mondial, complété par les États-Unis et la Chine, mais il faut s’attendre à ce que les États-Unis fassent pression sur l’UE pour qu’elle prenne ses distances avec la Chine, suite à la conclusion de la « première phase » de leur accord commercial plus étendu, ou qu’elle assume sa propre possible guerre commerciale contre Trump.

Afrique

La crise des États faillis en Afrique de l’Ouest

Le triangle des frontières Mali-Burkina Faso-Niger est devenu le nouveau « Syrak« , au sens où cet espace constitue une zone stratégique, sans loi mais très étendue, comprenant des millions de personnes, déstabilisée par les menaces terroristes. Les conséquences pourraient déboucher sur une réaction en chaîne d’États faillis et de crises migratoires.

Les élections à venir en Éthiopie

L’Éthiopie va connaître des élections en 2020, qui sont largement décrites comme les plus libres et les plus justes de l’histoire récente de ce pays ; mais le risque est que les lignes de fracture ethnoreligieuses exacerbées par le premier ministre Abiy, lauréat du prix Nobel de la paix, s’approfondissent à l’issue de l’élection et plongent le pays dans une totale « Balkanisation ».

Le conflit de Cabo Delgado au Mozambique

Qu’on en attribue les causes à des terroristes étrangers, à des insurgés locaux, ou à une combinaison des deux, le conflit de Cabo Delgado au Mozambique semble voué à s’empirer en 2020 ; ce qui pourrait porter à conséquences en matière de sécurité sur le plan régional : la communauté Est-africaine est une voisine proche, mais aussi sur le plan mondial, le pays hébergeant d’immenses projets d’extraction de Gaz naturel liquéfié.

Moyen Orient-Afrique du Nord

Ça passe ou ça casse pour le « néo-ottomanisme »

La grande ambition stratégique de la Turquie, visant à rétablir sa sphère d’influence historique, sera mise à l’épreuve en Méditerranée orientale, avec d’une part la construction de l’oléoduc GRISCY par ses rivaux régionaux, et d’autre part, au-delà les étendues maritimes d’Afrique du Nord, sur le dossier incertain de la survie des autorités pro-Ankara à Tripoli.

Le « Nouveau Moyen-Orient »

La baisse d’intensité des guerres en Syrie et au Yémen pourrait déboucher sur un accord tacite de l’ensemble des parties prenantes, tant intra qu’extra-régionales (on pense à la Russie, à la Chine et aux États-Unis dans cette seconde catégorie) quant à un nouveau statu quo régional, qui pourrait même connaître l’influence de l’« Accord du Siècle » de Trump.

Une réconciliation du CCG

Des étapes petites mais réelles ont été actées au cours des dernières semaines dans la perspective d’une réconciliation du Conseil de Coopération du Golfe, entre le Qatar et ses partenaires dans l’organisation (en premier chef, l’Arabie Saoudite et les Émirats arabes unis), mais ce processus pourrait n’en être qu’à ses débuts ; et le débouché final sera corrélé aux liens futurs de Doha avec Ankara.

Ex-URSS

Vacillement du « numéro d’équilibriste » de la Russie

La Russie va devoir recalibrer son exercice d' »équilibrage » si elle veut espérer poursuivre cette stratégie de manière crédible, suite à son pivot vers l’Inde, et suite à l’hypothèse très sérieuse d’une vente de missile BrahMos à des prétendants sur la Mer de Chine, comme les Philippines ; la situation de confiance avec la Chine, durement gagnée au cours des deux décennies passée, en dépend.

L’Asie centrale poursuit son intégration régionale tous azimuts

Les anciennes républiques soviétiques d’Asie centrale progressent dans leur intégration régionale tous azimuts dans la lignée des réformes pragmatiques en matière de politique étrangère pratiquées par Mirziyoyev, le nouveau président de l’Ouzbékistan, qui ont établi une atmosphère de confiance facilitant la participation volontaire de ces pays à l’OTSC, à l’OCS et aux Nouvelles routes de la soie.

Fin du « numéro d’équilibriste » du Bélarus

Le Bélarus va se voir pressé de choisir entre, d’une part, rester membre des processus d’intégration menés par la Russie, ou d’autre part s’associer aux processus soutenus par les États-Unis et l’UE (« initiative des trois mers » y compris) : ce n’est pas là la résultante d’une « ingérence russe » mais simplement l’échec du « numéro d’équilibriste » de Lukashenko en 2019.

Asie du Sud

Un accord de paix afghan déclencherait un changement de paradigme

On assisterait à un vrai changement de paradigme en matière géostratégique régionale, si les États-Unis réussissaient à conclure un accord de paix avec les Talibans, qui conjuguerait la montée en puissance des parties prenantes multipolaires dans cet État enclavé perclus par la guerre, avec un basculement de l’approche régionale étasunienne, d’un axe militaire vers un axe économique.

Des progrès tangibles sur CPEC+

On assistera très probablement à une expansion du corridor économique Chine-Pakistan en direction du Nord, de l’Ouest et du Sud (respectivement, N-CPEC+, W-CPEC+, et S-CPEC+) courant 2020, l’État pivot mondial du Pakistan commençant lentement mais sûrement à intégrer cette vision dans son approche stratégique générale.

Implosion interne en Inde

Les tentatives du parti BJP au pouvoir d’imposer une « Hindu Rashtra«  à l’État constitutionnel séculaire ont provoqué un niveau de tumulte ethnique, religieux, séparatiste et politique sans précédent depuis la tristement célèbre « urgence » de l’Inde au cours des années 1975-1977 ; la situation va sans doute s’empirer, l’État doublant la mise en matière de violences, et l’économie poursuivant son déclin.

Asie orientale

Implications indo-japonaises dans le grand Est russe

Le « Couloir maritime Vladivostok-Chennai«  (VCMC) va faire monter l’influence de l’Inde sur le grand Est de la Russie, et une percée dans la conclusion d’un accord de paix russo-japonais pourrait en faire autant pour Tokyo, les deux nations asiatiques alliées pouvant aller jusqu’à inviter la Russie à rejoindre leur « Couloir de croissance Asie-Afrique » (AAGC).

« Deuxième Phase » de l’accord commercial?

On ne sait pas encore quand, ni même si, les États-Unis et la Chine conviendront d’une « seconde phase » de leur accord commercial élargi, cette variable étant d’une influence considérable quant à leurs relations en 2020, ainsi que sur l’état de leurs économies.

Le point d’interrogation coréen

Nul ne sait vraiment ce que décidera la Corée du Nord, mais tout recul sur son engagement symbolique à la dénucléarisation pourrait porter à des conséquences très déstabilisantes pour la région, du fait de la réaction que cela pourrait engendrer de la part des États-Unis, en particulier si Trump accuse la Chine d’exercer de supposées pressions sur son partenaire pour qu’il « se comporte mal ».

ASEAN & Océanie

Des missiles supersoniques pourraient perturber l’« l’équilibre des pouvoirs » en Mer de Chine du Sud

Les intérêts importants qu’ont la Russie et l’Inde à vendre leurs missiles de croisières supersoniques BrahMos, produits conjointement, à des États entretenant des différends territoriaux avec la Chine, pourraient complètement remettre en cause l’« équilibre des pouvoirs » qui a jusqu’ici empêché l’éclatement d’une guerre, tout comme pourrait le faire toute tentative étasunienne de les dépasser en livrant le même type d’armement dans la région.

La déstabilisation par l’« armée Arakan » de l’État Rakhine du Myanmar

Au Myanmar [que les médias dominants s’obstinent en occident à nommer « Birmanie », préférant l’appellation néocolonialiste à l’auto-détermination des nations, NdT], l’État Rakhine est connu mondialement comme la région où les efforts contre-terroristes menés par l’armée en 2017 avaient amené à l’exode de plus d’un demi-million de « Rohingyas », mais à présent c’est devenu le dernier front en date dans la longue guerre civile, l’« armée Arakan«  y ayant mené des assauts tout au long de l’année 2019.

La compétition sino-australienne dans le Pacifique Sud

Il est très peu probable que la compétition sino-australienne en cours, visant à gagner l’influence sur le Pacifique Sud (encouragée qu’est l’Australie dans ce jeu par les États-Unis d’Amérique), puisse voir baisser son intensité en 2020 : la constellation de petits États insulaires à faible population continuera de faire l’objet d’une attention mondiale accrue. [A noter que la Chine est le 1er client de l’Australie ce que met cett dernière sur le grill sans jeux de mots, NdSF]

Monde

Les organisations d’intégration régionales sont d’une importance plus grande que jamais

La plus grande partie du monde fait de nos jours partie de blocs d’intégrations politiques et/ou économiques régionaux — ACEUM, Alliance Pacifique, Mercosur, UE, Union Eurasienne, AfCFTA, CCG, SAARC, OCS, ASEAN, OBOR, RCEP —, ce qui amène à l’émergence de relations entre blocs (en opposition aux relations purement inter-nationales) comme vecteur de changement mondial.

Le retour de Kissinger

La stratégie étasunienne kissingerienne de « diviser pour mieux régner » devient relativement plus facile à mener qu’au cours des quelques années passées, du fait du développement de plusieurs lignes de failles entre l’Europe occidentale et centrale, entre la Turquie et ses voisins, entre la Chine et l’Inde, et le vacillement de l’« exercice d’équilibre » russe, parmi d’autres.

Le « grand partenariat eurasiatique » (GEP) constitue le meilleur espoir du supercontinent

Le meilleur espoir de réduire les conséquences déstabilisantes des résurgences de la stratégie ravivée kissingerienne étasunienne réside dans l’intégration par le GEP russe du supercontinent, sur une base bloc-à-bloc. Sa réussite dépend cependant fortement de la capacité de Moscou à recalibrer son « exercice d’équilibre », et de la décision de l’Inde de s’allier ou de contrer ce projet.

Andrew Korybko est un analyste politique américain, établi à Moscou, spécialisé dans les relations entre la stratégie étasunienne en Afrique et en Eurasie, les nouvelles Routes de la soie chinoises, et la Guerre hybride.

Traduit par José Martí pour le Saker Francophone

  1. 1) 2) Accord Canada–États-Unis–Mexique, en anglais USMCA
  2. Accord de libre-échange entre l’Amérique centrale, les États-Unis d’Amérique et la République dominicaine (communément appelé Accord de libre-échange d’Amérique centrale, ALÉAC, en anglais CAFTA-DR

Libye. Les Etats-Unis sont-ils derrière Khalifa Haftar ?

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Libye. Les Etats-Unis sont-ils derrière Khalifa Haftar ?

par Jean-Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

Sans gouvernement national depuis la chute du régime de Mouammar Kadhafi en 2011, la Libye est en proie à des luttes d'influence désastreuses pour la population

Deux autorités se disputent aujourd'hui le pouvoir: le Gouvernement d'Union Nationale GNA à Tripoli, dirigé par Fayez al-Sarraj, reconnu par l'ONU et un gouvernement à Benghazi, dirigé par le maréchal Haftar. considéré comme l'homme fort de l'Est libyen.

Or le 2 janvier 2020 les députés turcs ont approuvé une motion permettant au président Recep Tayyip Erdogan d'envoyer des troupes en Libye pour soutenir le  GNA qui est menacé par une offensive du maréchal Haftar. Il faut rappeler que l'intérêt de la Turquie pour la Libye remonte à l'Empire Ottoman. La régence de Tripoli (carte ci-dessus) était une province plus ou moins autonome de celui-ci, fondée au XVIᵉ siècle et correspondant au territoire de l'actuelle Libye. Sa capitale était Tripoli.

Mais l'intérêt turc a des raisons plus immédiates. A la suite d'un accord maritime avec le gouvernement de Fayez al-Sarraj, la Turquie peut faire valoir ses droits sur de vastes zones maritimes en Méditerranée orientale. Cette région de la Méditerranée contient de très importants gisements de gaz naturel estimés à plus de 100 mille milliards de mètres cubes. Ankara cherche donc à s'octroyer une large part de ces richesses.

L'accord concerne un projet de gazoduc connu sous le nom d'"Eastmed" qui vient d'être signé entre la Grèce, Chypre et Israël afin de sécuriser l'approvisionnement énergétique de l'Europe est venu entraver les tentatives de la Turquie d'étendre son contrôle sur la Méditerranée orientale. L'alliance de la Turquie avec le GNA apparaît comme est une réponse à cet accord. Une présence militaire turque pourrait le rendre inapplicable.

La Turquie est actuellement la partenaire de la Russie dans le cadre d'un accord permettant aux deux pays d'envoyer des patrouilles militaires au nord-est de la Syrie et d'assurer le contrôle en commun d'une grande partie de la frontière turco-syrienne. Cet accord vise à mettre fin à l'offensive turque contre les forces kurdes des Unités de Protection du Peuple, YPG, considérées comme des terroristes par Ankara.

Officiellement présenté comme destiné à assurer une meilleure coordination de la Turquie et de la Russie dans la lutte contre les éléments djihadistes de l'Etat Islamique, l'accord est perçu par les Etats-Unis comme une tentative de la Russie pour étendre son influence sur l'ensemble de la zone. La Russie y apparaît en effet comme un médiateur disposant d'une autorité perdue depuis longtemps par l'Amérique.

Dans ce contexte, le maréchal Haftar, qui s'opposera inévitablement aux contingents militaires turcs envoyés soutenir son concurrent Fayez al-Sarraj, paraît un moyen pour Washington de rétablir son influence non seulement en Libye mais plus généralement au Moyen-Orient, face à l'importance prise désormais par la Russie. Beaucoup d'observateurs se demande dans ces conditions si Haftar, l' « Homme fort » de l'Est libyen, ne se sent pas aujourd'hui encore plus fort du fait d'un appui des Etats-Unis.

mardi, 07 janvier 2020

Main basse sur l’eau : la bataille de l’or bleu

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Main basse sur l’eau : la bataille de l’or bleu

Source : Arte, Youtube 

Ex: https://www.les-crises.fr

Le prometteur marché de l’eau s’annonce comme le prochain casino mondial. Les géants de la finance se battent déjà pour s’emparer de ce nouvel “or bleu”. Enquête glaçante sur la prochaine bulle spéculative.

Réchauffement climatique, pollution, pression démographique, extension des surfaces agricoles : partout dans le monde, la demande en eau explose et l’offre se raréfie. En 2050, une personne sur quatre vivra dans un pays affecté par des pénuries. Après l’or et le pétrole, l’”or bleu”, ressource la plus convoitée de la planète, attise les appétits des géants de la finance, qui parient sur sa valeur en hausse, source de profits mirobolants. Aujourd’hui, des banques et fonds de placements – Goldman Sachs, HSBC, UBS, Allianz, la Deutsche Bank ou la BNP – s’emploient à créer des marchés porteurs dans ce secteur et à spéculer, avec, étrangement, l’appui d’ONG écologistes. Lesquelles achètent de l’eau “pour la restituer à la nature”, voyant dans ce nouvel ordre libéral un moyen de protéger l’environnement. En Australie, continent le plus chaud de la planète, cette marchandisation de l’eau a pourtant déjà acculé des fermiers à la faillite, au profit de l’agriculture industrielle, et la Californie imite ce modèle. Face à cette redoutable offensive, amorcée en Grande-Bretagne dès Thatcher, la résistance citoyenne s’organise pour défendre le droit à l’eau pour tous et sanctuariser cette ressource vitale limitée, dont dépendront 10 milliards d’habitants sur Terre à l’horizon 2050.

Le prix de la vie

De l’Australie à l’Europe en passant par les États-Unis, cette investigation décrypte pour la première fois les menaces de la glaçante révolution en cours pour les populations et la planète. Nourri de témoignages de terrain, le film montre aussi le combat, à la fois politique, économique et environnemental, que se livrent les apôtres de la financiarisation de l’eau douce et ceux, simples citoyens ou villes européennes, qui résistent à cette dérive, considérant son accès comme un droit universel, d’ailleurs reconnu par l’ONU en 2010. Alors que la bataille de la gratuité est déjà perdue, le cynisme des joueurs de ce nouveau casino mondial, au sourire carnassier, fait frémir, l’un d’eux lâchant : “Ce n’est pas parce que l’eau est la vie qu’elle ne doit pas avoir un prix.”

Main basse sur l’eau

Documentaire de Jérôme Fritel (France, 2018, 1h30mn)

Source : Arte, Youtube, 18-12-2019

Vincent Desportes : «L’OTAN est devenue un protectorat américain dirigé par un allié brutal»

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Vincent Desportes : «L’OTAN est devenue un protectorat américain dirigé par un allié brutal»

 
Le général de l'armée de terre française, Vincent Desportes, a développé, pour RT France, son avis et analyse de l'OTAN qui célèbre ses 70 ans cette année, avant de décrypter les ambitions de l'Europe de la défense. #OTAN #EtatsUnis #Europe
 
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De Byzance à Poutine : la grande stratégie russe et son incompréhension en Occident...

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De Byzance à Poutine : la grande stratégie russe et son incompréhension en Occident...

par Stéphane Audrand

Ex: http://metapoinfos.hautetfort.com

Nous reproduisons ci-dessous un texte de Stéphane Audrand, cueilli sur Theatrum Belli et consacré à la grande stratégie russe. Stéphane Audrand est consultant indépendant spécialiste de la maîtrise des risques en secteurs sensibles.

De Byzance à Poutine – Éléments de réflexions sur la grande stratégie russe et son incompréhension en Occident

La Russie effraye, fascine parfois, suscite peurs et antagonismes, mais le plus souvent dans l’incompréhension la plus totale et les clichés les plus simplistes. Son utilisation des instruments de puissance nous échappe, nous déconcerte, voire nous révulse, tant la pratique russe s’éloigne des codes occidentaux et notamment de la dichotomie « soft » et « hard » power.

Ainsi, l’incident en Mer d’Azov en 2018 ou les déclarations de Vladimir Poutine concernant la promesse du « paradis pour les Russes » en cas de guerre nucléaire ont attiré les réflexions les plus baroques [1]. C’est en vain que les commentateurs et les analystes tentent d’appliquer les grilles d’analyse occidentales à la situation russe. Leur inadéquation ne semble avoir pour conséquence que de disqualifier la Russie : ni « occidentale » ni « asiatique », l’espace russe semble failli, voué à l’échec et par conséquent stigmatisé. Par un ethnocentrisme qui serait comique s’il n’était porteur de risques, les Européens comme leurs alliés d’outre-Atlantique multiplient les représentations caricaturales de la politique de Vladimir Poutine, sans en percevoir la logique ou en la dénonçant comme intrinsèquement « mauvaise ». Ainsi, on souligne souvent l’incapacité de Moscou à « terminer » une guerre, citant les situations bloquées de longue date, du Haut-Karabagh à l’Ossétie, du Donbass à la Transnistrie. De même, on s’offusque des menées propagandistes, de l’instrumentalisation du droit international, du double discours, de la prétention russe (censément hypocrite) à négocier tout en bombardant… Comprendre l’autre, principe de base des relations internationales, semble bien difficile s’agissant de la Russie.

Les déterminants de la stratégie russe nous échappent, en grande partie parce qu’ils ne s’inscrivent pas dans notre héritage occidental de la guerre, dont le modèle mental est marqué par l’apport essentiel de deux auteurs : Saint Thomas d’Aquin et Carl von Clausewitz. Du premier nous avons hérité la propagation occidentale de la théorie de la guerre « juste », seule justification possible au déchaînement de la violence que la tradition romaine et chrétienne du droit ne peut considérer que comme une entorse au gouvernement des lois et à l’injonction de charité. D’où la limitation de la guerre à la puissance publique, au prix d’une cause juste et d’une intention bornée par l’intérêt général [2].

Au second nous devons la mystique de la guerre « totale », moment de la politique qui consiste en un acte de violence pour contraindre l’adversaire à exécuter notre volonté [3]. Loin d’être antinomique, les deux approches se complètent et toute la théorie dominante moderne des conflits en Occident tourne autour de ces deux môles : il n’est de guerre possible que si elle est légitimée par le droit et la morale et il n’est de guerre envisageable que par la recherche de la victoire, moment politique par lequel le vaincu se soumet au vainqueur, à travers un ensemble de conditions – de capitulations – qui marquent la fin du « temps de guerre » et le retour au « temps de paix », au gouvernement par les lois. L’organisation même de la sécurité collective après 1945 autour de l’idée de l’Organisation des nations unies repose sur ces deux piliers de la guerre « juste » et de la guerre « politique » et marqua le triomphe mondial des conceptions occidentales : la Charte des Nations unies disqualifie la guerre comme « instrument » dans les mains du pouvoir, en dehors du rétablissement collectif de la sécurité ou de la légitime défense individuelle des Etats. Pour aller plus loin, on peut même penser que l’idée que le soft power puisse être décorrélé du hard power est une conséquence moderne de ce raisonnement : la puissance armée ne peut pas être « incluse » dans les autres pouvoirs, elle doit cohabiter « à côté » [4].

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À l’opposé, la pratique russe moderne s’inscrit dans une toute autre tradition épistémologique qui emprunte largement à un héritage byzantin dans lequel le strategikon de l’empereur Maurice remplacerait à la fois Thomas d’Aquin et Clausewitz et ferait figure de « code opérationnel », comme l’a remarqué Edward Luttwak [5]. L’héritage byzantin irrigue la tradition russe de l’usage de la force et de la puissance, et il a influencé à la fois la mystique du pouvoir (impérial ou étatique) et l’exercice de l’usage de la force, qu’elle soit armée ou non. D’une part, il n’y a pas forcément de recherche d’une « victoire » nette, car la perception de celle-ci est différente et car le continuum du pouvoir en action remplace la dichotomie « Guerre et Paix ». C’est l’ascendant qui compte. D’autre part, il n’y a pas la même obsession pour la justice de l’action car le gouvernement des lois n’est pas perçu comme prépondérant. C’est en Occident qu’a émergé l’idée que le princeps, le gouvernant, pourrait lui-même être soumis en temps ordinaire au droit, même lorsqu’il se trouve être le législateur unique [6].

L’Empire byzantin souffre d’une réputation peu flatteuse en Occident, entretenue par des siècles d’ignorance et d’approximations historiques dont la première est bien son qualificatif même. Jamais les habitants de cet empire ne se qualifièrent eux-mêmes de « Byzantins ». En leur temps, ils étaient appelés et se nommaient Romaioi, Romains, parce qu’ils furent d’abord et avant tout, non pas « les continuateurs » de l’Empire romain, mais bien l’empire romain lui-même. Il faut rappeler cette réalité : dans un environnement hostile, entouré d’ennemis, comptant bien peu d’alliés, faisant face aux Perses, aux Slaves, aux Arabes, Turcs et Latins, l’Empire romain d’Orient persista jusqu’en 1453 en tant qu’entité politique. Un empire de plus de mille ans ne peut être réduit à la vision qu’en colporte l’historiographie occidentale, mettant en avant « décadence », « querelles byzantines » et « duplicité » dans le sillage d’Edward Gibbon. Au contraire, il faut reconnaître sa capacité d’adaptation et de reconfiguration, pour tenir compte des affaiblissements qu’il dut affronter et admettre qu’il fut dirigé pendant longtemps par une élite éclairée et soucieuse du bien commun [7].

Le lien historique de Byzance avec la Russie s’est construit par la christianisation des Slaves, du IXe au XIe siècle. Alors que les principautés slaves demeurèrent morcelées jusqu’au XIIIe siècle, la foi orthodoxe fut un ciment certain d’unité sociale et culturelle, à l’image du catholicisme romain en Occident. Pour autant, ce n’est pas avant le XVIe siècle que le « messianisme russe » se développa, quelque soixante ans après la chute de Constantinople. L’idée centrale, mise à profit par l’État moscovite naissant, fait de Moscou la « troisième Rome », celle qui n’échouera pas, après que la première Rome soit tombée sous les coups barbares du fait de son hérésie et la deuxième, Constantinople, sous les coups des Turcs et par la trahison des Latins [8]. Ce messianisme moscovite servit tour à tour l’affirmation du pouvoir tsariste, l’idéologie panslaviste et même, plus tard, le marxisme soviétique. Il se cristallisait toujours autour de l’élection de Moscou comme axis mundi et de la responsabilité russe pour porter la seule civilisation de la « vraie foi » (qu’elle soit orthodoxe ou – momentanément – marxiste-léniniste) [9].

L’examen du « code opérationnel byzantin » et sa mise en regard avec les actions du Kremlin sur la scène mondiale montrent d’importantes corrélations qui s’expliquent par cette tradition de la littérature byzantine, comme si, après une parenthèse rationaliste et « occidentaliste » de quelques siècles ouverte par Pierre le Grand et refermée par Michael Gorbatchev, les Russes renouaient avec leur héritage épistémologique antique, héritage d’ailleurs revendiqué ouvertement par le Kremlin [10]. On voit s’inscrire dans cette tradition orientale une toute autre vision de l’exercice de la puissance, qui préside à la perpétuation d’un empire encerclé par des adversaires multiples et qui voit dans sa perpétuation même son ambition principale. Il faut durer en s’adaptant, malgré les faiblesses de l’Empire.

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Premières similitudes avec l’espace russe actuel, l’encerclement et la perception de menaces multiples, mais aussi l’idée que « vaincre est impossible ». L’Empire byzantin – conservons cette dénomination par commodité – ne pouvait pas compter sur un quelconque verrou territorial pour protéger une géographie exposée de toutes parts. Les Vandales, les Goths, Perses, Slaves, Arabes, Turcs, Latins… Les ennemis se succédèrent sans fin aux frontières de l’Empire et la disparition de l’un ne faisait que la place de l’autre, à l’image des barbares gothiques vaincus en Italie pendant la reconquête justinienne, et qui furent « remplacés » par les Lombards, ruinant les coûteux efforts de l’Empire [11].

Le fait que la Russie actuelle se perçoive comme menacée dans ses frontières continue d’échapper à la majorité des observateurs occidentaux, qui préfèrent mettre en avant l’expansionnisme russe et la menace qu’il représente pour ses anciens États « vassaux ». L’Europe a ainsi totalement épousé le point de vue des États de l’ancien Pacte de Varsovie, sans chercher à comprendre celui de Moscou. Envahie à trois reprises en moins de cinquante ans au début du XXe siècle [12], la Russie ne préserva son indépendance qu’au prix de millions de morts et de destructions d’une ampleur colossale. On peut comprendre que l’idée de l’invasion marqua les esprits et que le recul de la frontière « le plus loin à l’ouest possible » devint une obsession. Si le dénouement du second conflit mondial avait paru enfin donner à l’espace russe la profondeur stratégique nécessaire à sa protection, la liquidation à marche forcée de l’URSS fit reculer la frontière de positionnement des troupes de 1 300 km, de la frontière de l’ex « Allemagne de l’ouest » à celle de la Lettonie. La situation stratégique actuelle de la Russie est objectivement celle d’un empire certes encore puissant militairement, mais affaibli démographiquement, démembré et encerclé, et pas d’une puissance en expansion : les forces de l’OTAN sont à moins de 600 km de Moscou. Les trajectoires économiques et démographiques ont à ce point divergé depuis la chute du Mur de Berlin que la Russie, malgré son territoire et ses immenses ressources, ne dispose plus que de la population combinée de la France et de l’Allemagne et du PIB de l’Italie. Dans ces conditions, peut-on reprocher à Vladimir Poutine de se sentir « menacé » par l’OTAN qui agrège près d’un milliard d’habitants, avec un PIB vingt fois supérieur ? Bien entendu, cela ne doit pas conduire à négliger ou ignorer la menace qu’il peut représenter en retour, mais plutôt à la considérer comme une perception de sa propre faiblesse sur le long terme.

Le pouvoir moscovite est tout simplement conscient qu’il ne peut pas « gagner » face à l’Occident : son objectif de (re)sanctuariser la Russie tout en affaiblissant ses adversaires doit être compris dans ce contexte limité. Du reste, s’il est souhaitable que l’Europe soit faible militairement pour la Russie, elle demeure le client indispensable du gaz russe et se trouve ainsi liée dans une situation de dépendance. Encerclée, la Russie l’est aussi en Asie : le Japon et la Corée du Sud ne sont pas perçus autrement que comme des tremplins américains, tandis que la Chine, partenaire et allié de circonstance, constitue une menace de long terme perçue comme telle à Moscou. La relance favorable des négociations avec le Japon à propos des îles Kouriles est ainsi la concrétisation de cette crainte russe face à la Chine, qui justifie sur le moyen terme une tentative de rapprochement avec les adversaires potentiels de Pékin. Là encore on voit la marque byzantine d’une diplomatie à la fois opportuniste et dénuée d’aprioris moraux : seul compte l’intérêt de l’Empire et s’il est possible de diviser ses adversaires à peu de frais, c’est toujours souhaitable, même au prix de renversements apparents d’alliance. L’instrumentalisation des ventes d’armes à la Turquie est ainsi un bon exemple par lequel, à bon compte, Moscou accentue la division de l’OTAN [13].

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S’il y a utilisation récurrente de la force armée par Moscou depuis 2014 et l’annexion de la Crimée, c’est d’une part car elle constitue pour l’instant une des dernières cartes maîtresses de la Russie, et d’autre part car la situation russe n’est perçue fort justement que comme ne pouvant qu’inexorablement se dégrader : l’économie de rente reste tributaire du pétrole et du gaz dont les cours sont corrélés, la démographie est sinistrée et les tensions sociales sont à la hausse, ce qui justifie d’agir au plus tôt, l’attente n’étant porteuse que d’une détérioration de la situation globale et d’une réduction des options stratégiques. On évoque souvent les « succès » de Vladimir Poutine, mais on oublie aussi les limites de son action. Ainsi, si la Russie a occupé une place laissée vide au Proche Orient par le recentrage stratégique vers l’Asie voulu par Barack Obama, elle a été incapable de conserver son ancienne influence dans les Balkans, réduite à la Serbie, et dont l’évolution actuelle est beaucoup moins marquée par l’empreinte de Moscou qu’en 1999 pendant la crise du Kosovo. En outre, l’intervention en Syrie ne passionne plus les foules et le pouvoir se fait discret sur le sujet. En Afrique, la Russie a pu avancer, notamment via ses mercenaires et quelques ventes d’armes, comme en Centrafrique, là encore à la faveur du recul des occidentaux, mais la position reste opportuniste et fragile [14].

Cet opportunisme typiquement byzantin s’explique en partie par le manque de moyens, mais aussi par la perception de l’impossibilité pratique de la « victoire », voire de son inutilité : mieux vaut agir quand c’est possible, mais sans se laisser entraîner dans des conflits trop coûteux. Les Byzantins comprirent en effet, tout comme les Russes actuellement, que l’idée de victoire « totale » contre un adversaire puissant était un leurre et que la rechercher faisait courir le risque de la sur-expansion et de l’épuisement : vaincre totalement un adversaire absorbait d’énormes ressources matérielles, humaines et fiscales, usait l’Empire et n’aboutissait, au final, qu’à faire « de la place » pour qu’un nouvel adversaire face auquel la situation impériale serait compromise par l’épuisement. Loin de sécuriser l’Empire, l’anéantissement d’un adversaire était donc perçu comme trop coûteuse et contre-productive, un « paradoxe de la stratégie », compris comme tel, notamment par l’Empereur Isaac Comnène qui théorisait qu’en temps de faiblesse, « l’augmentation est une diminution » [15].

À l’anéantissement, les Byzantins préféraient l’affaiblissement de l’adversaire, en usant d’abord d’influence politique et diplomatique. Le recours à la force était toujours possible, mais ne devait pas placer l’Empire en position de s’épuiser. Cette approche, née dans la douleur face aux Perses, aboutit à la création de « conflits larvés » entre tierces parties, insolubles mais qui divisaient les adversaires tout en les maintenant fixés sur des enjeux mineurs. C’est une approche qui choque en Occident : d’une part nous avons tendance à considérer qu’il doit y avoir « un » adversaire principal (celui contre lequel s’exerce la violence de la guerre juste) et d’autre part qu’il doit être vaincu, totalement, pour résorber la tension morale que crée le conflit. D’où cette impression, absurde à l’échelle historique, que l’Histoire prenait fin en 1989 [16] : l’adversaire principal, l’URSS, s’étant effondré, la victoire mondiale de l’Occident et de son système politico-économique semblait évidente et définitive. Toute conflictualité devenait parfaitement secondaire en l’absence d’adversaire légitime à la démocratie libérale. On sait ce qu’il advint des dividendes de la paix, acquis sous forme de « subprimes »

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Dans l’approche russe, la conflictualité, loin de fragiliser la situation sécuritaire, y contribue dans un paradoxe orwellien qu’on pourrait résumer par « la guerre (larvée) c’est la sécurité ». Ainsi, l’abcès de Transnistrie s’insère comme un « coin » entre Ukraine et Moldavie. De même, l’Ossétie du Sud « fixe » la Géorgie sur le plan territorial, tout comme le séparatisme du Donbass contribue à affaiblir l’Ukraine et sécurise l’annexion de la Crimée : aucun besoin de « résoudre » ces conflits. Dans un cas comme dans l’autre, l’intérêt de Moscou est que cela continue [17]. Même l’intervention dans le conflit syrien doit se comprendre, en partie, comme une action de protection par fixation de l’adversaire aux frontières. Loin d’être une extravagante aventure ultramarine, l’intervention en Syrie en 2015 était perçue à Moscou comme l’impérieuse nécessité de protéger les marches du Caucase. On oublie facilement que la même distance sépare la Russie de la Syrie et Paris de Marseille : environ 650 km. Le containment puis la réduction, en Syrie, de l’enclave djihadiste répond ainsi à un objectif immédiat de protection du Caucase, qui explique notamment la facilitation au départ des djihadistes organisée en sous-main par les services russes, mais aussi le « redéploiement » des survivants en Ukraine après la chute de Daech [18].

Cette compréhension de l’instrumentalisation des conflits non comme un moteur de l’expansion territoriale massive mais plutôt comme une avancée prudente du glacis stratégique par la création d’un « tampon instable » permet ainsi d’analyser le comportement russe actuel. Ayant perdu des provinces perçues comme « historiquement russes » (la Biélorussie, l’Ukraine) ou « indispensables » à la sécurité (Pays Baltes, Géorgie), la Russie cherche à reconstituer un espace stratégique suffisant qui mette Moscou à l’abri de toute tentative étrangère. Ainsi, il ne faut pas tant craindre par exemple une invasion en bonne et due forme de la Pologne ou des Pays Baltes que des tentatives de déstabilisation et de neutralisation, par agitation de minorités, armées à peu de frais avec des surplus d’armements et encadrées par des supplétifs. Or face à ce genre de conflit, l’OTAN, pensé pour les guerres de haute intensité, est démuni. Quelle serait la réaction de l’alliance si la Lituanie ou la Géorgie – si elle finit par rejoindre l’Alliance – invoquaient l’article V du Traité de l’Atlantique nord face à des « bandes armées » ?

Prolongeant l’idée que la conflictualité puisse être contributive à la sécurité dans la durée, la Russie de Vladimir Poutine ne distingue pas « temps de guerre » et « temps de paix » et a une approche globale (on pourrait dire « systémique ») de la diplomatie. Même si les Russes, dans le triomphe rationaliste du XVIIIe siècle, ont pu se rallier, pour un temps au moins et partiellement, à la vision occidentale de la guerre, ils s’en sont éloignés de nouveau, depuis la chute de l’URSS. Ainsi on comprend mieux la stupeur outrée des observateurs qui frappent de duplicité Vladimir Poutine lorsqu’il prétend négocier la paix pendant que l’aviation russe bombarde la Syrie. De même, la volonté de Moscou de discuter en même temps des quotas de gaz transitant par l’Ukraine et du conflit au Donbass, alors que ni les Européens ni Kiev ne voient (ou ne veulent voir) le rapport suscite crispations et incompréhensions. Il ne s’agit là encore que d’un avatar de conceptions occidentales ethno-centrées. Au demeurant, l’idée qu’il y a un « temps pour la négociation » et un « temps pour les armes » qui seraient mutuellement exclusifs est récente et, au final, on peut s’interroger sur sa pertinence. Elle ne se justifiait guère que pendant le second conflit mondial, en raison de la dimension idéologique irréconciliable des forces en présence. Mais une étude de la conflictualité sur le long terme montre que, en Occident comme en Orient, la règle est que les diplomates continuent de se parler pendant les combats. On peut même considérer, comme le suggère Luttwak à propos des Byzantins, que la diplomatie est encore plus importante pendant la guerre car elle permet de recruter de nouveaux alliés tout en divisant les coalitions adverses. En allant plus loin, on peut s’étonner que l’OTAN ait, dans sa doctrine opérationnelle, une vision tout à fait systémique des crises, marquant un continuum du politique à l’économique et au militaire et qui prend en compte les aspects diplomatiques du centre de gravité, mais que les dirigeants de l’Alliance atlantique, eux, soient souvent incapables de s’approprier la vision « technique » de leurs propres états-majors [19].

L’influence et la parole sont également des points de convergence entre la pratique byzantine et russe. Déjà au Moyen-âge, les Latins dénonçaient la « duplicité des Grecs » et se plaignaient de leur manque de parole. L’attachement occidental à la notion de « Vérité » n’a fait que croître avec le triomphe du rationalisme, de la méthode scientifique et du gouvernement par les lois. À l’opposé, Byzantins comme Russes percevaient et perçoivent encore la nécessité de raconter des « histoires » adaptées à chaque situation. Au temps pour les fake news, l’important est pour Moscou d’occuper le terrain de la communication, y compris par la désinformation. La démoralisation de l’adversaire par la mise en avant de ses faiblesses compte plus d’ailleurs que la propagande valorisante et c’est la méthode que pratiquent, au quotidien, Russia Today ou Sputnik. C’est une évolution marquée depuis la chute de l’URSS : Moscou ne cherche plus à proposer un système de valeurs opposé à celui de l’Occident, mais plutôt à le discréditer afin de démoraliser les populations, spécifiquement en Europe, en construisant la prophétie (hélas assez auto-réalisatrice) d’Européens « condamnés car moralement faibles ». L’approche du domaine « cyber » diffère ainsi radicalement de celle de l’Occident, en ce qu’elle s’inscrit dans la continuité avec les sujets informationnels et médiatiques [20].

maskirovka.jpgLe recours à la désinformation d’ailleurs est un des points fondateurs de la « déception » (ruse, diversion, feinte) ou, dans le jargon militaire russe moderne, de la maskirovka. Si des historiens militaires modernes au nombre desquels David Glantz ou Jean Lopez ont exposé l’importance de l’art opératique soviétique et son apport à la pensée militaire moderne, ils sont également mis en exergue le rôle crucial de la déception et de la désinformation pendant l’accomplissement de la manœuvre de haute intensité [21]. Ici se dessine encore la continuité entre opérations armées, diplomatie et influence. Il n’y a pas de soft ou hard power, mais une puissance, que l’on exerce en même temps « par les arts, les armes et les lois ». La déception byzantine ou russe est tout à la fois un outil d’affaiblissement de l’adversaire, le démultiplicateur des forces par la surprise opérationnelle qu’elle permet et le garde du corps mensonger d’une vérité qui doit être gardée secrète : conscients de l’impossibilité de préserver les secrets de manière absolue, les Byzantins le rendaient invisible au milieu du mensonge. Dans ce domaine spécifique du renseignement on voit encore des similitudes frappantes avec la doctrine russe de préservation du secret par le doute et le flou, aux antipodes d’une conception occidentale de préservation du secret par la protection, le silence et la sécurisation d’un fait rationnel unique et univoque.

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Ainsi, la déception offre le bénéfice de créer de la confusion et d’affaiblir l’adversaire sans combat ou en préalable à celui-ci. Un des avantages conférés par la déception est l’économie des forces. Il s’agit là d’un point commun notable entre l’Empire Byzantin et la Russie actuelle : dans les deux cas, on est face à un ensemble impérial disposant de forces de grande qualité, mais coûteuses à reconstituer en cas de pertes. Il faut donc les utiliser avec parcimonie et ne pas hésiter à avoir recours à des alliés, des mercenaires ou des « proxies » qu’on ira chercher avant ou pendant le conflit pour limiter l’engagement des forces impériales. Bien qu’ayant été couramment pratiquée en Occident, la déception semble à la fois passée de mode et emprunte d’inefficacité et de disqualification morale. Sans doute est-ce un avatar de l’obsession de la guerre « juste » : la ruse, le mensonge sont par essence des comportements négatifs qu’un État agissant au nom d’une juste cause devrait se restreindre d’employer. Ainsi se creuse le fossé entre le monde du renseignement et celui des opérations, pour des raisons souvent plus idéologiques qu’organisationnelles [22].

La Russie est sortie des conceptions soviétiques qui prévoyaient l’engagement massif de grands corps blindés pour disloquer en profondeur l’adversaire [23]. L’armée russe rénovée par Vladimir Poutine depuis 2008 s’est reconstituée autour de « pointes de diamant » : des unités de choc équipées en matériel modernisé qui sont, certes, supérieures en effectifs aux forces de haute intensité européennes, mais qui ne peuvent plus compter comme dans les années 1970 sur une écrasante supériorité numérique. Le gros des effectifs demeure équipé d’armes anciennes et n’a qu’une aptitude douteuse à la manœuvre interarmées, tout en pouvant fournir utilement des contingents de blocage, d’occupation ou de disruption. Ainsi, à la manière des Byzantins, les Russes sont intervenus en Syrie de manière limitée, pour « encadrer » leurs alliés. Si l’effort russe, considérable au regard des moyens économiques disponibles, a fourni au régime syrien conseillers, appui aérien et d’artillerie, moyens logistiques, antiaériens et de renseignement, le gros du travail d’infanterie a été fait sur le terrain par les supplétifs de la nébuleuse iranienne, complétés de quelques forces spéciales [24]. L’ère n’est plus à la manœuvre des grands corps blindés de l’Armée Rouge, mais plutôt aux « coups de main » opportunistes, comme dans le Strategikon. La situation dans le Donbass est partiellement similaire. Certes on voit le retour de la « haute intensité » en périphérie de l’Europe avec des engagements de centaines de chars lourds, mais là encore en usant d’unités de supplétifs, de « volontaires » qui permettent de ne pas engager les unités de pointe du dispositif de choc, dont la vocation est à la fois d’impressionner, d’aider à la régénération organique et de constituer une réserve de dernier recours : la Russie n’a pas envie d’affronter l’Occident sur le terrain militaire [25].

Cette mise en perspective de quelques éléments saillants des similitudes entre l’art stratégique et opérationnel byzantin et les manœuvres de la Russie de 2018 permet de mieux cerner à la fois les méthodes de Vladimir Poutine, mais aussi ses limites et les raisons de notre propre incompréhension.

On pourrait objecter que la présence des arsenaux nucléaires rend invalide cette approche, par la transformation profonde de l’art de la guerre. Il n’en est rien. De fait, le paradoxe moderne de la dissuasion serait plus compréhensible pour un penseur byzantin que pour son homologue occidental. L’idée que des armes puissent avoir leur meilleure efficacité par leur inutilisation, tout comme celle que la sécurité puisse être fille de la terreur, sont au cœur du paradoxe de la stratégie, de la résolution du dilemme de la convergence des contraires [26]. Mais le dernier point, peut-être le plus important, dans lequel s’inscrit l’arme nucléaire, est celui que nous avons évoqué en introduction : l’idée de durer. L’arme nucléaire offre un sanctuaire temporel à la Russie. Cette sanctuarisation apparaît particulièrement importante en Orient, face à la poussée chinoise en Sibérie et à la très forte disproportion des forces qui serait celle d’un conflit le long de l’Amour.

Même si elle pourrait apparaître à un penseur marqué par l’idée occidentale de progrès, la perpétuation de la civilisation – russe ou byzantine – comme objectif fondamental de la grande stratégie est certainement un pivot épistémologique important, qui donne une résilience particulière à la société russe en période de crise. Et, au fond, il vaut mieux sans doute avoir un objectif clair mais peu séduisant sur le plan idéologique (celui de durer) que de chercher en circonvolutions quel pourrait bien être l’objectif commun de progrès en Europe, en dehors de l’approfondissement de l’efficacité des marchés et de la concurrence libre et non faussée…

Stéphane AUDRAND (Theatrum Belli, 17 décembre 2019)

Notes :

(1) https://www.dailymail.co.uk/news/article-6292049/Putin-sa...

(2) En toute rigueur, c’est à Cicéron que revient d’avoir formalisé le premier l’idée de la guerre juste, dans La République (II, 31 et III, 37). Repris par Saint Augustin qui y adjoint l’idée chrétienne de contribution au Salut, elle est ensuite formalisée par Thomas d’Aquin. Voir LEVILLAYER A. « Guerre juste et défense de la patrie dans l’Antiquité tardive », in Revue de l’histoire des religions, tome 3, 2010,  p. 317-334.

(3) Définition au chapitre 1 de « De la Guerre », paragraphe 2.

(4) Ce qui n’est finalement que la traduction du fameux « Cedant arma togae, concedat laurea linguae » de Cicéron.

(5) Une grande partie de cet article repose sur les analyses développées par EDWARD LUTTWAK dans son excellent ouvrage La Grande Stratégie de l’Empire byzantin, Paris, Odile Jacob, 2010 (édition originale anglaise 2009).

(6) Sur l’émergence du gouvernement des Lois on pourra se rapporter aux travaux d’Alain Supiot, La Gouvernance par les nombres, Cours au collège de France, 2012-2014, Paris, Fayard, 2015, 515 pages.

(7) NORWICH, J.J., A Short History of Byzantium, First Vintage Books, New York, 1982, 430 pages, pp. 382-383.

(8) Timothy Ware, L’orthodoxie, Bruges, 1968, DDB, 480 pages, p. 150-151.

(9) Spécifiquement sur le ce « messianisme » on pourra lire DUNCAN P.J.S., Russian Messianism, third Rome, revolution, communism and after, New York, Routledge, 2000.

(10) CHRISTOU T., The Byzantine history of Putin’s Russian empire, sur The Conversation – http://theconversation.com/the-byzantine-history-of-putin...

(11) DUCELLIER A., Byzance et le monde orthodoxe, Paris, Armand Colin, 1986, page 91. L’Empereur Maurice – l’auteur du Strategykon – tenta de se maintenir en Italie largement pour des questions de prestige, et on peut penser que les coûts de cette entreprise pesèrent dans sa réflexion stratégique.

(12) En 1914-17 et en 1941-45 par l’Allemagne et, on l’oublie souvent, en 1920 par la Pologne, dont les troupes s’emparèrent de Kiev et Minsk. L’intervention des puissances occidentales contre la Révolution marqua aussi les esprits car elle montra l’encerclement de l’espace russe, les alliés débarquant sur toutes les côtes de la future URSS.

(13) FACON. I., Export russe des systèmes anti-aériens S-400 : intentions stratégiques, atouts industriels et politiques, limites, Défense & Industrie n°13, juin 2019, 4 pages.

(14) « Russie Afrique : le retour » – Affaires Étrangères du 19 octobre 2019. https://www.franceculture.fr/emissions/affaires-etrangere...

(15) Cité par DUCELLIER A., op. cit, page 15.

(16) FUKUYAMA F., La Fin de l’histoire et le Dernier Homme, Paris, Flammarion, 1992. Faisons au moins justice à Francis Fukuyama en reconnaissant que son livre comporte bien plus de nuances et d’hésitations sur la validité de sa théorie que ne le suggèrent à la fois ses adversaires et ses thuriféraires.

(17) Autant de crises, dont les ferments étaient connus et documentés depuis la chute de l’URSS. Ainsi, pour le cas de l’Ukraine et de la Crimée, on pourra relire BREAULT Y., JOLICOEUR P. et LEVESQUE J., La Russie et son ex-empire, Paris, Presses de Science Po, 2003, pages 105-115.

(18) https://www.la-croix.com/Monde/Europe/djihadistes-Caucase...

(19) SHAPE, Allied Command Operations – Comprehensive Operations Planning Directive COPD, 2013, 444 pages, voir en particulier pages 21, 26, 63 et 88 à 91.

(20) CONNEL, M. et VOGLER, S., Russia’s Approach to Cyber Warfare, CAN, Washington, 2017, 38 pages, pp. 3-6.

(21) Voir GLANTZ D., Soviet Military Deception in the Second World War, New York, Routledge, 2006.

(22) KEEGAN J., dans son ouvrage Intelligence in War, Londres, Pimlico, 2004, réfléchit ainsi sur les limites du renseignement dans la conduite des opérations. Il s’inscrit plutôt dans le droit fil de Clausewitz pour lequel, face au brouillard de la guerre et aux forces de frictions, il est coûteux et peu efficace de rajouter de la confusion.

(23) Voir LOPEZ J., Berlin, Paris, Economica, 2010, pages 75-88 pour une brillante synthèse francophone de l’évolution doctrinale soviétique de la bataille en profondeur, manœuvre opérationnelle la plus aboutie sans doute de l’ère de la guerre mécanisée.

(24) KAINIKARU S., In the Bear’s Shadow: Russian Intervention in Syria, Air Power Development Centre, Canberra, 2018, 192 pages, pp. 81-96.

(25) Autour de 600 chars ukrainiens. Voir l’audition du général P. Facon par la commission de la défense nationale et des forces armées – CR74 du 25 septembre 2018. Le général Facon note d’ailleurs l’importance du déni d’accès dans l’approche russe, très byzantine : il ne s’agit pas tellement de rechercher la décision de manière immédiate par la manœuvre, le feu et le choc, mais d’entraver la capacité adverse à le faire par déni d’accès terrestre et/ou aérien.

(26) Sur le paradoxe de la stratégie et son prolongement nucléaire, voir LUTTWAK E. N., Le grand livre de la stratégie, Paris, Odile Jacob, 2001, pages 21-23 et 205-207.

lundi, 06 janvier 2020

Sur la Corée du Nord

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Sur la Corée du Nord

par Georges FELTIN-TRACOL

Quand paraît en février 2018 cet ouvrage, les auteurs, spécialistes réputés de la péninsule coréenne, de la Chine et des questions nucléaires, ne cachaient pas leurs inquiétudes à propos d’une éventuelle confrontation armée entre la Corée du Nord et les États-Unis. Ils ne pouvaient pas imaginer que cinq mois plus tard, Donald Trump rencontrerait Kim Jong Un à Singapour. Encouragée par la médiation du président sud-coréen Moon Jae-in, cette réunion exceptionnelle fit tomber la tension. Loin d’être fou ou d’agir d’une façon irrationnelle comme l’affirment à la longueur de journée des médiats stipendiés par les bellicistes yankees, le jeune dirigeant nord-coréen se révèle être un fin politique qui applique autant les conseils de Sun Tzu que les enseignements de Machiavel.

CN-livre.jpgCertes, depuis une seconde rencontre à Hanoï en février 2019 qui fut un échec et une brève entrevue sur la ligne de démarcation de Panmunjom en juin dernier qui fit néanmoins de Donald Trump le premier président des États-Unis à fouler un instant le sol de la République populaire et démocratique de Corée (RPDC), les tensions reprennent entre Washington et Pyongyang en raison de la suffisance des États-Unis incapables de conclure le moindre compromis.

Le traumatisme de la Guerre de Corée

Le monde selon Kim Jong-un est un ouvrage passionnant, fruit du travail des auteurs sur le terrain : Juliette Morillot parle le coréen, se rend régulièrement en Corée du Nord, munie d’un visa officiel de chercheur. En effet, « jouer la carte de la transparence avec Pyongyang est un préalable indispensable afin de comprendre la logique et la démarche du régime. Et non [le] défendre. Il ne sert à rien de jouer au plus malin avec les Nord-Coréens. Ils demandent avant tout du respect et de la reconnaissance (p. 15) ». Cette approche psychologique est capitale pour bien cerner les ressorts intimes d’un peuple qui se souvient, génération après génération, du rôle néfaste des puissances occidentales dans la division inacceptable de la péninsule, de la violente colonisation japonaise et des ravages de la Guerre de Corée (1950 – 1953). Fidèles à leur crapulerie congénitale et à leur couardise légendaire, les Yankees ont bombardé en masse au phosphore et au napalm tous les centres urbains coréens du Nord sans oublier les nombreux crimes de guerre et contre l’humanité perpétrés par les soudards de l’Oncle Sam.

L’accumulation de ces traumatismes successifs explique l’ardeur farouche des Coréens du Nord à conserver leur juche, la politique d’indépendance nationale et d’autosuffisance économique. Certes, « les contraintes géographiques et climatiques limitent naturellement le développement agricole, à moins de lancer un grand programme de mécanisation (p. 49) ». Les auteurs soulignent cependant la nette mutation économique de Pyongyang qui s’apparente maintenant aux villes du littoral chinois avec cette soif de consommation exprimée par « cette nouvelle classe embryonnaire mais puissante des donju (littéralement “ maîtres de l’argent ”, qui à l’origine changeaient des devises et prêtaient de l’argent), composée d’hommes et de femmes d’affaires, d’entrepreneurs, de commerçants (p. 24) ». Ils remarquent en outre la multiplication de « lampadaires à énergie solaire (p. 29) » ainsi que de nombreux panneaux photovoltaïques dans les entreprises et chez les particuliers.

Un État résilient

Que l’Occident l’accepte ou pas, la RPDC est dorénavant une indéniable puissance nucléaire. On oublie que c’est par ailleurs une redoutable puissance informatique avec des hackers bien formés et motivés. « Une cyber-guerre secrète et implacable se déroule entre les États-Unis et la Corée du Nord avec la Corée du Sud en tant que cible intermédiaire (p. 247). » Grâce à un solide maillage diplomatique en Asie et en Afrique, les Coréens du Nord parviennent enfin à contourner les sanctions imposées par le « Machin » onusien toujours incapable de sanctionner à l’identique un petit État proche-oriental qui viole depuis 70 ans le fumeux « droit international ».

Habituée à survivre dans un milieu international hostile, la Corée du Nord montre une belle résilience. Juliette Morillot et Dorian Malovic en profitent pour tacler experts auto-proclamés et journalistes occidentaux paresseux qui ne font que répercuter des mots d’ordre belliqueux lancés par différentes officines d’outre-Pacifique. Le monde selon Kim Jong-un est par conséquent une excellente enquête qui témoigne des changements profonds survenus en Corée du Nord, des transformations matérielles et techniques qui ne modifient en rien son incontestable caractère socialiste et national.

Georges Feltin-Tracol

• Juliette Morillo et Dorian Malovic, Le monde selon Kim Jong-un, Robert Laffont, 2018, 268 p., 18,50 €.

dimanche, 05 janvier 2020

Le point de vue du général Desportes sur l'Otan

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Le point de vue du général Desportes sur l'Otan
Ex: http://www.europesolidaire.eu
Le général français Vincent Desportes vient de donner pour RT France, son avis sur l'Otan  qui célèbre ses 70 ans cette année, avant de poser la question d'une éventuelle Europe de la défense.

GVD-décider.jpgNous en retenons ici les principaux éléments ici,  car il coïncide parfaitement avec notre propre analyse, exposée dans de nombreux articles. Mais nous allons plus loin que le général Desportes. Si la France voulait récupérer un minimum d'indépendance à l'égard des Etats-Unis, elle devrait quitter l'Otan au plus vite. Charles de Gaulle l'avait compris, qui avait toujours refusé d'entrer dans l'Otan. Mais l'actuel Président de la république française est trop dépendant de Washington, quoiqu'il prétende, pour envisager cette mesure de salubrité. 

La pertinence de l'Otan pour l'Europe.

L'Otan est devenue un protectorat américain dirigé par un allié souvent brutal, parfois méprisant, qui va imposer un certain nombre de conditions commerciales, légales, à ses membres en échange de leur protection.

L''Europe est un continent mature, composé de nations anciennes, qui doit enfin trouver son autonomie stratégique, politique, opérationnelle et capacitaire (au plan des capacités militaires). L'Europe doit être capable d'engager les combats qu'elle a à mener et doit être capable de conduire une politique étrangère qui puisse être différente de celle des Etats-Unis.

L'avenir de l'Europe n'est pas transatlantique, il est eurasiatique

GVD-comprendre.jpgDepuis la chute du mur de Berlin et la dislocation de l'URSS en 1991, l'Otan a perdu sa raison d'être et ses objectifs. Toutefois, même si l'ennemi officiel, aujourd'hui, de l'Otan est le terrorisme, il semblerait qu'elle ait des ennemis officieux, autrement dit la Russie. L'Otan s'étant consolidée dans sa lutte contre l'URSS du pacte de Varsovie, elle revient sans cesse à cet objectif, en tendant à lutter contre la Russie. Il est probable que les tensions qui existent aujourd'hui entre la Russie et l'Otan sont pour une bonne part de la responsabilité de l'Otan et en son sein des Etats-Unis. 

Pourtant, l'avenir de l'Europe n'est pas transatlantique, il est eurasiatique. Il faut donc que l'Europe arrive à vivre dans des conditions raisonnables avec son grand allié, son grand voisin, qui est la Russie. La Russie fait partie de l'Europe, elle a toujours fait partie de l'Europe. Qui plus est la France, en particulier, a toujours eu une relation étroite voire une amitié avec la Russie, même du temps des guerres napoléonienne et de la campagne de Russie . La France et la Russie ont intérêt à bâtir ensemble leur avenir.

L'Europe doit être souveraine, donc elle doit se donner une puissance militaire souveraine.

GVD-tomorrow.jpgCeci signifie la mise en place d'une armée européenne, notamment pour ne plus subir l'extraterritorialité du droit américain et les règles commerciales qui lui sont imposées par Washington. Les pays européens, à cet égard, doivent se réveiller. L'Otan est un marchand de sable qui endort les pays européens en leur disant que les Etats-Unis les protégerons Or aujourd'hui, le parapluie américain n'est plus fiable. Malheureusement l'armée européenne est encore un mirage. L'Europe est encore très loin de créer une armée européenne. Pour que l'Europe soit souveraine et entendue lors de négociations internationales, elle doit posséder une puissance militaire. La France, aujourd'hui, pèse d'avantage que l'Europe parce qu'elle a une puissance militaire et qu'elle peut la déployer., il faut que l'Europe se donne une puissance militaire analogue de manière à pouvoir être entendue.

Référence

https://francais.rt.com/international/69181-vincent-despo...

Washington pourra-t-il obliger l'Ukraine et la Géorgie à entrer dans l'Otan ?

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Washington pourra-t-il obliger l'Ukraine et la Géorgie à entrer dans l'Otan ?

par Jean-Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

Lors d'une réunion de l'Otan à Washington en avril 2019, les membres de l'Organisation, à l'initiative des Etats-Unis, avaient convenu de renforcer leur soutien à l'Ukraine et la Géorgie face à la « menace russe », notamment dans le domaine de la défense maritime et côtière

Il faut rappeler que ces deux pays ne sont pas membres de l'Otan, mais que leur entrée est en discussion depuis l'année 2000.

Dans le même temps, des navires de guerre de l'Otan et de ces deux pays procédaient à des manœuvres communes en Mer Noire. Il suffit de regarder une carte pour se rendre compte que la Russie dont la Mer Noire est le seul débouché en eau tempérée vers le grand large ne pouvait pas être indifférente à ces perspectives.

La Turquie, la Roumanie et la Bulgarie, elles mêmes membres de l'Otan, ont également des frontières maritimes en Mer Noire. La Mer Noire allait-elle devenir une mer presque totalement aux mains des forces navales et aériennes de l'Otan ?

La Russie ne veut pas s'opposer militairement à une volonté de l'Ukraine et de la Géorgie d'entrer dans l'Otan. Cependant il lui reste des cartes à jouer du fait que l'Ukraine est en conflit intérieur avec les « Républiques » du Donbass et qu'il en est de même de la Géorgie laquelle refuse de reconnaître l'indépendance de ses anciens territoires de l'Abkhasie et de l'Ossétie du Sud. Tant que ces conflits ne seront pas résolus, il y a peu de chances que l'Ukraine et la Géorgie acceptent d'entrer dans l'Otan, sachant très bien que les membres européens de l'Otan n'ont aucun désir de provoquer des conflits avec la Russie au sujet de leurs problèmes de frontière.

De plus, il convient de se demander si le nouveau président de l'Ukraine Volodymyr Oleksandrovytch Zelensky, soucieux de normaliser ses relations avec la Russie, accepte aujourd'hui de faire le jeu de Washington à propos de l'Otan.

Beaucoup d'hommes politiques européens, bien qu'atlantistes convaincus, commencent selon le mot de l'un d'eux à se demander si appartenir à l'Otan n'est pas devenu aujourd'hui une « insanity ». Ils voient de plus en plus l'Otan comme un dispositif permettant aux industriels américains de l'armement de continuer à leur vendre des équipements militaires de plus en plus coûteux.

Nicolas Sarkozy avait en le grand tort en 2009 d'organiser le retour de la France dans l'Otan, ce qu'avait toujours refusé en son temps Charles de Gaulle. Il est regrettable aujourd'hui qu'Emmanuel Macron ne remette pas en cause cette décision. Elle est totalement en contradiction avec sa volonté proclamée de mettre en place une armée européenne dotée de ses propres commandements et matériels.

Sur la Géorgie, voir wikipedia

Note au 01/01 20h

On lira ici un jugement du général français Dominique Delawarde sur l'Otan. Il ne le dit pas explicitement, réserve oblige, mais ses propos confirment la teneur de notre article. L'Otan est une nuisance que la France devrait quitter au plus tôt.
https://theduran.com/nato-general-delawarde-assesses-final-london-declaration/?utm_source=newsletter&utm_medium=email&utm_campaign=the_duran_daily&utm_term=2020-01-01

Tras el asesinato de Soleimani, ¿más cerca de la trampa de Tucídides?

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ANÁLISIS

Tras el asesinato de Soleimani, ¿más cerca de la trampa de Tucídides?

  • Que Irán responderá, no hay duda; el dónde y el cómo, determinará si se tratará de un episodio más en el conflicto o definirá una nueva fase
  • Israel y EEUU nos pueden estar conduciendo a una nueva guerra en una zona vital para los intereses europeos. Para España no se trata de algo ajeno

Tras el asesinato del jefe de la Fuerza Quds, nada será igual ya en Oriente Próximo. Soleimani era un dirigente fundamental del régimen iraní y estaba en el ojo de mira de la CIA y del Mossad desde hace tiempo. La administración norteamericana (Israel siempre estará al lado, cuando no delante), en momentos difíciles para Donald Trump, golpea durísimamente a Irán y agudiza todas las tensiones existentes en la zona. La respuesta de este país no se hará esperar. ¿Habrá escalada? No se puede descartar. Lo que está claro es que EEUU e Israel se arrogan el poder para intervenir en cualquier lugar del mundo para eliminar a sus supuestos enemigos aunque sea violando el derecho internacional y la Carta de las Naciones Unidas. En este caso, se ha asesinado a un destacado militar iraní en Bagdad.

Como es sabido, la invasión de Iraq cambió profundamente el mapa político en esa parte crucial del mundo. EEUU, no solo no sacó ventajas de esa guerra, sino que, en muchos sentidos, la perdió. El conflicto sirio aclaró aún más la correlación de fuerzas existente. Todo se ha movido. Rusia retorna como actor principal en la zona; Turquía gana autonomía y define con mucha claridad sus intereses estratégicos que, como estamos viendo, llegan al conjunto del Mediterráneo, empezando por Libia. Arabia Saudí se convierte progresivamente en una gran potencia militar e interviene en Yemen, en una guerra -hay que subrayarlo- que no está ganando, e Irán refuerza decisivamente su papel en los tres mundos en los que Soleimani se ha movido con pericia: Iraq, Siria y el Líbano.

EEUU e Israel viven una situación interna bastante parecida: bloqueo político y elecciones en el horizonte. Netanyahu, acorralado por la corrupción, se prepara para unas nuevas elecciones; Trump a la espera del impeachment y con unas elecciones menos inciertas que las de su aliado israelita. Ambos necesitados de dar sensación de poder, de fortaleza y de capacidad para matar a sus adversarios, lo que suele favorecer en campaña electoral. El tema, sin embargo, va más allá: el Estado de Israel no está dispuesto a consentir la existencia de una potencia que pueda poner en peligro sus intereses vitales que, como es sabido, son los de toda esa zona. Lleva años intentando intervenir en Irán. Una operación de este calibre difícilmente se podría hacer sin su colaboración y ayuda logística. Hay que insistir, como señalaron Mearsheimer y Walt, que Israel es un actor interno en EEUU, es decir, tiene tal influencia y poder en sus instituciones, que es capaz de determinar, en muchos sentidos, la política que hacen las distintas administraciones norteamericanas.

Que Irán responderá, no hay duda; el dónde y el cómo, determinará si se tratará de un episodio más en el conflicto o definirá una nueva fase donde la guerra de alta intensidad volverá a aparecer en la zona. La situación es propicia para los que quieren resolver, de una vez por todas, la cuestión iraní y terminar con el régimen de los ayatolás. Israel está en ello. La reacción de Rusia y Turquía tampoco se hará esperar mientras la guerra sigue tanto en Siria como en Yemen.

Hace unas semanas, el presidente Macron hablaba de que la OTAN estaba en muerte cerebral y planteaba pasar página, retomando una nueva política de defensa y de seguridad para una Europa más soberana. Merkel y Trump respondieron afirmando la necesidad de la OTAN en momentos de cambios geopolíticos profundos. Si alguna vez la UE fuese capaz de definir sus intereses estratégicos reales en el Mediterráneo y, específicamente, en el Oriente Próximo, tomaría nota de que Israel y EEUU nos pueden estar conduciendo a una nueva guerra en una zona vital para los intereses europeos. Para España no se trata de algo ajeno. Por lo pronto, la administración Trump plantea reforzar su presencia en Rota y no sabemos con precisión si también en Morón. El nuevo gobierno pronto deberá definir su posición.

vendredi, 03 janvier 2020

Bilan européen 2019

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Bilan européen 2019

par Thomas Ferrier

Ex: http://thomasferrier.hautetfort.com

Des élections européennes renforçant le Système.

Les élections parlementaires européennes de 2019 auraient pu être l’occasion d’un choc salutaire au niveau de l’actuelle Union Européenne. Il n’en a rien été. Aucun parti national, aucune coalition de partis nationaux non plus, n’ont pu bouleverser l’équilibre instauré depuis 1979, avec la domination des deux grands pôles de droite (PPE) et de gauche (S&D) qui se répartissent les postes principaux.

La grande vague populiste annoncé n’a pas été au rendez-vous. Si la Lega de Salvini et les « Démocrates suédois » progressent nettement, le FPÖ suite au scandale lié à son désormais ex-dirigeant Hans-Christian Strache s’est effondré. Le RN de Marine Le Pen réalise 23% contre 27% en 2014, même s’il reste à un point près premier devant « En marche ». Le Brexit Party obtient un score important, à plus de 27% des voix, dans un contexte lié au brexit, mais qui reste au même niveau qu’UKIP en 2014. En Finlande et au Danemark, la droite nationale recule fortement, et en Espagne Vox a fait une contre-performance aux élections européennes. La « vague populiste » a donc été une vaguelette.

Certes, il y a toujours des surprises à toutes les élections européennes et un jour viendra je l’espère où le Parti des Européens, que j’ai l’honneur de diriger, sera cette surprise. Ce fut celle des écologistes de gauche, dans un contexte médiatique favorable avec la promotion artificielle de Greta Thunberg. 12% au Royaume-Uni (+ 5 points), 20,5% et 21 sièges en Allemagne, 20% des voix en Wallonie pour Ecolo et 12,4% des voix en Flandre, 13,5% des voix en France. Cette vague verte, certes limitée mais constatée dans presque tous les pays de l’UE, n’était pas attendue mais elle n’est pas si surprenante considérant l’importance du thème écologique, détourné par la gauche.

A l’issue de ces élections, c’est logiquement Manfred Weber qui aurait dû être proposé à la tête de la commission européenne, puisqu’il était la tête de liste du PPE, premier parti du parlement. Pourtant c’est Ursula von der Leyen, ancienne ministre CDU de la défense du gouvernement Merkel, qui a été proposée, à l’issue d’une négociation franco-allemande où Christine Lagarde, soutenue par Macron, a été nommée à la BCE. Pour gêner Matteo Salvini, le parlement européen s’est doté d’un président issu du Parti Démocrate italien et donc très hostile à la Lega, en la personne de David Sassoli.

Quant à la présidence de l’Union Européenne, poste honorifique généralement confié à un homme politique en fin de carrière ou rejeté dans son pays, afin qu’il ne fasse aucune ombre aux dirigeants des gouvernements nationaux, Donald Tusk a été remplacé par le belge Charles Michel, dont le gouvernement était tombé quelques mois auparavant dans son pays. Enfin le haut représentant en matière d’affaires étrangères est le socialiste espagnol Josep Borrell. La gauche, pourtant en net recul, a été finalement bien récompensée.

Ursula_von_der_Leyen_by_Sandro_Halank.jpgL’élection d’Ursula von der Leyen à la tête de la commission européenne fut compliquée. De nombreux partis politiques et groupes lui étaient hostiles. Avec 383 voix, elle a été élue de justesse (il lui fallait 374 voix au minimum). Son désaveu aurait été utile pour la démocratie européenne et on aurait pu espérer un sursaut des parlementaires, même si la personne qui aurait été élue à sa place aurait pu être pire. C’était d’ailleurs la crainte de Viktor Orban. Finalement Ursula von der Leyen fut sauvée grâce au vote du Fidesz d’Orban, du M5S italien et du PiS polonais. Le peu de courage des partis au pouvoir du groupe de Visegrad est assez révélateur.

Autres sujets européens (en vrac).

Russie-Ukraine.

Aucune évolution favorable de la situation entre l’Ukraine et la Russie malgré l’élection d’un nouveau président ukrainien, Zelensky. Les sanctions économiques contre la Russie ont été maintenues par les USA et l’Union Européenne. La Russie est même exclue du sport international, ses athlètes devant désormais se présenter en compétition sans leurs couleurs. Enfin, ces derniers jours, une querelle historiographique oppose durement Poutine et la Pologne à propos de l’attitude ambigüe qu’aurait eu cette dernière vis-à-vis de l’Allemagne hitlérienne, dont pourtant elle fut par la suite l’une des principales victimes. Malheureusement, la Russie semble toujours davantage s’éloigne de l’Union Européenne, par la faute de cette dernière qui n’a pas voulu ou su trouver les mots de réconciliation et a été incapable en 2019 de s’émanciper des USA.

Balkans.

Douche froide pour les espérances d’adhésion des Balkans de l’ouest. Le président français Macron a clairement gelé tout processus dont l’Albanie et la Macédoine auraient pu bénéficier, malgré les efforts de la Macédoine pour calmer le jeu avec la Grèce, en prenant désormais le nom de Macédoine du Nord. Quant à la Serbie et au Monténégro, le processus d’adhésion n’est pas gelé mais ne semble guère évoluer. Ce mépris de peuples européens, qui ont une vocation naturelle à nous rejoindre, est choquant de la part d’un prétendu pro-européen. Par ailleurs, même s’il est au point mort de manière probablement définitive, le processus d’adhésion de la Turquie à l’UE n’a toujours pas été officiellement abandonné.

Allemagne et Autriche.

Malgré la progression de l’AfD dans les différents Länder, et sa forte représentation au Bundestag, le gouvernement Merkel est toujours en place et les Grünen (Verts) ont le vent en poupe. Il se dit que la CDU pourrait choisir de s’allier avec eux, malgré leur tropisme de gauche et leurs positions sociétales très décadentistes. La preuve par l’Autriche, où le conservateur Sebastian Kurz (ÖVP) propose une coalition avec les équivalents écologistes autrichiens, au détriment du FPÖ populiste, fragilisé par le scandale plus ou moins artificiel Strache, sortant opportunément à une semaine des élections européennes.

Sebastian Kurz, qui aux yeux de la droite nationale était devenu une référence, a montré son visage opportuniste, et après s’être allié avec un parti anti-immigration s’allie avec un parti qui y est favorable.

Italie.

Pas d’élections en vue pour Salvini. Le très médiatique dirigeant de la Lega, connu pour sa volonté d’empêcher les bâteaux de migrants de débarquer en Italie, succès médiatique cachant néanmoins un bilan contrasté, a mis fin à la coalition au pouvoir avec le M5S. Ce dernier, qui va en payer le prix dans les urnes, a alors retourné sa veste, plutôt que de soutenir de nouvelles élections, comme le souhaitait Salvini, en s’alliant avec le Parti Démocrate que le M5S dénonçait durement auparavant. Cet opportunisme sera puni et l’est déjà dans les différences élections provinciales.

Dans les sondages, la coalition de droite Lega/Fratelli d’Italia/Forza Italia dépasse désormais les 50%, et à côté de Salvini naît un phénomène Giorgia Meloni, la dirigeante de Fratelli d’Italia, que les sondages placent parfois à 12%.

Espagne.

Les socialistes minoritaires autour de Sanchez restent au pouvoir et préparent une alliance avec Podemos, la gauche radicale pourtant en recul. Symboliquement, Sanchez a fait déplacer la sépulture de Franco, réveillant les blessures de la guerre civile, et ce dans un contexte où Vox, parti national espagnol très hostile au séparatisme catalan, progresse avec autour de 15% des voix dans les différents sondages. La chute de Sanchez serait une excellente nouvelle, tout comme celle du nouveau gouvernement Conte en Italie d’ailleurs.

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Brexit.

Annoncé désormais pour la fin janvier 2020 à l’issue d’une élection parlementaire anticipée où le conservateur baroque Boris Johnson a enfin obtenu une majorité. S’ouvriront ensuite des mois voire des années de négociation dossier par dossier entre l’UE et le Royaume-Uni, mais sur le plan symbolique il ne fera plus partie de l’Union Européenne dans un petit mois. Johnson a obtenu in extremis de l’UE un « soft brexit » qui lui a permis d’organiser ces élections en bénéficiant aussi du rejet du candidat du Labour, Jeremy Corbyn, très contesté. Le Brexit Party, qui dénonçait l’accord comme celui d’un « faux brexit » a choisi de se sacrifier afin de faire gagner Johnson. Farage (UKIP) pourra donc retourner aux USA (comme en 2016) et bénéficiera sans doute, le comble pour un eurosceptique, d’une retraite de député européen d’une UE qu’il aura combattue et dont il se félicite que son pays le quitte.

En matière d’immigration post-coloniale issue de l’ancien empire, la situation restera inchangée ou s’aggravera. Ce brexit identitaire finira bien en brexit hyper-globaliste. Et ce « soft brexit » a rassuré les marchés internationaux.

Ailleurs en Europe.

En Grèce, Tsipras a été dégagé par la Nouvelle Démocratie en pleine renaissance. La droite radicale, divisée en deux formations rivales, résiste. Le procès contre l’une d’entre elles d’ailleurs est en train de tourner vers l’acquittement des mis en examen.

Au Portugal, une petite formation populiste (« Chega » pour dire « Assez ! ») a réussi à entrer au parlement mais avec 1,3% des voix. Dans le dernier sondage, il est crédité d’environ 3% des voix en cas d’élection anticipée.

Thomas FERRIER (Le Parti des Européens)

Vers un brexit hyper-globaliste ?

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Vers un brexit hyper-globaliste ?

par Thomas Ferrier

Ex: http://thomasferrier.hautetfort.com

Finalement, après trois ans de tergiversations, le brexit aura finalement lieu à la fin du mois de janvier 2020 sous la conduite de Boris Johnson, premier ministre sortant réélu triomphalement grâce à un mode de scrutin favorable à la tête du pays.

Winston Churchill en 1946 estimait que le slogan envisagé par les conservateurs de « Keep Britain white » (« conserver la Grande-Bretagne blanche ») était un bon slogan. Depuis Labour et Tories n’auront pas cessé d’ouvrir les portes du pays aux flux venus de l’ancien empire colonial pour que la Grande Bretagne le soit de moins en moins, et dès 1948 en changeant le code de la nationalité afin de faciliter les naturalisations. Mosley et Powell mirent en garde les Britanniques contre ce « changement de peuple » mais ne furent pas écoutés, tout comme Robinson ne l’est pas aujourd’hui, au prix même de sa liberté.

L’adhésion du Royaume-Uni à la CEE, qui allait ensuite devenir l’Union Européenne, fut complexe. C’est finalement en 1974, après le départ de De Gaulle qui s’opposait à son adhésion en 1969, qu’elle rejoint cette organisation en même temps que le Danemark et l’Irlande. Depuis cette époque, elle n’a jamais vraiment joué le jeu, Thatcher obtenant dès les années 80 de nombreux accommodements. C’est ainsi que le Royaume-Uni d’avant brexit n’avait pas l’euro et n’était même pas dans l’espace Schengen. Cela n’a jamais empêché la presse britannique depuis des décennies de taper sur l’Union Européenne et de l’accuser de tous les maux, alors même que les émeutes de 2010 ou le scandale de Rotherham ne lui doivent rien, mais doivent tout à la politique migratoire des gouvernements britanniques de gauche comme de droite.

Pris en otage depuis plusieurs années par l’aile fanatiquement eurosceptique des Tories et menacé dans sa réélection si ce courant renforçait le mouvement UKIP de Nigel Farage qui, en divisant la droite, pouvait faire gagner le Labour, David Cameron était résolu à marginaliser cette aile à l’issue d’un vote national. Pour ce faire, il prétendit renégocier un meilleur accord avec l’UE, comme Thatcher l’avait fait avant lui, et de le soumettre à un référendum, ce qu’elle s’était bien gardé de faire. Il affirma ensuite avoir obtenu des résultats mais personne n’est vraiment capable de dire ce qu’il avait obtenu. Il organisa donc un vote qu’il était persuadé de gagner.

Dans le camp du brexit, on retrouva naturellement Nigel Farage, à la tête de UKIP puis du Brexit Party lorsqu’il quitta le premier en l’accusant de dérives identitaires et d’islamophobie. Mais c’est Boris Johnson, conservateur et ancien maire de Londres, qui se présenta en champion du brexit, avec une bonne dose d’opportunisme et sur la base d’un pari politique audacieux, le même que Fabius en 2005 en France lorsqu’il appela à voter non au TCE mais avec le succès en plus. A grands coups de démagogie, en promettant tout et son contraire, y compris la préférence non-européenne dans les banlieues à forte composante indo-pakistanaise au détriment des Polonais, sans grand résultat malgré tout, et avec l’aide d’une presse efficace pour les relayer, le camp du brexit s'imposa et Cameron, perdant, dut démissionner et se faire oublier.

Il est vrai que le Labour avait fait une campagne a minima, l’attachement d’un Corbyn à l’UE étant quasi nul, et que Sadiq Khan, opposé au brexit, envoyait par hétérotélie un message globaliste à un électoral ouvrier britannique hostile.

De nombreux britanniques, mais pas tant que ça (51,6% d’entre eux), ont choisi l’aventure du brexit au maintien dans une Union Européenne dont personne n’avait été capable de démontrer les bienfaits et alors même que les dirigeants de l’actuelle UE se complaisent dans un globalisme béat. Il est évident que ce vote en faveur du brexit a exprimé une angoisse identitaire légitime, un refus clair du globalisme, et aussi de l’immigration, européenne comme non-européenne, une confusion salement entretenue par les eurosceptiques d’ailleurs.

Et donc le brexit ayant été voté, et même si un référendum au Royaume-Uni n’a pas force de loi, personne n’a osé braver l’interdit de ne pas en tenir compte et les Libéraux Démocrates qui firent campagne en décembre 2019 pour révoquer l’article 50 auront plus choqué que convaincu.

Une fois le brexit voté, sachant que personne n’avait été capable et pour cause d’expliquer ce qu’il serait, la peur d’un brexit dur (« hard brexit ») inquiéta les milieux d’affaires. Après plus de deux ans pendant lesquels Teresa May fut incapable d’obtenir une majorité en faveur d’un accord obtenu auprès de l’UE, Boris Johnson devint enfin premier ministre et s’engagea à un brexit coûte que coûte. Son bluff aurait pu lui coûter cher car le parlement l’avait contraint à demander une prolongation du délai en cas d’absence d’accord. Et il aurait alors dû sans doute démissionner et aurait été fragilisé médiatiquement. Mais l’Union Européenne, sous la pression du gouvernement français, Macron ayant annoncé qu’il voulait que le Royaume-Uni se décide enfin, offrit un accord au rabais au dernier moment à Johnson, qui s'en saisit.

Ce dernier put donc en position de force, avec une opinion lassée, se présenter devant les électeurs britanniques le 12 décembre 2019. Le pays reste coupé en deux (48% des Britanniques ont voté pour les conservateurs) et le Brexit Party a disparu. Alors même que Nigel Farage avait dénoncé un faux brexit obtenu par Johnson, son parti stratégiquement se plaça en soutien de ce dernier, gênant le Labour dans des circonscriptions décisives. Pour Farage, mieux valait un « very soft brexit » à pas de brexit du tout, même s’il ne devait être que nominal. C’est là qu’on constate ce qu’il fallait penser de ses convictions. On ne sera pas non plus étonné d’avoir vu Donald Trump participer à sa façon à l’élection en apportant son soutien à Johnson, en tapant sur l’Union Européenne et en promettant des accords juteux en cas de brexit effectif, une ingérence dénoncée mollement et en vain par l’opposition.

Et maintenant ? Johnson a plus ou moins promis de régulariser 500 000 clandestins présents depuis plus de cinq ans au Royaume-Uni. Celui qu’une certaine droite présente comme un patriote, ce qui a amené Robinson à rejoindre récemment les Tories, mais que même Rivarol ose qualifier de « globaliste », n’est évidemment qu’un remarquable opportuniste qui a réussi à devenir premier ministre en faisant un pari gagnant. Il n’est pas sans talent mais il ne sauvera pas le Royaume-Uni sur le plan identitaire. Lui qui se présente comme un nouveau Churchill a trahi bien sûr le souhait que ce dernier avait exprimé et que j’ai évoqué au tout début de cet article. Les flux intra-européens vont se réduire en raison des tracasseries administratives, tandis que les flux post-coloniaux se renforceront.

C’est bien à un brexit globaliste que nous allons assister, et l’indépendance prétendue ne sera qu’un renforcement de la vassalité atlantiste. Certes sur le plan économique, ce sera un brexit très mou et surtout symbolique. Il ne devrait donc pas y avoir de conséquences dramatiques et d’ailleurs la presse européenne ne semble plus du tout inquiète, surtout qu’un accord véritable de mise en œuvre mettra plusieurs années à voir le jour. Les électeurs voulaient une identité britannique restaurée et ils auront une aliénation renforcée.

Thomas FERRIER (Le Parti des Européens)

lundi, 30 décembre 2019

Le royaume déglingué

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Le royaume déglingué

par Georges FELTIN-TRACOL

Ex: http://www.europemaxima.com

Les élections législatives anticipées de ce 12 décembre marquent un tournant majeur dans l’histoire du Royaume-Uni. Offrant volontiers aux médiats et à ses détracteurs une image de bouffon provocateur, le Premier ministre Boris Johnson, excellemment conseillé par le redoutable stratège en communication politique, Dominic Cummings, a réussi son pari et bénéficie désormais d’une légitimité incontestable sortie des urnes après avoir conquis à la hussarde le vieux Parti conservateur.

Celui-ci connaît pour la circonstance son plus grand succès depuis 1987. Il s’empare de quarante-huit nouvelles circonscriptions dont de nombreuses issues du « Mur rouge » du Nord de l’Angleterre traditionnellement acquises aux travaillistes. « BoJo » dispose dorénavant d’une écrasante majorité absolue (365 sièges sur 650). Il va pouvoir réaliser le Brexit, mais va-t-il aussi transformer la Grande-Bretagne en une copie occidentalisée d’un Singapour mondialisé ? Pas forcément quand on sait que les nouveaux électeurs « bleus » sont d’anciens travaillistes Brexiters tout autant préoccupés par l’insécurité galopante que par une immigration croissante, y compris venue du Commonwealth.

Ce scrutin fait trois victimes principales sans compter les frondeurs conservateurs anti-Johnson qui subissent de graves revers. En 2017, le Labour du sympathique Jeremy Corbyn dont les idées politiques, sociales et économiques n’ont jamais varié, avait augmenté son audience de trente élus. Cette fois-ci, malgré un programme ouvertement populiste de gauche malheureusement entaché par de néfastes considérations multiculturalistes et sociétalistes, les travaillistes perdent le double dont des bastions historiques jugés imprenables. Cette incontestable défaite attise les règlements de comptes entre l’aile gauche dirigeante et son opposition sociale-libérale d’origine blairiste. Les semaines à venir seront saignantes pour ce parti de gauche qui, à l’instar de ses homologues allemand, français, belge et autrichien, poursuit son inexorable déclin.

Europhiles convaincus et favorables à l’arrêt immédiat du Brexit sans même recourir à un nouveau référendum, les centristes libéraux-démocrates se ramassent une belle déculotté et régressent d’un siège, celui de leur présidente, l’Écossaise Jo Swinson. Soutenus par les milieux d’affaires de la City, les « Lib-Dem » n’ont pas convaincu, ce qui est une bonne nouvelle. L’Ulster connaît à son tour une révolution silencieuse. Force d’appoint indispensable aux précédents gouvernements minoritaires tories, les unionistes du DUP reculent de deux sièges et n’envoient plus que huit élus. On observe pour la première fois que le Sinn Fein, le Parti social-démocrate et travailliste et les centristes du Parti de l’Alliance s’adjugent les dix autres sièges. Ce vote confirme la montée en puissance de la population catholique. L’Irlande du Nord risque de devenir un point d’achoppement sérieux dans les prochaines années, parallèlement au retour de la brûlante question écossaise.

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Avec 48 sièges, le SNP ne renouvelle pas son triomphe de 2015 (56 sièges alors), mais le parti indépendantiste gagne néanmoins treize élus supplémentaires. Force prépondérante au-delà du Mur d’Hadrien, il constitue plus que jamais le troisième groupe parlementaire de Westminster. En Écosse, les tories arrivent en tête dans six circonscriptions, les « Lib-Dem » dans quatre et un seul élu pour le Labour longtemps hégémonique. Le regain de l’indépendantisme écossais qui coïncide avec le maintien de l’autonomisme gallois (le Plaid Cymru conserve ses quatre sièges) répond à la nette anglicisation du Parti conservateur. En phagocytant les formations nationalistes (le Parti du Brexit de Nigel Farage fait 2 %, UKIP 0,1 % et le BNP 0,0 %), les conservateurs portent le mécontentement de l’opinion publique anglaise tandis que les formations régionalistes anglaises telles que le Parti du Yorkshire, les Indépendants d’Ashfield ou le Parti pour les Cornouailles ne récoltent que des miettes inférieures à 0,1 % des suffrages. L’« Angleterre périphérique » rurale et sub-urbaine s’élève contre les différentes dévolutions (autonomies administratives) octroyées à l’Écosse, au Pays de Galles, à l’Irlande du Nord et à Londres. Elle réclame sa propre dévolution régionale et se détourne d’une capitale plus que jamais fief d’un travaillisme cosmopolite et globalitaire. Le Parti conservateur correspond donc de facto à la partie visible d’un puissant mouvement de fond nationaliste anglais pan-britannique.

Boris Johnson se retrouve donc à la tête d’un État en proie à des forces centrifuges réelles et tangibles. Loin d’atténuer les tensions territoriales, le Brexit va les accentuer au moment où le garant séculaire de l’unité, la monarchie, traverse une période difficile. Bon pied bon œil, Sa Gracieuse Majesté va néanmoins sur ses 94 ans. Son fils, le prince de Galles, assure dans les faits la régence alors que la famille royale affronte deux secousses comparables au décès de Lady Di. D’une part, le fils préféré de la souveraine, Andrew, grand pote du financier pédophile Jeffrey Epstein, a montré toute sa désinvolture au cours d’un entretien télévisé sur un sujet sensible pour des Britanniques déjà horrifiés par les scandales parlementaires et l’impunité manifeste du prédateur sexuel Jimmy Savile. D’autre part, le jeune couple princier Meghan et Harry envisagerait de s’installer outre-Atlantique, ce qui constituerait un véritable affront pour la « Firme » de Buckingham Palace.

Pour l’heure, bien que fragmentée, l’unité britannique perdure par déférence envers la reine Elizabeth II. Or sitôt celle-ci disparue, son successeur ne fera pas autant l’unanimité, bien au contraire. Telle une autre Autriche – Hongrie, le Royaume-Uni de Charles, voire de Guillaume, pourrait éventuellement exploser.

Bonjour chez vous, et passez de très bonnes fêtes !

Georges Feltin-Tracol

• « Chronique hebdomadaire du Village planétaire », n° 153, mise en ligne sur TV Libertés, le 23 décembre 2019.

vendredi, 27 décembre 2019

Nouvelle menace américaine sur la souveraineté européenne

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Nouvelle menace américaine sur la souveraineté européenne

Par Pascal Boniface (revue de presse : pascalboniface.com – 23/12/19)*

Ex: http://www.france-irak-actualite.com

Le président Donald Trump vient de prendre un décret présidentiel appelant à geler les avoirs des compagnies engagées dans la construction du pipeline Nord Stream 2 permettant d’exporter du gaz russe en Europe via la mer Baltique. Il s’agit donc, de la part des États-Unis, de menaces de sanctions lourdes à l’encontre de sociétés non américaines, pour des opérations menées en dehors du territoire américain. C’est tout le « charme » du caractère extraterritorial de la législation américaine : une loi décidée en fonction des intérêts américains peut avoir des effets à l’échelle mondiale.

Aussitôt, la compagnie suisse Allseas stoppait ses travaux et l’avenir du gazoduc semblait compromis. L’ensemble des sociétés de taille à être investies sur ce chantier ont des activités aux États-Unis et la crainte de sanctions les tétanise donc. Deux sénateurs américains, Ted Cruz et Ron Johnson, avaient averti le PDG d’Allseas d’arrêter immédiatement et de laisser le pipeline inachevé, l’alarmant que si l’entreprise essayait de façon insensée de le terminer, il prendrait le risque de mettre sa compagnie en faillite.

La dollarisation de l’économie internationale et l’affirmation de la législation extraterritoriale des États-Unis rendent crédible cette menace. Bien avant l’élection Donald Trump, de nombreuses compagnies européennes ont été condamnées à de lourdes amendes, avoisinant au bas mot, sur les 10 dernières années, 40 milliards de dollars. On se rappelle que la BNP (sous le mandat de Barack Obama) avait été condamnée à une amende de 9 milliards de dollars pour être intervenue au Soudan et en Iran.

Cette décision est motivée en apparence par la volonté de ne pas renforcer la Russie coupable d’avoir annexé la Crimée. La Russie, qui dépend toujours aux 2/3 de l’exportation de matières premières énergétiques pour se procurer des devises, en est en effet la première victime. Mais l’Allemagne, qui devait recevoir principalement ce gaz, est également impactée. La chancelière Merkel a dénoncé une interférence dans les affaires intérieures allemandes. Mais ira-t-elle au-delà de cette protestation verbale ?

Le pipeline Nord Stream 2 évite stratégiquement les pays baltes, la Pologne et l’Ukraine, pays très proaméricain. L’ambassadeur américain en Allemagne n’a pas hésité à présenter cette mesure comme pro-européenne, puisqu’il s’agit de refléter les inquiétudes de ces pays. Derrière cette décision se cache surtout une volonté américaine de pouvoir plus facilement exporter son pétrole et son gaz de schiste, pourtant plus cher que le gaz russe.

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Les États-Unis utilisent donc la menace de sanctions pour faire avancer leurs intérêts économiques. Et surtout pour imposer leurs décisions et priver les autres pays, aussi bien rivaux qu’alliés, de pouvoir prendre souverainement les leurs. Après l’interdiction d’acheter du pétrole à l’Iran, les menaces par rapport aux investissements à Cuba, c’est une nouvelle atteinte fondamentale à la souveraineté des pays européens. Il y a une très grande contradiction entre le fait d’appartenir à la même alliance et d’être aussi peu considérés par le leader du principal pays de l’alliance. Aucun pays ne porte plus atteinte à la souveraineté des pays européens que leur allié américain aujourd’hui. Combien de temps les pays européens vont-ils accepter cela ?

Les Américains reprennent en fait à leur compte le principe de « souveraineté limitée », forgé par Brejnev en 1968 à propos de la Tchécoslovaquie en particulier, et des pays du Pacte de Varsovie en général. Emmanuel Macron avait déclaré que l’OTAN était atteinte de « mort cérébrale ». C’était en fait une vision optimiste. L’OTAN est toujours bel et bien vivante, voire même très contraignante, mais elle ne joue plus le rôle de protecteur par les États-Unis des Européens. Elle joue le rôle de castrateur stratégique des ambitions européennes. Il est vraiment temps pour les Européens de sortir du somnambulisme stratégique qui les conduit à ne pas s’opposer aux Américains en échange d’une protection face à une menace hier soviétique réellement existante, aujourd’hui russe, gonflée artificiellement, pour maintenir leur imperium sur les Européens.

Pascal Boniface est politologue, fondateur et directeur de l'Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS)

*Source : pascalboniface.com

mardi, 24 décembre 2019

Sanctions américaines contre le gaz russe pour l’Europe

Vous pourrez voir et apprendre deux choses dans cet article de l’agence russe sputnik. D’abord que les Américains sont en guerre « économique » contre les gazoducs que la Russie tente de construire pour alimenter l’Europe.

La raison est simple. C’est une bataille pour l’énergie. Et l’Europe est un marché pour les gaz des schistes américains. Logiquement pour livrer le gaz américain, qui est plus cher, il faut faire en sorte de le rendre « rentable »… pour cela rien de mieux que de mettre des bâtons dans les roues de la Russie et la mettre dans l’impossibilité de livrer. Ils sont aimables nos amis les « zaméricains » surtout si on leur obéit bien.

Et justement à propos d’obéissance, cela nous amène à la deuxième chose que vous allez apprendre, ou ré-apprendre car vous avez déjà du croiser cette information, à savoir que le budget de la Défense pour l’année fiscale 2020, a éré voté par le Sénat américain au niveau de 738 milliards de dollars (soit plus de 660 milliards d’euros) !!

Oui je ne vous cache pas que si l’on utilisait qu’une seule année budgétaire de la défense américaine, il y aurait de quoi développer l’Afrique ou éradiquer la faim dans le monde, mais jouer avec des porte-avions c’est nettement plus rigolo, de même que bombarder à droite ou à gauche.

Cela en fait des sous n’est-ce pas !

Charles SANNAT

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«Le meilleur cadeau de Noël»: la société gazière ukrainienne se réjouit des sanctions US contre Nord Stream 2

Les nouvelles sanctions américaines contre les gazoducs Nord Stream 2 et Turkish Stream sont entrées en vigueur, et la compagnie suisse Allseas, engagée par le russe Gazprom, a suspendu ses travaux. Le PDG de la société gazière ukrainienne Naftogaz, Andreï Kobolev, s’en est félicité sur sa page Facebook.

Donald Trump a signé vendredi 20 décembre un décret promulguant la loi sur le budget Défense pour l’année fiscale 2020, texte qui comprend l’instauration de sanctions contre les entreprises associées à la construction du gazoduc Nord Stream 2. Engagée par le russe Gazprom, la société suisse Allseas a déclaré avoir suspendu ses travaux, dans l’attente d’explications de la part de Washington sur la mise en application des sanctions évoquées.

«C’est le meilleur cadeau de Noël pour nous tous», a écrit sur sa page Facebook Andreï Kobolev, PDG de Naftogaz Ukrainy, en y ajoutant des captures d’écran de la signature par le Président des États-Unis du budget Défense américain 2020 ainsi que du communiqué d’Allseas.
Sanctions contre Nord Stream 2 et aide militaire à l’Ukraine vont de pair?
Le 17 décembre, le Sénat américain avait voté le budget Défense pour l’année fiscale 2020, au niveau de 738 milliards de dollars (soit plus de 660 milliards d’euros). Les sanctions contre le gazoduc Nord Stream 2 et une aide militaire à l’Ukraine font partie des sommes prévues.

Le gouvernement allemand s’est élevé contre les sanctions américaines visant Nord Stream 2, tout comme la France

Source Agence russe Sputnik.com ici

La stratégie US et ce que nous coûte la guerre des gazoducs

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La stratégie US et ce que nous coûte la guerre des gazoducs

par Manlio Dinucci

Ex: http://www.zejournal.mobi

 
 

Après avoir interdit de laisser le Chinois Huawei concourir aux appels d’offres pour la 5G, les États-Unis interdisent aux Européens d’accroitre leur approvisionnement en gaz russe. Si la première décision visait à maintenir la cohérence de l’Otan, la seconde ressort non pas d’une russophobie, mais de la « doctrine Wolfowitz » de 1992 : ne pas laisser l’UE devenir un compétiteur de « l’Empire américain ». Dans les deux cas, il s’agit d’infantiliser l’UE et de maintenir en situation de dépendance.

Alors qu’ils se battent dans un dur affrontement pour destituer le président Trump, Républicains et Démocrates déposent les armes pour voter au Sénat presque à l’unanimité l’imposition de lourdes sanctions contre les sociétés participant à la réalisation du North Stream 2, le doublement du gazoduc qui à travers la Baltique apporte le gaz russe en Allemagne. Sont touchées les sociétés européennes qui participent au projet de 11 milliards de dollars, désormais réalisé presque à 80 %, avec la société russe Gazprom, l’Autrichienne Omy, la Britannico-hollandaise Royal Dutch Shell, la Française Engie, les Allemandes Uniper et Wintershall, l’Italienne Saipem et la Suisse Allseas qui prennent part à la pose des conduites.

Le doublement du North Stream augmente la dépendance de l’Europe au gaz russe, avertissent les États-Unis. Ils sont surtout préoccupés par le fait que le gazoduc —en traversant la mer Baltique dans des eaux russes, finlandaises, suédoises et allemandes— contourne les Pays de Visegard (République Tchèque, Slovaquie, Pologne et Hongrie), les États baltes et l’Ukraine, c’est-à-dire les pays européens les plus liés à Washington par l’OTan (auxquels s’ajoute l’Italie).

La mise pour les États-Unis, plus qu’économique, est stratégique. Ce que con-firme le fait que les sanctions sur le North Stream 2 font partie du National Defense Authorization Act, l’acte législatif qui pour l’année fiscale 2020 fournit au Pentagone, pour de nouvelles guerres et nouvelles armes (y compris spatiales), la colossale somme de 738 milliards de dollars, auquel s’ajoutent d’autres postes portant la dépense militaire états-unienne à environ 1 000 milliards de dollars. Les sanctions économiques sur le North Stream 2 s’insèrent dans l’escalade politico-militaire contre la Russie.

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Une confirmation ultérieure se trouve dans le fait que le Congrès US a établi des sanctions non seulement contre le North Stream 2 mais aussi contre le Turk-Stream qui, en phase finale de réalisation, va apporter du gaz russe à travers la mer Noire jusqu’en Thrace orientale, la petite partie européenne de la Turquie. De là, par un autre gazoduc, le gaz russe devrait arriver en Bulgarie, en Serbie et dans d’autres pays européens. C’est la riposte russe au coup porté par les États-Unis, qui en 2014 réussirent à bloquer le gazoduc South Stream. Celui-ci aurait dû relier la Russie à l’Italie à travers la mer Noire et par la terre jusqu’à Tarvisio (Udine). L’Italie serait ainsi devenue une plate-forme d’aiguillage du gaz dans l’UE, avec de notables avantages économiques. L’administration Obama réussit à faire échouer le projet, avec la collaboration de l’Union européenne même.

La société Saipem (Groupe italien Eni), touchée à nouveau par les sanctions états-uniennes sur le North Stream 2, fut déjà lourdement touchée par le blocage du South Stream : elle perdit en 2014 des contrats d’une valeur de 2,4 milliards d’euros, auxquels se seraient ajoutés d’autres contrats si le projet avait continué. Mais personne à l’époque, ni en Italie ni dans l’UE, ne protesta contre l’enterrement du projet opéré par les États-Unis. Maintenant que sont en jeu les intérêts allemands, s’élèvent en Allemagne et dans l’Ue des voix critiques sur les sanctions US contre le North Stream 2.

On ne dit rien par contre sur le fait que l’Union européenne s’est engagée à importer des USA du gaz naturel liquéfié (GNL), extrait de schistes bitumineux par la destructrice technique de fracturation hydraulique. Washington, pour frapper la Russie, essaie de réduire son exportation de gaz vers l’UE, faisant payer les coûts aux consommateurs européens. Depuis que le président Donald Trump et le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker ont signé à Washington en juillet 2018 la Déclaration conjointe sur la coopération stratégique USA-UE y compris le secteur énergétique, l’UE a doublé l’importation de GNL des USA, co-finançant les infrastructures avec une dépense spéciale initiale de 656 millions d’euros. Cela n’a cependant pas sauvé les sociétés européennes des sanctions USA.

Photo d'illustration: La chancelière allemande Angela Merkel et son ministre de l’Économie, Olaf Scholz, ont immédiatement dénoncé l’ingérence états-unienne.

Traduction Marie-Ange Patrizio

lundi, 23 décembre 2019

Le sommet musulman de Kuala Lumpur (Malaisie)

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Le sommet musulman de Kuala Lumpur (Malaisie)

par Jean-Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

Ce sommet, du 19 au 21 décembre, a réuni des représentants, non seulement de la Malaisie mais de la Turquie, de l'Iran et du Qatar. Supposé rechercher le rassemblement mondial du monde musulman, il a surtout montré que celui-ci se divise actuellement en deux blocs.
 
Ont participé personnellement au sommet le président iranien Hassan Rohani, l'émir du Qatar cheikh Tamim, le président turc Recep Tayyip Erdogan et bien entendu le premier ministre malaisien Mahathir Mohammad, tous à des titres divers opposés à l'Arabie saoudite. L'absence de celle-ci , bien que prévisible, a été très remarquée. Il faut rappeler que les alliés de l'Arabie saoudite regroupent la plupart des autres pays pays arabes, du Maghreb au Golfe Persique. La plupart d'entre eux, bien qu'invités n'étaient pas présents à Kuala Lumpur

L'Organisation de la Coopération Islamique (OCI), basée dans le port saoudien de Djeddah et généralement considérée comme la voix du monde islamique, a vivement critiqué la tenue de ce sommet. Elle a surtout exprimé en l'espèce la voix de l'Arabie saoudite. Le sommet de Kuala Lumpur a en effet été, que ce soit dans le monde arabe ou dans les pays occidentaux, considéré comme anti-saoudien.

Dans son discours d'ouverture, le premier ministre malaisien Mahathir Mohammad a annoncé que le sommet visait à comprendre pourquoi l'islam et les pays musulmans étaient «en crise, sans espoir et indigne de cette grande religion». Mais d'emblée il est apparu que les pays musulmans resteraient divisés entre ceux de plus en plus proches de la Russie, à commencer par la Turquie et l'Iran, et ceux qui comme l'Arabie saoudite, restent malgré quelques dissensions de bons allées des Etats-Unis.

Cette division marque aussi l'incapacité de l'islam sunnite de s'entendre avec l'islam chiite, non seulement sur le plan religieux, mais dans de domaine géopolitique. La encore, on retrouve le poids de l'Arabie saoudite dont l'influence dans le monde tient à l'importance de ses réserves en pétrole et en gaz, au contraire des autres pays musulmans, à l'exception de l'Iran. Mais l'Iran, soumise aux sanctions américaines, peine à exporter son pétrole dans les pays arabes qui en auraient le plus grand besoin.

Le premier ministre iranien Hassan Rohani a dénoncé «la domination du dollar américain et du système financier américain». Le premier ministre turc Erdogan a confirmé qu'au lieu de commercer avec des devises étrangères, les pays arabes souhaiteraient commercer commercer avec des devises nationales. Ni l'un ni l'autre ne l'ont dit explicitement, mais cela signifierait pour eux s'affranchir de la domination américaine. Ce que l'Arabie saoudite est encore incapable de faire. 

Note

Pour plus de détails, voir un article de Hasan Alhasan dans Asia Times
https://www.asiatimes.com/2019/12/opinion/kuala-lumpur-summit-points-to-split-in-muslim-world/

Voir également MK Bhadrakumar
https://www.asiatimes.com/2019/12/article/kl-summit-shaken-by-imrans-absence-saudi-ire/

 

 

dimanche, 22 décembre 2019

Nouvelles routes de la soie, « La ceinture et la route »

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Nouvelles routes de la soie, « La ceinture et la route »

Intervention  de François-Bernard Huyghe à la 3° session du forum sur les enjeux technologiques des nouvelles routes de la soie  (19 décembre 2019,  Unesco)
 
Ex: http://www.huyghe.fr
 
D’une route l’autre : un étonnement de vingt-deux siècles

Pour parler des relations « technologiques » entre la Chine et l’Europe, il faudrait sans doute remonter avant notre ère, à l’ouverture historique de la route de la soie. L’Occident découvre alors un produit à la fois
- - hautement désirable (la vogue de la soie perturbe l’économie romaine dès avant l’ère chrétienne),
- - lié au secret (dans la mesure où les acheteurs finaux ne savent ni comment elle est fabriquée, ni comment atteindre directement le pays d’origine)
- - et dont l’exportation a été décidée- par l’Empire dans une stratégie de souveraineté.

Dans l’imaginaire, la Chine devient le pays des Sères (de la soie), mais l’itinéraire (par des pistes caravanières avec de rares abris ou par mer, de port en port et de cale en cale) est long, fractionné et aléatoire et l’information authentique se perd souvent en chemin. Ou laisse place à des légendes.
 

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Ces relations sont marquées pendant des siècles par une quasi ignorance (les choses circulent mieux que les connaissances), mais aussi par un rapport culturel ambigu. Ainsi, au fil des siècles, l’Europe s’étonnera à la fois de l’inventivité technologique de l’Empire, du fait que la maîtrise de techniques (comme l’imprimerie, la poudre ou la boussole) ne produisent pas les mêmes effets et ne débouchent pas sur l’équivalent de la Renaissance ou des grandes explorations. Ou encore de la faculté que possède l’Empire de se fermer brusquement au monde en dépit de sa capacité de l’explorer (comme après l’expédition de Zeng-He en 1433).

Ces trois questions que les Européens se sont posées pendant des siècles - technicité, territorialité et autorité: Comment ? D’où ou par où ? Et selon quelle norme ? - reviennent sous des formes très contemporaines. Comme celle d’une «ceinture économique de la route de la soie» («Silk Road Economic Belt», devenue la «Belt and Road Initiative», BRI).

Le projet des nouvelles routes de la soie vise à développer les infrastructures physiques (des routes, des rails, des tuyaux, des ports, etc.), retraçant et prolongeant les routes maritimes et terrestres séculaires des marchandises. Il nous interroge à neuf sur le rapport entre circulation des choses et des informations, mais aussi sur la relation de l’État avec l’économie. Nous parlons ici de la capacité qu’a Pékin de conserver à la fois ses frontières et de se projeter dans un temps long.

Lancé à un rythme étonnant après un discours de Xi Jinping en 2013, mais se projetant sur plusieurs décennies, le projet bientôt inscrit dans la constitution du parti prend valeur de proclamation solenelle d’une ère d’ouverture et d’accélération. Les moyens suivent : l’adjectif qui revient le plus souvent est celui de « pharaonique » pour désigner des budgets de milliards par an.

Évidemment c’est le caractère unidirectionnel de cette circulation (produits manufacturés, capitaux, transferts monétaires, entreprises mobilisées) qui fait problème. Il suscite une crainte du déséquilibre en termes de puissance et d’influence. D’où des réticences, notamment d’E. Macron, face à une « nouvelle hégémonie ». L’Europe se partage plutôt sur un axe Nord/Sud face au projet des Nouvelles Routes, tandis que s’affirme une contre stratégie américaine, puissance maritime s’inquiétant d’une puissance continentale qui la concurrence au-delà de ce qui était imaginable.

On mesurera aussi en cette occasion comment le politique peut utiliser l’obstacle des normes, l’argument de sécurité et confidentialité, les impératifs écologiques, etc., pour contrôler une montée en puissance politique et économique à la fois.
Vue de l’ouest ou vues de l’est, ces routes témoignent que nous nous sommes trop vite crus libérés des contraintes de la matérialité (l’économie ce sont d’abord des choses qui circulent et qui demandent des voies et des vecteurs) mais nous avons aussi cru trop tôt qu’un modèle technoéconomique unique s’imposait sans que les Nations puissent faire autre chose qu’accélérer ou retarder l’inévitable.
 

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Parallèlement, la façon dont la Chine est devenue une cyberpuissance fut une autre surprise historique. La numérisation du pays montre aussi comment l’État peut
- favoriser l’émergence d’équivalents des GAFAM, mais sans leur accorder d’autonomie géopolitique,
- se protéger des influences extérieures, notamment derrière sa « grande muraille de feu » (un dispositif logiciel qui lui permet de s’isoler comme un Intranet mais à l’échelle de la première population du monde),
- redéfinir les règles de la cyberstratégie internationale, etc.

Le tout concrétise la maîtrise chinoise dans les trois couches du cyberespace, physique (serveurs, câbles, stockage), logique ou logicielle (non dépendance des algorithmes, normes et plateformes made in USA) et enfin sémantique (au sens du contenu des messages accessibles à sa population).

Sans compter le démenti apporté à la thèse qui prédisait que l’Internet menait irréversiblement, sinon vers un cyberespace émancipé du politique, du moins vers l’adoption d’un régime à l’occidentale ou de ses valeurs culturelles. La Chine n’a pas imité le modèle « californien» cher à la Silicon Valley, ni son type de start-up et son mode de conquête des marchés. En cherchant l’explication technique d’un rattrapage surprenant, mais avec d’autres codes, on constate une adaptation culturelle du capitalisme chinois high tech, des rapports étroits avec l’autorité politique, l’exploitation des effets d’échelle (notamment du plus grand gisement de données potentiel de la planète), l’évolution culturelle de la population, l’hyperréactivité au programme étatique d’innovation systématique, l’intégration des services numériques aux modes de vie...

Là aussi se pose la question des supports et infrastructures. Ainsi dans le domaine de la 5G où l’avance de Huawei suscite des réactions à l’énormité de ses investissements en recherche et à ses ambitions. Mais aussi à des soupçons de cyberespionnage. On voit ainsi la Chine protéger à la fois sa « muraille » (en conservant ses données, en se préservant du pouvoir des GAFAM, en contrôlant les contenus) et exporter ses matériels et réseaux. Toujours le va-et-vient entre la connaissance numérique (des données qui peuvent être dérobées ou protégées, des inventions qui peuvent être reproduites) et le support ou le dispositif physique.

D’où les tenttives d’exclusion de leurs marchés de pays se réclamant pourtant du libéralisme : le politique (USA, Australie, Allemagne) redevient interventionnistes lorsqu’il s’agit de protéger son économie d’une influence qui passerait aussi par les infrastructures numériques. Voir l’obligation faite aux appareils Huawei de se passer de la technologie Android Google. La perspective que les écosystèmes numériques puissent littéralement divorcer et se séparer, chose impensable il y a trois ans, s’impose.

Sans doute en réponse, en Chine, une directive gouvernementale dite « 3-5-2 » joue l’autarcie technologique à long terme : elle exige le remplacement des matériels et logiciels informatiques dans l’administration. Ce qui représente un marché gigantesque. Dans le contexte de ce que l’on a surnommé la balkanisation d’Internet, il faut renoncer à la notion que la technologie est sans frontières et le politique impuissant.

La Chine dans le cadre d’un plan « Made in China 2025 » prévoit de relancer largement l’industrie par des investissements publics dans la recherche et de s’émanciper de plus en plus de la technologie étrangère. Mais aussi d’être un grand pays maritime, en pointe dans l’espace, grand exportateur, etc. Cela fait le lien avec sa défense par une éventuelle « guerre des intelligences » qui exploiterait militairement les technologies sophistiquées émergentes (dans le prolongement de la « guerre hors limites » théorisée dès les années 90). Mais en même temps la coopération civilo-militaire, public-privé,central-régional contribue à l’objectif de faire de la Chine un pays qui investit énormément dans la recherche de pointe...

Enfin, l’Intelligence Artificielle (nous aurions aussi bien pu parler de l’espace, des drones, des robots, des objets connectés etc., tout étant lié) est un domaine où s’est engagée une autre course Chine / USA. Il révèle aussi le rapport entre ambition géopolitique et technologie. Suivant la version la plus souvent rapportée, après la défaire du plus grand maître de Go face à un algorithme en 2016, la Chine aurait décidé d’emporter la compétition plus générale pour l’IA.Et notamment dans le domaine de l’IA dite perceptive (qui reconnaît des visages, des mots, un environnement) ou de son intégration aux usages quotidiens.
Là encore il y a des explications à chercher dans le pragmatisme, dans l’échelle de la mutation, dans l’acceptation de la population, dans les interactions entre le pouvoir politique et l’économie...
Tout ceci confère un avantage, si l’on admet qu’à ce stade, les deux principales fonctions de l’IA sont d’imiter ou de remplacer le comportement humain (par un calcul plus complet et des instructions plus adaptées) mais aussi d’anticiper ledit comportement et les interactions avec l’environnement pour une meilleure gestion de notre activité. Éventuellement couplée à des objets connectés ou dispositifs, l’IA devient capable non seulement de présenter la meilleure solution en fonction des règles préétablies, mais aussi de s’adapter à chaque situation et de la modifier.

Là encore, l’IA chinoise est partie tard, mais aussi sans avoir connu les « hivers », les phases de blocage de la recherche (et son financement) depuis les années 50. Elle ambitionne de devenir la première au monde à l’horizon de quelques décennies.
Ce processus repose sur la synergie entre l’autorité politique et les milieux économiques et universitaires, sur l’échelle de la population qui permet l’exploitation de toute innovation mais aussi sur le contrôle de la population. Ainsi le système dit de crédit social, basé sur l’omniprésence des systèmes de surveillance. En attendant en 2020 le crédit social « corporate » pour les entreprises.

Le hardware et le soft, la route et la muraille, le numérique et le tangible, la souveraineté et le négoce, la copie et l’invention... tout nous semble reposer sur des équilibres et des contrôles, dont rien ne garantit d’ailleurs qu’ils dureront éternellement. Ni qu’ils soient adaptables chez nous ou que de soit souhaitable. Mais qui enseignent au moins aux Européens que l’absence de volontarisme politique et la confiance dans les mécanismes technoéconomiques étaient des erreurs.

samedi, 21 décembre 2019

The Real Code of Putinism

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The Real Code of Putinism

Ex: https://www.americanthinker.com

Today's Russia is in the most critical stage of its ideological design.  Its beginning was laid in the article by Vladislav Surkov (aide to the Russian president) under the symbolic title "Long-lasting state of Putin."  The piece was widely discussed by the expert community in Russia and abroad.  Many took this article as a signal that Putin was not going to leave after his presidential term's expiration in 2024 and was preparing his domestic public and international community for this through his éminence grise (as Surkov is often called).  However, with a detailed analysis of the processes that occur in modern Russia, one can come to deeper conclusions.

Vladimir Putin has ruled the country since 2000, and over these 19 years, influence groups around him have been fighting each other for a special position and status.  Unlike most of his associates, Putin is indeed an ideologically motivated leader who perceives himself not just as a politician and an official, but as a sovereign, such as Peter the Great and Alexander III — the beloved emperors of the current Russian leader.

Being aware of the internal construction of Putin's philosophical vision, various people were trying to form an ideological concept that would reflect the mission and goals of modern Russia.  Some wrote about the idea of a "special civilizational path."  It suggested that Moscow would not copy the Western model of development and would not declare itself a part of the Asian world as well.  Others sought to revive the long-forgotten formula "Moscow as the Third Rome" that in fact declared Russia the heir to the fallen Byzantine Empire.  Some suggested a consensus option to combine Western and Eastern civilization codes.  Undoubtedly, there are also groups that do not consider having any ideology important; they offer to copy certain points of the most successful government projects around the world.  However, there is no question of whether Russia needs an ideology or not because Putin is absolutely convinced of the vital necessity of its existence.

There are several reasons for this approach.  Firstly, the president understands that this is about his legacy.  For a psychological type of leader like Putin, the way history remembers him is crucial.  And it is not about love and admiration of the generations to come.  It is difficult to find a politician in Russian and world historiography who could be given an unambiguous assessment.  Discussions continue about everyone without exception, from Alexander the Great to Ronald Reagan.  The key fact is the transformation when a mortal politician becomes an immortal image and an object of constant study for future generations.  Secondly, the Russian leader is convinced that people who were born and raised in independent Russia should have clear guidelines in order to at least preserve the integrity of the country.  So far, Vladislav Surkov was the one who truly managed to systemize the views and ideas of the president.  Putin's aide divided the history of Russian statehood into four parts: the Rus' of Ivan the Third, the Russian Empire of Peter the Great, the Soviet Union of Vladimir Lenin, and the Russia of Vladimir Putin.

The new ideology that is called Putinism is uniting principles and foundations that have remained unchanged throughout all the historical stages of the development of Russia.  Its foundation is the concept of National Democracy.  It implies that the process of democratization and the formation of an active civil society is inevitable but it should not be carried out according to any foreign model.  The Russian nation, like any other, has its civilizational, social, and cultural features.  Today, 190 peoples live in Russia, and most of them retain their language, traditions, and mentality.  From this point of view, Moscow is always under the permanent threat of external forces using any interethnic disagreements for their purposes.  If, for example, a political decision was made to allow same-sex "marriage" in the deeply conservative regions of the North Caucasus, Tatarstan, and Siberia, riots would begin.  And they would lead to the most unpredictable consequences.  For a large part of the progressive West, this may sound wild.  Yet for Russia, it is a matter of national security.

 

It is important to understand that Russia is not limited to Moscow or Saint Petersburg.  These cities, like any major megalopolises, are centers of the dominance of progressive and liberal ideas.  No one will argue with the fact that the United States does not begin and end in New York and California; there are also Texas, Tennessee, Utah, and other states.  The victory of Donald Trump vividly demonstrated that it was conditional Texas and Kentucky that were the heart of America, not Massachusetts and Rhode Island.  The situation is similar in Russia: Putin is guided by the mood of the regional majority, not the liberal minority of the capital.  There are a lot of sensitive problems, and any Russian ruler has to maintain internal balance in order to keep the country's physical integrity.  This is an extremely difficult task.  At certain periods of time, Emperor Nicholas II, and then the last general secretary of the Central Committee of the CPSU, Mikhail Gorbachev, did not cope with this task.  This resulted in the collapse of the Russian Empire and the USSR, respectively.  Thus, the essence of Sovereign or National Democracy is in a banal formula: everything has its time.  In other words, Putinism advocates an evolutionary rather than a revolutionary model of development.

The next crucial element is the inviolability of the mission to maintain territorial integrity.  Why is this so important to Putin?  The answer lies in the dynamics of extension and contraction of Russian territory.  The Russian Empire was the third-largest ever-existing country after the British and Mongol Empires.  It included the Baltic states, part of Poland, Bessarabia, Finland.  Replacing the Empire, the Soviet Union became smaller, losing control of many territorial units.  Then the collapse of the USSR led to the formation of 15 independent republics.  Moreover, centrifugal processes were observed inside independent Russia in the '90s: two Chechen wars, separatist sentiments in Tatarstan, Siberia, and the Far East.  Given this, Moscow has to be sensitive to any threats to territorial integrity because the next collapse will actually mean the end of Russian history.  Based on this, the policy of territorial expansion (or "gathering lands") has strategic importance for Russia.

Most of the countries that were part of the Russian Empire and the Soviet Union performed two significant functions.  The first is an external security function — pushing the borders of the Empire along the entire perimeter, which was of fundamental importance while conducting defensive wars.  It is difficult to imagine how the results of the military campaigns of Napoléon Bonaparte in 1812 and Hitler's Germany in 1941–1945 would have developed without the factor of "deep borders."  The second is the internal defense or controlled decay function.  With the collapse of the Empire, countries located on the periphery and semi-periphery leave, and the core is retained — Russia itself with its internal subjects.

From here follows the next point of the concept of Putinism — returning the post-Soviet space to the sphere of strategic dominance of Moscow.  To achieve this goal, it is important for President Putin to solve two tasks: to provide closer geopolitical integration of Belarus with Russia and to develop high-quality mechanisms of influence on Ukraine.  The Russian leader is deeply convinced that Russians, Ukrainians, and Belarusians comprise a unified nation that should be gathered under the leadership of the Kremlin sooner or later.  This is how it was in the imperial and Soviet periods.  The third task is to prevent the entry of traditional post-Soviet countries (the Baltic countries are not considered) into the North Atlantic Alliance.

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In global politics, Putin sees his mission in revising the results of the Cold War.  He is convinced that the collapse of the Soviet Union was due to the weakening of the center's influence, the indecisiveness of the authorities and the internal intrigues of hostile agents of influence.  Putinism rejects any idea that Russia lost to the United States and should now forget about its geopolitical ambitions.  At the same time, being a pragmatist, Putin realizes that today Moscow does not have sufficient resources to claim world domination.  It is important for the Russian leader that the most powerful actors in the international community develop clear rules for the game.  For Putin, the ideal model combines past systems.  The basis should be sovereignty and the principle of non-interference in each other's internal affairs (Westphalian system), the balance of power (Vienna system), and separation of responsibilities (Yalta and Potsdam system).  From the standpoint of Putinism concept, such an architecture will return Russia the status of great power and force the rest of the countries to reckon with its opinion and interests.

The fundamental feature of the new ideology is that Russia does not regard the West as its enemy.  Moscow sees a certain way of the civilizational and political future of Europe where neoliberal philosophy has set the tone for the past twenty years.  Today, other trends are visible.  One of them is the strengthening of the right-wing conservative powers: Boris Johnson in Britain, the regime of Viktor Orbán in Hungary, the party of Sebastian Kurz in Austria, Euroskepticism in Italy, France, Greece, and Germany.  The basic request of the new generation of European politicians can be described simply: more sovereignty, less dependence.  Even leaders such as Emmanuel Macron state the need for an independent European security system.  This is exactly what Russia wants to see in Europe.  It is important for Putin that Europeans rely solely on their pragmatic interests in building a political and economic dialogue with Moscow.  This narrative is becoming more and more popular in the Old World.

Areg Galstyan, Ph.D. is a regular contributor to The National Interest, Forbes, and The American Thinker.